Maaahhh comment que je trie moi!?

Publié le 24 juin 2008 par Anne-Sophie

Beaucoup de billets sur la toile en ce moment traitent de la question des déchets. Est-ce la faute aux italiens qui à Naples ont mis le feu aux poubelles..? Est-ce le retour de l’été et les opérations de nettoyages des plages ou des pistes en montagne? Je n’ai pas de réponse à vrai dire, mais les différentes infos que j’ai croisées dernièrement sur le net à ce sujet montrent que la question n’est toujours pas réglée en France… A en croire les deux billets précèdant celui-ci, je me dis aussi que le sujet est dans l’ère du temps de mes préoccupations…

Saviez vous qu’un individu produit 360 kg de déchets par an (chiffres de 2002), dont 70 kg sont recyclés, et 290 kg sont incinérés ou stockés? Saviez vous aussi que cette quantité de déchets coûte 85 euros par personne et par an? Non? Eh bien maintenant vous le savez! Mais au-delà des chiffres, voyons plus en détail ce qui peut poser problème dans les comportements de tri et recyclage…

Le tri est l’un des premiers gestes effectués lorsque l’on commence à être sensibilisé aux problématiques environnementales. Pour preuve, le tri des déchets apparaît en seconde place dans le “TOP 15 des écogestes les plus cités” réalisé par l’Argus de la presse (spécialiste de la veille et des études médias) en collaboration avec l’ADEME depuis mars 2007 (ci-dessous les 3 premiers mois de 2008).

Source: ADEME

Naturellement, entre ce qui est affirmé et ce qui est concrètement réalisé, il y a souvent un “gap” comme disent nos voisins anglais…

Pour prendre un exemple très personnel, j’avoue avoir été troublée il y a quelques mois quand nous sommes redescendus de Paris à Bordeaux avec mon homme: dans le genre “sensibilisés”, je crois que nous sommes pas trop mal placés… or plusieurs choses nous ont surpris:

- Dans le XVIIIième arrondissement de Paris où nous étions avant, le tri existe depuis longtemps et nous avions nos poubelles de tri dans l’immeuble,

- A Bordeaux, les choses avancent peu à peu: lorsque nous sommes arrivés en décembre dernier il n’y avait pas de poubelle de tri dans notre rue (située dans le quartier historique) et donc nous devions marcher sur un petit kilomètre avant d’atteindre les bacs de tri pour le verre et le papier. D’ailleurs, un dimanche matin où nous étions en train de décharger nos ordures après avoir marché avec nos sacs de tri, nous nous sommes fait interpeller par un couple nous reprochant de mettre nos enveloppes dans les bac papier… à cause de la colle… Je vous dis pas la tête que l’on a tiré à cette remarque! Et l’énervement dans lequel elle m’a mise: déjà que nous faisons attention, que nous prenons le temps de nous déplacer pour trier, que nous utilisons nos enveloppes en guise de bloc-note avant de les jeter, voilà que ça ne va pas!

Carte de mise en place du Tri à Bordeaux

Du coup, j’ai demandé autour de moi et les responsables de l’ADEME Aquitaine m’ont affirmé, lors de la foire internationale de Bordeaux, que l’on pouvait mettre les enveloppes dans la poubelle de tri… ouf!

Mais cela n’enlève rien au problème: le couple qui nous a inerpellé à ce sujet devait avoir ses raisons pour affirmer une telle chose! Et un peu d’attention portée sur la couleur des bacs de tri démontre aussi que les choses ne sont pas uniformes ni facile pour ceux qui veulent faire des efforts: à Paris, nous avions un code couleur tel que jaune = papier et emballages, vert = verre et du gris = tout le reste. A Bordeaux, il y a du Vert foncé pour le tri que je faisais en jaune avant, les bornes de tri pour le verre ne sont pas encore uniformément réparties dans la ville - elles sont en bleu je crois - et pour le reste, c’est bon( !) c’est aussi en gris avec généralement un gros autocollant indiquant “ordures ménagères” puis le numéro de téléphone à composer en cas de doute.

Qui plus est, malgré la campagne de sensibilisation menée par la collectivité ici, le message ne passe pas facilement…

A gauche, le bac pour les emballages et le papier (ressemble un peu avec les trous sur le dessus aux bacs pour le verre…). A droite, les bacs gris pour les déchets ménagers non recyclables

Les consignes de tris placardées sur les bacs verts (emballages) mais à droite… une poubelle jaune (qu’est-ce? celle d’un commerçant?) et un bac pour les emballages dans lequel on trouve de tout… pas trié du tout en fait…

En poursuivant mon enquête lors de discussions avec des amis, connaissances ou rencontres bordelaises, je me suis rendue compte que beaucoup sont plein de bonne volonté mais sont rapidement découragés! Dernier exemple en date: lors d’une soirée de blogueuses mi-mai, plusieurs nanas “non écolos” mais “sensibilisées” et ayant l’envie d’agir étaient surprises que le tri ne soit pas plus facile dans leur cité.

Naturellement, je prends Bordeaux comme exemple parce que j’y habite, mais il existe de nombreux cas comme celui-ci et la question essentielle demeure: pourquoi les choses ne sont-elles pas uniformes au niveau national? Un début de réponse est donné sur le site de la collectivité urbaine du Grand Lyon… mais il faut drôlement se renseigner avant de trouver une explication viable…

Qui plus est, ce très bon article de Guillemette Faure publié fin mai sur Rue 89 explique bien que “les erreurs représentent près d’un cinquième des tonnages de tri sélectif, de 8% dans les coins à habitat pavillonnaire où chaque habitant a son bac jusqu’à un quart dans les communes à “habitation verticale”. Paradoxalement, la plupart des erreurs ne sont pas le fait de pignoufs qui jettent leurs poubelles dans le premier bac venu mais sont plutôt dues à de l’excès de zèle des trieurs.” Parmi les déchets qui posent problèmes: le plastique, la céramique, mais aussi les “sculptures” de certains pour gagner de la place.. Puis surtout: videz les contenants, mais ne lavez pas le verre que vous jetez (grand débat que cette question d’ailleurs!). Car une erreur de tri suffit à envoyer au refus un bac entier: comme le souligne Bruno Genty, de France Nature Environnement, “le tri, ce n’est pas sans impact, ce sont des camions qui tournent. Quand il y a des erreurs, ça rallonge encore le transport, quand les refus de tri repartent en décharge ou en incinération.” Car oui, les déchets, ce ne sont pas que les poubelles, mais une infrastructure logistique et des coûts de transports important (financièrement et écologiquement parlant!)

Campagne d’Eco-Emballages contre les idées reçues

Alors comment faire, dans ces conditions, allez vous me dire?

Plusieurs solutions s’offrent à vous:

- Le bon sens: limiter un maximum les déchets “à la source”, i.e. lors de chaque achat, demandez vous si oui ou non vous pouvez réduire le nombre d’emballages et de déchets à venir après consommation du produit acheté. Ces emballages sont-ils vraiment utiles? Et surtout: qu’est-ce qui m’empêche de refuser systématiquement les sacs plastiques qu’on me donne d’office? Pourquoi ne pas arborer un joli sourire et dire “non c’est bon, pas pour moi merci, je fais attention vous savez…”

- Se renseigner en détail sur le tri et sur les dispositions de votre communauté urbaine (en charge du tri): mais comme le rappellent Alexandra et Stéphanie, les axes de progrès sont énormes et les collectivités doivent “soutenir les entreprises en amont pour réduire les déchets via l’écoconception et pour développer le principe de réemploi des produits”, mais aussi “acheter des produits éco responsables pour avoir un effet de levier positif sur le marché” et “sensibiliser les consommateurs encore et toujours”. Chacun doit faire des efforts en somme, chaque partie prenante doit inciter l’autre!

- Sensibiliser dès le plus jeune âge: dans mon entourage, plusieurs mamans m’ont confié que leurs enfants étaient de plus en plus sensibilisés et les rappelait même à l’ordre parfois! Preuve que cela marche! Et cela s’en ressent, comme le montrait notre article sur l’écologie dans les collèges par exemple ou cette vidéo relayée par Olivier.

- Réfléchir ensemble à des solutions innovantes: comme nous l’explique Elvire, “la ville de Philadelphie, à travers l’entreprise Recycle Bank, offre à ses citoyens la possibilité de gagner des bons de réductions pour des produits d’entreprises partenaires de l’opération (Whole Foods, RiteAid, Starbucks, mais aussi de nombreuses entreprises locales)… et cela pour le simple fait de jeter ses déchets dans les poubelles qui convient

Ce concept est en fait proche du système de pesée-embarquée (système qui a par exemple permis, dans une commune du Haut Rhin, de passer de 400 kg à 96 kg de déchets par an et par habitant), sachant que le succès de l’initiative menée à Philadephie par Recycle Bank encourage de nombreuses autres villes améircaines à se lancer dans des expériences similaires. Même si le système est critiqué car il a parfois encouragé certains citoyens à recourir à de la décharge sauvage, il est somme tout très incitatif et…instructif vu que tout le monde y gagne!

- Enfin, à signaler avant de conclure: deux initiatives lancées par des blogueurs: l’une par Boris Perchat donc nous parlions il y a deux jours via l’opération 1milliondedvdpourlaplanète.com. Cette fois-ci, il s’agit du projet Open Future destiné à mener une réflexion de concert afin de trouver des solutions innovantes. La première série de propositions concerne justement les questions de recyclage!

Autre projet dont on vient de me faire part: le “RecyclingPin“, sorte de post-it électronique que les webmaster et blogueurs peuvent mettre sur leur sites/blogs pour rappeler à leurs lecteurs la fameuse règle des 3 R: Réduire, Réutiliser et Recycler!:-) A bon entendeur donc…!

++ Pour aller plus loin ++

  • Le site d’Eco-Emballages, formidable ressource sur le sujet
  • Les guides de l’ADEME et notamment le site Réduisonsnodéchets: la semaine de réduction des déchets aura lieu cette année edu 22 au 30 novembre 2008.
  • www.fne.asso.fr/preventiondechets
  • Le site www.dechetcom.com/
  • “Déchets: ces mauvais trieurs qui sabotent le recyclage”, Rue 89, Mai 2008
  • “La pesée embarquée des déchets a fait ses preuves”, Enviro2B, Octobre 2007
  • “Payer les ordures au kilo”, Louise Allavoine pour Planète Terra, Novembre 2007
  • “Vers une extension de la redevance incitative au tri des déchets ménagers”, Actu Environnement, Novembre 2007

Pensez aussi au compost: la fraction biodégradable (déchets de cuisine et déchets verts), qui peut être compostée, représente le quart du poids de nos poubelles.

  • Cf. la fiche de l’ADEME sur le sujet
  • A Bordeaux, les résidents sont incités à acheter des composteurs (attention toutefois à ne pas acheter un composteur en plastique en provenance d’Australie…)
  • A Montréal, une société s’est même spécialisée dans le ramassage de compost!

Les opérations de nettoyage, parmi les plus connues:


Nettoyage des stations par Mountain riders via Zapiks