L’abstraction caribéenne : une abstraction divergente ?

Publié le 14 février 2017 par Aicasc @aica_sc

 Notes pour la  conférence du 12 février 2017

Fondation Clément

Exposition Le Geste et la Matière

L’exposition muséale sur l’abstraction informelle européenne,  Le Geste et la Matière, présentée à la Fondation Clément en partenariat avec le Centre Pompidou, fournit un prétexte pour examiner l’abstraction caribéenne et en tenter une analyse.

 Certes, une forme de stylisation et de géométrisation a existé dans des civilisations anciennes  de la Grèce antique, de l’Inde, du  Japon mais aussi  chez les Aborigènes d’Australie et les Amérindiens. Cependant,   on considère que l’abstraction, au sens moderne du terme, a vu le jour entre 1911 et 1917 avec quatre pionniers, Frantisek Kupka, Vassily Kandinsky, Kasimir Malevitch et Piet Mondrian. Ils ont abouti à l’abstraction simultanément mais indépendamment  les uns des autres.

Les peintures abstraites sont des images autonomes qui ne représentent pas la réalité et ne renvoient à rien d’autre qu’elles-mêmes. Elles abandonnent toute forme identifiable. On considère une aquarelle de Kandinsky, signée et datée de 1910, avec au dos l’inscription « aquarelle abstraite » comme la première œuvre abstraite.  On sait aujourd’hui que c’était  une esquisse pour une huile sur toile, Composition VII, achevée à l’automne 1913.

On distingue l’Abstraction géométrique et l’Abstraction gestuelle.

L’abstraction géométrique est un formalisme géométrique strict. Ligne et couleur doivent être la base structurelle de chaque œuvre

L’abstraction gestuelle est une peinture qui refuse la figuration explicite, reconnaissable à une gestuelle spontanée, parfois proche de la calligraphie et à une matière picturale expressive. Elle ne  remet pas en cause l’identité du tableau. Ce mouvement connaît ses heures de gloire  entre 1945 et 1960, en France, avec notamment l’Ecole de Paris et   se développe aux Etats – Unis sous la forme de l’expressionnisme abstrait et de l’Action painting.

C’est le temps de l’Art moderne, caractérisé par la mise à l’épreuve des règles de la figuration et par un impératif d’expression de l’intériorité de l’artiste.

 L’art contemporain, s’attachera à partir des années 60, à la mise à l’épreuve de la notion même d’œuvre d’art et au déplacement des frontières ontologiques de l’art avec l’apparition de nouvelles formes artistiques : ready made, installation, performance, art conceptuel,  qui vont participer du déclin de la peinture.  Aujourd’hui la question pertinente en peinture n’est plus celle de l’abstraction ou de la figuration  comme du temps du paradigme moderne affirme Nathalie Heinich. L’abstraction appartient à l’histoire de l’art moderne.

Dans l’archipel, la peinture abstraite émerge dans la Caraïbe hispanophone, dans les îles culturellement leaders, Cuba, Porto Rico, République Dominicaine, au tournant des années 50-60, au contact des artistes latino- américains comme l’Urugayen Joachim Torres Garcia plus que sous l’influence française ou américaine. Car les contacts entre la Caraïbe hispanophone et l’Amérique latine  sont étroits.

Ce que je désigne sous le vocable îles leaders, ce sont les îles de la grande Caraïbe, les plus vastes, les plus peuplées et dont la structuration culturelle est la plus ancienne; par exemple, Cuba est dotée d’une Académie des Beaux-arts dès 1818, le musée national des Beaux–arts est créé en 1913, puis l’Institut supérieur d’arts en 1976. En République Dominicaine, l’Ecole Nationale des Beaux-Arts ouvre ses portes en 1942 et à Porto Rico en 1966.   Ce sont d’ anciennes colonies espagnoles. Un autre groupe d’îles de superficie moyenne bénéficie d’une structuration en cours comme la Martinique et  Barbade,  alors que la structuration culturelle du troisième groupe d’îles beaucoup plus petites, Dominique, Sainte – Lucie, Saint Vincent, Saba, reste délicate.

C’est une période historique importante pour la Caraïbe comme le montrent ces quelques dates :

1959 Révolution à Cuba

1961 Assassinat de Trujillo en Rép. Dominicaine

1962 Indépendance de la Jamaïque et Trinidad

1964 François  Duvalier se proclame Président à vie en Haïti

1965 Indépendance de Barbade et Guyana

C’est aussi le moment d’une certaine radicalisation artistique, d’une opposition entre les courants indigénistes qui recherchent l’authenticité locale et une quête plus universaliste avec l’abstraction. L’indigénisme refuse l’assimilation à l’Occident au profit de l’affirmation d’une identité propre et la recherche de l’authenticité locale. Le mouvement indigéniste, par la voix de son initiateur Jean Price-Mars (Haïti) invite les écrivains « à cesser d’être pasticheurs pour devenir des créateurs » (Ainsi parla l’Oncle, 1928). De la littérature, le mouvement gagne les arts plastiques. On cite parmi les peintres fondateurs Pétion Savain, Georges Ramponneau, Edouard Preston, Antoine Derencourt. Les peintres indigénistes privilégient et promeuvent le modèle local.

 Il faut savoir qu’il existe aussi au Mexique un courant politique et littéraire,  l’indigénisme, né  à la suite de la révolution de 1910 et diffusé en Amérique latine. Son fondement est une préoccupation particulière pour la condition des Indiens d’Amérique du Sud.

Les tenants de l’indigénisme   critiquent parfois l’abstraction qu’ils perçoivent parfois comme une concession au modèle culturel nord- américain.

Cuba et les pionniers de l’abstraction caribéenne

Les artistes cubains ont pris le leadership de la production picturale abstraite.

Parmi les précurseurs, on peut citer Amelia Pelaez (1896- 1968) et son  formalisme décoratif ainsi que  René Portocarrero (1912-1986) et sa représentation « géométrisante » de l’architecture et du folklore cubains. Ce ne sont pas des peintres abstraits mais ils ouvrent la voie. Cette avant – garde indigéniste contenait des rudiments d’abstraction.

René Portocarrero

Le pionnier de l’abstraction cubaine, c’est Mario Carreño Morales (1913 -1999). Fondateur avec Sandu Darié et Martinez Pedro (1910- 1989) du journal Noticias de arte, favorable à l’abstraction, il joue un rôle important.

Le groupe Los Once (1953-1955) demeure  l’association d’artistes abstraits la plus connue : Guido Llinás, Raúl Martínez, Agustín Cárdenas, Hugo Consuegra, Francisco Antigua, Tomás Oliva, René Ávila, Ignacio Bermúdez, Fayad Jamis, José Antonio Díaz Peláez, Antonio Vidal et  Viredo Espinosa. Sa profession de foi : la critique du régionalisme et de l’exotisme.

Mario Carreno
1953

Un second groupe apparaît en 1958, Diez Pintores Concretos : Pedro Álvarez, Wilfredo Acay, Salvador Corratgé, Sandú Darié, Luis Martínez Pedro, Alberto Menocal, José Mijares, Pedro de Oraá, Loló Soldevilla et  Rafael Soriano. Leur première exposition se déroule en 1959 à la  Soldevilla’s Gallery Color-Luz, et leur dernière en 1961, au  Museum of Fine Arts à La Havane.

L’abstraction cubaine voit une forme de conclusion en 1963 avec l’exposition Expresionismo Abstracto (Abstract Expressionism)  à la Galeria Habana.

Cependant, il semble que l’abstraction cubaine des années 50 connaisse aujourd’hui un regain d’intérêt avec l’exposition de Carmen Herrera au Withney museum achevée en   janvier 2017 , avec la rétrospective de Pedro de Oraà au musée national des Beaux – arts de la Havane , mais encore avec la récente présentation de Cuban Concrete Art à la galerie  David Zwirner Gallery à Chelsea, et enfin avec  l’exposition Abstraction in Cuba qui a réuni, du 7 avril au 2 juin 2012, quelques artistes abstraits cubains à Miami, sous la houlette du PAAP, Pan American Art Projects.

Carmen Herrera (née en 1915), aujourd’hui centenaire, vient de vivre la consécration de sa carrière avec une rétrospective au Whitney Museum.  Ses œuvres sont de strictes abstractions géométriques.

Carmen Herrera
Whitney Museum
2017

Un autre artiste cubain vient de bénéficier d’une reconnaissance tardive, Pedro de Oraà. Après avoir reçu à Cuba un prix national en 2015,  son exposition Abstractivos au Musée National des Beaux- arts  de la Havane l’a ramené au premier plan. Il est proche du groupe Los Once même s’il n’a pas participé à leurs expositions, membre du groupe Diez Pintores Concretos alignés sur l’esthétique de l’art latino- américain. Il note le regain d’intérêt pour l’art abstrait du milieu du XXème siècle alors qu’à l’époque de la révolution cubaine, on reprochait aux peintres abstraits de fuir la réalité. L’abstraction était en effet considérée comme un mouvement artistique étranger alors que Pedro de  Oraà est convaincu que  l’art abstrait cubain s’est parfaitement inséré dans la culture cubaine.

Parmi les peintres abstraits cubains, tous nés au tout début du XX siècle , on peut encore citer :

Sandu Darié (1908-1991)

Pedro Martinez  (1910-1989)

Raul Milian (1914-1984)

Guido llinas (1923-1985)

Raul Martinez (1927-1995) proche de l’abstraction  gestuelle, membre du groupe  los Once.  Mais perd son intérêt pour l’art abstrait vers 1965 et retourne à la figuration.

Sandu Darié
1955

La situation n’est pas similaire dans les autres régions de la Caraïbe car l’intérêt pour l’abstraction n’y est pas aussi marqué.  Deux artistes du Guyana,  Aubrey Williams (1926-1990) et Frank Bowling (né en 1936), ont néanmoins fortement marqué l’abstraction caribéenne et figurent  parmi les pionniers de l’art abstrait caribéen.

A Porto Rico, dans les années 50, la défense de la culture locale laisse peu de place à l’art abstrait. Porto Rico choisit de promouvoir les arts graphiques comme outil de diffusion culturelle et de mobilisation sociale. Ainsi, la première biennale de la Caraïbe est la biennale de gravure fondée  à Porto Rico  dès 1970. Elle  devient la triennale polygraphique en 2004 et précède donc la célèbre biennale de La Havane dont la première édition voit le jour en 1984.

Dans le contexte portoricain, les arts graphiques sont innovants mais la peinture reste conservatrice. Le refus de l’assimilation culturelle avec les USA reste déterminant  dans  l’histoire de l’art Portoricain et les premiers abstraits sont critiqués pour avoir adopté un concept perçu comme nord – américain. D’après Marimar Benitez, directrice de l’Instituto de Cultura Puertorriquena dans les années quatre – vingt – dix, la problématique, à l’époque, est la suivante : Comment utiliser le langage plastique de la métropole sans tomber dans l’imitation provinciale?

L’abstraction fait néanmoins son apparition  au milieu des années 60 avec Rosado del Valle (1922-2008).

Rosado del Valle NP

Les artistes de République Dominicaine restent essentiellement attachés aux formes académiques : paysages, portraits, scènes de la vie quotidienne expressionnistes ou réalistes alors qu’en Europe, en ce début du XX ème siècle, la polémique autour de l’émergence de l’abstraction se déchaîne D’ailleurs, dans la collection historique du Museo Bellapart, on trouve peu de peintres abstraits.

L’intérêt pour l’abstraction est encore moins marqué dans les îles anglophones et les îles francophones. A Trinidad, aujourd’hui, le positionnement artistique est plus contemporain et les pratiques se tournent plus vers le dessin sur papier que vers la peinture.

En Guadeloupe, Il y a fort peu d’artistes abstraits. Le goût dominant est largement figuratif voire académique estime Christian Bracy, critique d’art guadeloupéen. Et pendant ce temps – là, en  Martinique, l’abstraction n’attire pas les artistes. L’atelier 45, de sa création en 1945 à 2003/2004, reste fidèle à une figuration académique et indigéniste.

L’abstraction caribéenne : une abstraction divergente ?

Le concept de Kobena Mercer, l’abstraction divergente, aide à mieux comprendre l’abstraction caribéenne. En effet, Kobena Mercer, critique d’art, professeur d’histoire de l’art  et des African, American studies à Yale University, soutient que l’on ne peut mener une analyse univoque de l’abstraction et il en étudie les formes « divergentes  » qui émergent dans l’Atlantique Noire , le Tiers monde, en Asie. Selon Kobena Mercer, the discrepant abstraction, l’abstraction divergente est  hybride et non-conformiste. Elle rassemble presque tout ce qui ne peut pas nettement intégrer le discours institutionnel sur l’abstraction comme recherche monolithique de pureté. Elle marque ses différences avec l’art abstrait  tel qu’il naît en Europe à l’aube du XXème siècle . C’est alors, en effet,  un art qui cherche à atteindre une expression parfaite, simple et pure. C’est   une  quête d’expression très pure et non figurative.

Certaines caractéristiques propres à l’abstraction caribéenne, se dégagent de l’analyse de quelques œuvres.  On note, en premier lieu, que l’abstraction pure et dure, géométrique reste rare et se développe plutôt à Cuba. Dans les œuvres des autres tenants de l’abstraction caribéenne, on remarque la persistance du réel, la référence à la nature, l’allusion au monde concret dans les titres, une contiguïté avec le réel souvent clairement revendiquée par les artistes eux-mêmes. D’ailleurs, un retour à la figuration après une expérience abstraite ou parfois un passage permanent de l’un à l’autre prouvent la proximité entre abstraction caribéenne et figuration. Souvent, en outre, mémoire et abstraction sont liées.

La persistance du réel

A la Jamaïque, en 1960, le pionnier de l’abstraction est Eugène Hyde (1931-1980). Dans la production de sa maturité, de fantomatiques figures humaines abstraites camouflées par des bandages, métaphore d’une société en décomposition, dominent ses toiles.

Eugène Hyde 1978

Pascal Smarth (Haïti) dans sa rétrospective à Gatineau, en novembre 2011, exposait quatre grands tableaux de dimensions inhabituelles qui évoquait Haïti dévastée par le tremblement de terre. Quoiqu’ abstraits, ils  ne semblent pourtant pas tourner le dos à la réalité. Par le jeu des textures et des  couleurs qui évoquent traces et matière, ces tableaux manifestent la présence d’un contenu plutôt qu’elles ne le représentent et, par cette évocation, concentrent un fort pouvoir émotionnel.

Pascal Smarth 2011

Luis Hernandez Cruz (Porto Rico né en 1936)  commence sa carrière avec une peinture essentiellement géométrique, entre 1966-1968, puis passe à une abstraction organique entre 70 et 80, avant de revenir à l’abstraction  géométrique où les carrés répétés comme des pixels définissent  un univers inconnu mais où,  sous l’abstraction, persiste le réel : j’interprète le monde avec des carrés. Le carré m’intéresse comme forme d’appui pour exprimer le monde tel que je le vois.

Luis Hernandez Cruz 2016

 La nature comme source d’inspiration

On retrouve le pionnier jamaïcain, Eugène Hyde avec sa Crotons série mais aussi la contemporaine Hope Brooks (née en 1944).

Elle cherche à retranscrire les phénomènes naturels de son environnement, la mer, les montagnes, la lune et à exprimer l’essence de son lieu de vie.

Eugène Hyde
Croton série 1974

Hope Brooks NP

Un artiste trinidadien, Kenwyn Crichlow (né en 1951) se consacre depuis des années et encore aujourd’hui à l’abstraction. Une récente exposition Optimism and transformation s’est déroulée en 2013 à Trinidad. La thématique de l’artiste sont  l’optimisme et la joie. Variations de bleus,  symboles de l’espoir, accompagnées de sa complémentaire l’orange accentuée de quelques vibrations de rouge. L’artiste veut ouvrir le format carré pour donner l’impression de l’infini.

Ce travail n’est pas abstrait, dit – il, mais fondé sur des expériences concrètes  comme le lever du soleil.

Kenwyn Chrischlow 2013

Les œuvres de deux jeunes artistes de Guadeloupe s’inspirent aussi de la nature.

Alain Savelor ( né 1950 ) avec sa série Insectes et Hebert Edau ( né en 1974). Chez Edau, la matière est épaisse. L’artiste travaille les textures et les nuances. Des figures difficilement décelables comme enfouies. Les titres comportent des références à la réalité.

Alain Savelor
Série Insectes 1999

Dans l’exposition Le Geste et la Matière, il y a une section Paysagismes qui regroupe une abstraction restée tributaire d’une référence à la nature comme une forme de postérité à l’impressionnisme.  Jean Bazaine, dont vous pouvez voir l’huile sur toile Marée Basse précise :   il est une autre forme de l’abstrait, celle qui se situe au-delà de la réalité et non en dehors, et qui comporte, totalement transposée mais toujours présente, sa charge utile de monde concret.  Voilà qui semble pouvoir s’appliquer aux artistes cités.

Des allusions à la réalité dans les titres

Les titres contiennent souvent des références au monde concret,  par exemple Caroni Jail de Boodhoo, The death of conquistadors chez Williams, Serie Insectes de Savelor et Paysages de Edau, Garden Série d’Hope Brooks, Croton Série de Hyde….

Une contiguïté revendiquée avec le réel

Elle est souvent clairement revendiquée par les artistes comme le montrent ces quelques citations :

Peu importe ce que ma peinture abstraite est devenue, elle a toujours été inspirée par quelque chose de réaliste, quelque chose d’actuel, quelque chose du paysage, quelque chose des gens. Je n’ai jamais travaillé juste la forme et la couleur . James Boodhoo

 Ce travail n’est pas abstrait, dit – il, mais fondé sur des expériences concrètes. Kenwyn Crichlow

 Toute peinture est réaliste ! Puisqu’elle part d’une réalité individuelle et puisqu’elle fait appel à des éléments concrets pour matérialiser sa présence… on n’invente pas des formes, on les utilise. Alexandre Bertrand

 L’artiste caribéen va tout expérimenter, il ne se posera pas le problème de la figuration ou de l’abstraction bien qu’il ait connaissance de l’histoire de l’art occidental. Alex Burke

 Le mot abstraction signifie « extraire de ». Par conséquent, il y a une base à l’abstraction. Je vois l’abstraction dans tout, dans une chute d’eau, un éclair. Aubrey Williams

 Un retour à la figuration

Plusieurs artistes reviennent à la peinture figurative après une expérience abstraite : Aubrey Williams (Guyana), James Boodhoo (Trinidad), Rosado el Valle ( Porto Rico), Raul Martinez ( Cuba) .

Aubrey Williams à Londres, en 1952, à l’âge de 26 ans, où il s’intéresse à l’expressionnisme abstrait. A partir de 1959, ses œuvres deviennent de plus en plus abstraites et son début de carrière est prometteur. Son abstraction est organique et biomorphique (El dorado 1958, Voodoo 1960 ). On peut percevoir des affinités avec Lam et Matta dans le sens où  il conjugue modernité, originalité, et racines culturelles.   Il participe à l’exposition New Vision en 1956 et ses deux expositions personnelles connaissent un certain succès. Il participe à la Biennale d’art abstrait du Commonwealth où il remporte le premier prix en 1963 avec Roraima), voyage et rencontre Albert Camus et Pablo Picasso. Il est très  actif au sein du CAM, le Caribbean Art Movement (1966-1972) qui  réunissait des écrivains et artistes de la diaspora exilés à Londres. La facture de Williams se fait alors plus libre et ses nuances plus légères. Il rentre au Guyana notamment pour la réalisation d’une immense fresque dans l’aéroport et  à partir de 1970, il réintroduit des éléments figuratifs dans ses toiles comme les Olmec Maya now ou encore Bone Heap 1959, Carib Ritual 1973, Triptych 1976. Il introduit ses figures amérindiennes dans le paysage en mémoire des ancêtres caraïbes disparus. Son abstraction évoque donc le génocide amérindien, le traumatisme de la perte. Ce qui fonde la divergence de son abstraction, c’est l’accent mis sur les racines amérindiennes.  Il participe donc de tout un courant de pensée avec Kamau Brathwaite et Wilson  Harris, qui, dans un contexte où les racines africaines sont privilégiées, soutient l’idée que le traumatisme initial est le génocide amérindien. L’allégorie des identités fossiles de Harris  permet de comprendre que les sources amérindiennes et africaines ne sont pas rivales et ne s’excluent pas.

Death and the Conquistador 1959 Aubrey Williams

Aubrey Williams
1963

Aubrey Williams Olmec Maya – Now and Coming Time 1985

Isaihia James Boodhoo (Trinidad 1932-2004) est considéré comme le pionnier de l’abstraction à  Trinidad , du moins dans ses toiles tardives. D’ascendance indienne, Isaiah James Boodhoo a poursuivi ses études à Londres.  Sa peinture au départ essentiellement figurative s’oriente vers l’abstraction dès les années soixante.  Mais il connaît une certaine lassitude : Je pouvais peindre deux toiles le matin et quatre en une journée. Je n’y exprimais rien qui me satisfasse.  Je souhaitais briser ce moule. Il part donc pour la côte ouest des Etats – Unis où il reprend des études et s’initie sous la tutelle de ses professeurs à l’approche figurative de la côte ouest puis il s’adonne à l’expressionnisme abstrait. De retour à Trinidad en 1969, il aborde des thèmes sociaux et politiques avant d’illustrer en 1982 trois  poèmes de Derek Walcott dans une quarantaine de toiles. Il s’attache ensuite à re-transcrire la culture trinidadienne en mêlant l’expressionnisme abstrait et des éléments fortement figuratifs, comme dans Caroni Jail, où les tiges de canne semblent emprisonner les travailleurs :  Peu importe ce que ma peinture abstraite est devenue, elle a toujours été inspirée par quelque chose de réaliste, quelque chose d’actuel, quelque chose du paysage, quelque chose des gens. Je n’ai jamais travaillé juste la forme et la couleur dit –il.

James Boodhoo NP

James Boodhoo
Caroni Jail

Si les premiers sujets de Rosado del valle (République Dominicaine ) sont locaux, comme par exemple Vejigantes (1955),  il étudie ensuite avec le pionnier de l’art cubain, Mario Carreno, puis produit des œuvres abstraites avant un retour à la figuration dans les années 70.

Raul Martinez ( Cuba) lui aussi effectue un retour à la figuration.

Raul Martinez
1951-1953

Raul Martinez
1970

L’alternance entre la figuration et l’abstraction

Alexandre Bertrand (1918-1995) , parce qu’il vit six mois par an au Canada et six mois par an en Martinique, développe une double pratique pour répondre aux attentes des différents publics. Au Canada, l’artiste se sent libéré de la représentation de l’identité martiniquaise. Cependant, voilà comment Alexandre Bertrand analyse sa production abstraite : il n’y a pas de peinture abstraite. Toute peinture est réaliste ! Puisqu’elle part d’une réalité individuelle et puisqu’elle fait appel à des éléments concrets pour matérialiser sa présence… on n’invente pas des formes, on les utilise. Les sentiments et les pensées sont toujours abstraits mais exprimés par des artistes, ils deviennent concrets. Le rôle de toute forme d’art est de transposer l’abstrait en concret ? (Horizons caraïbes  juin à août 1955 – p 11).  Les  œuvres abstraites d’Alex Bertrand évoquent  le cosmos, la cellule, l’ovule, l’oeuf, l’origine de la vie.

Alisson Chapman Andrews (Barbade), peintre de paysages tropicaux stylisés tente aussi quelques propositions abstraites.

Alexandre Bertrand NP

Allison Chapman- Andrews
2009

Mémoire et abstraction

La relation entre mémoire et abstraction peut surprendre  . Cependant la mémoire est un thème sous – jacent d’une certaine abstraction caribéenne.  On retrouve ce thème dans l’œuvre du second pionnier de l’abstraction du Guyana, Frank Bowling, même si son mode opératoire est tout à fait différent de celui de son collègue,  Aubrey Williams.

Dix années les séparent mais ils ont tous deux quitté leur terre natale pour inscrire leur pratique  dans le contexte de la diaspora caribéenne.  Lorsque Williams débute sa carrière au milieu des années cinquante, l’expressionnisme abstrait triomphe. Lorsque Bowling s’engage dans la peinture, au début des années soixante, c’est l’ère du Pop Art. C’est à la fin des années soixante et début des années soixante – dix que va s’opérer leur mutation stylistique. Néanmoins, leurs carrières et leurs orientations et engagement artistiques sont fondamentalement différents même si, d’une certaine manière, la mémoire sous – tend leurs pratiques. Williams retournera au Guyana et à la figuration tandis que Bowling continuera ses séjours entre Londres et New – York et restera fidèle à l’abstraction.

Frank Bowling ( né en 1936)  travaille entre  Londres et New – York après une jeunesse passée  au Guyana.  Le  critique d’art Kobena Mercer prend  son parcours professionnel comme exemple pour analyser comment les artistes de descendance africaine fonctionnaient  au sein  du milieu de l’art international et comment l’Atlantique était pour eux une force motrice les situant ainsi par rapport au concept de Paul Gilroy, l’Atlantique noire.

Il arrive à Londres, à l’adolescence, en 1950 pour étudier l’art.  Toute sa vie, à l’inverse d’Aubrey Williams, il restera éloigné du cercle des artistes caribéens mais fréquente Francis Bacon et David Hockney. Il est tiraillé entre la tradition figurative de la peinture britannique et l’appel  de la nouveauté de l’art abstrait. Son œuvre Mirror (1963-1964) le démontre. Un escalier en spirale occupe le centre de cette composition rectangulaire et verticale. Trois silhouettes humaines   (dont un portrait de la femme de Bowling, Paddy Kitchen) représentées à des stades  différents de figuration sont échelonnées le long de l’escalier. On perçoit l’influence de Francis Bacon dans le traitement pictural des visages. L’espace inférieur évoque une cuisine mais l’espace supérieur consiste en un fond de couleur structuré géométriquement.  Frank Bowling se rend à New–York pour rencontrer une scène artistique plus cosmopolite : Larry Rivers, Jasper Johns, Rosenquist et le critique Clément Greenberg. Il est sensible à la modification de son statut social : A Londres, c’était un immigrant du Commonwealth, à New – York, c’est un Noir, originaire d’Amérique du Sud et citoyen britannique.

Mirror 1963
Frank Bowling

Frank Bowling
Frank Bowling’s variety store 1966

Une œuvre de 1966, Bowling’s Variety store, marque l’évolution de sa manière. C’est un espace abstrait structuré avec une inclusion de lettres à la manière du Pop art américain. L’expression évoque à la fois la boutique de sa mère au Guyana et la diversité de sa pratique picturale, entre figuration et abstraction. Plusieurs œuvres comme Mother’s House in South America (1968), Bartica Born (1969) semblent accréditer une source autobiographique. Il adopte pour ces oeuvres une technique du Pop art. A l’évidence, la perte et la mémoire ont aussi ici leur place.

Pour les Map paintings, il utilise l’épiscope et la sérigraphie. Il mixte l’appropriation et  la technique de la solarisation du Pop art avec  l’abstraction lyrique. Les contours de l’Europe et de l’Amérique du Nord s’estompent au point de quasiment disparaître. Est – ce une réécriture post-coloniale de la représentation du monde ? Dans cette série des Map paintings, deux autres œuvres des années 68-69, Who’s Afraid of Barney Newman and Who is afraid of red and yellow, présentent  une carte du continent américain émergeant  comme un fantôme  dans les champs de couleur ou color field. L’usage du surnom Barney pour le prénom de Barnett Newman et   le remix d’une toile de Newman qui va jusqu’à l’emprunt du titre  prouvent la proximité de Bowling avec l’artiste et la démarche. L’oeuvre de Bowling revisite la colorfield painting.  Le color field est une tendance artistique de la fin des années quarante et qui se caractérise par la primauté accordée à la couleur qui, désormais, « ne plaide plus que pour elle-même! », et devient le vrai sujet du tableau. La color field painting regroupe initialement certains artistes issus de l’expressionnisme abstrait et souhaitant se démarquer de l’action painting, qui place davantage l’accent sur la spontanéité du geste et la matérialité picturale. La coloration peut également se référer aux couleurs Rastafari : rouge pour le sang de ceux tués pour la communauté noire, vert pour la végétation et de l’or pour la richesse de l’Afrique.

Who’s Afraid of Barney Newman 1968

Il reçoit deux bourses du Guggenheim et participe à la Biennale du Withney museum en 1971. Il publie de nombreux articles dans la presse américaine où il décrit la situation difficile des artistes noirs et revendique une esthétique distincte.

Pourquoi les artistes noirs, étant donné leur rôle historique dans l’art, ont – ils  contribué si peu aux grands courants contemporains et pourquoi ont-ils contribué si peu à l’importante production d’art moderne?

L’influence de la géométrie se refait sentir à partir des années 80.

C’est le premier artiste noir à entrer à la Royal Academy of art de Londres en 2005. En 2017, une exposition de ses œuvres est programmée au Haust der Kunst de Munich. Frank Bowling est entré dans de nombreuses collections du Moma, du Metropolitan museum, du Whithney museum, de la Tate Gallery et bien d’autres.

Aubrey Williams et Frank Bowling ont tous deux pratiqué une abstraction hybride comme d’autres peintres caribéens. Le concept de Kobena Mercer, discrepant abstraction, éclaire leurs démarches artistiques.

Parmi les abstraits dominicains qui traitent ce thème de la mémoire,  on peut citer le pionnier  Paul Guidicelli (1921-1965) très intéressé par les graphismes amérindiens. Tout comme Aubrey Williams au Guyana et Victor Anicet à la Martinique. Certaines toiles de Victor Anicet (né en 1938 ) pourraient aussi passer pour des productions abstraites même si ce n’est absolument pas son positionnement. Victor Anicet travaille sur la mémoire amérindienne.

Paul Guidicelli
1963

Victor AnicetNP

Si ces trois artistes réveillent la mémoire amérindienne, ce thème mémoriel prend d’autres apparences chez Vicente Pimentel, Alex Burke, Valérie John.

Le nom de Pimentel ne figure généralement pas dans les histoires de l’art des Caraïbes. En effet, l’artiste  a construit sa carrière, à Paris,  hors de République Dominicaine, même s’il y est né et y a grandi, même si, dans ses œuvres, on retrouve de nombreux motifs qui renvoient aux souvenirs de son enfance. Ses toiles sont de taille impressionnante, d’un format proche de celui des expressionnistes abstraits de sorte qu’elles s’imposent aux spectateurs. Les critiques suggèrent une proximité avec l’art rupestre. La surface est parcourue de graffitis. Il y a comme une fusion du fond et de la forme et l’on ne perçoit pas toujours si les taches ou les traits appartiennent au fond ou sont déjà des inscriptions. Le titre de son œuvre, Sémantique de la mémoire, confirme l’importance du thème mémoriel.

Vicente Pimentel
FRAC MARTINIQUE

Alex Burke (né en 1944)  ne se considère pas non plus comme un peintre abstrait. Il travaille sur le thème de la mémoire pour essayer  de la reconstruire comme de nombreux artistes caribéens, en en recollant les morceaux épars. Pour ce faire, ces plasticiens  font flèche de tout bois, utilisent différentes techniques, différents médiums,  différents dispositifs,  pratiquent l’hybridation pour essayer d’éclairer cette mémoire confuse, la faire émerger, la faire exister. L’artiste caribéen va tout expérimenter, il ne se posera pas le problème de la figuration ou de l’abstraction bien qu’il ait connaissance de l’histoire de l’art occidental. L’artiste caribéen sera tour à tour ou simultanément abstrait, figuratif, assembleur, installateur et tout cela à la fois, au gré de ses besoins,

Alex Burke
FRAC MARTINIQUE

En 1984 je m’installe à Paris. Pour des raisons pratiques, je décide de revenir à la toile sur châssis. La toile adossée au mur  sera recouverte de signes, de traces  grises, noires, blanches exécutées avec des brosses, des couteaux, parfois à la main, puis  par-dessus des tracés sont exécutés directement avec le tube de peinture. Ces signes seront recouverts de couches  successives laissant apparaître des bribes de formes. Ces peintures chargées de matière peuvent évoquer  les parois de montagnes et des grottes gravées.

Je vais aller plus loin. En 1989  je délaisserai la toile pour des papiers de grands format, un Fidelis Arche 180 grammes de 80 x 102 cm parfois en diptyques. A la mine de plomb, à l’encre de chine noire, au lavis je tracerai des signes furtifs dans l’urgence comme pour confier au papier des souvenirs fugaces et créer un espace mental pour se promener ou aussi  se perdre.

Est – il pertinent d’inscrire Valérie John dans cette catégorie des peintres abstraits ? Valérie John n’est pas peintre et donc à fortiori pas peintre abstrait. Cependant elle pratique une forme d’abstraction et  le titre de cette exposition du Centre Pompidou à la Fondation Clément, le Geste et la Matière, s’applique bien à sa démarche. Son geste, c’est le tissage par superposition et croisement de papiers recyclés. Sa matière, c’est le noir du photocopieur parfois conforté ou remplacé par des pigments, pâte indigo ou poudres pour teinture. La non représentation dans l’œuvre de Valérie John ne s’inscrit pas dans une déconstruction de la figuration. C’est le rejet de l’apprentissage de  l’Ecole des Beaux – Arts, le refus du moule occidental, le désir de conquête de sa propre identité qui l’ont conduite à chercher et créer un  vocabulaire plastique original.   Pour ne pas s’adosser à l’histoire de l’art contemporain occidental et construire un propos formel personnel, elle s’est tournée vers le quotidien africain pour fonder sa pratique.  Elle a choisi le pagne comme repère formel pour construire sa propre dynamique de création autour des thématiques  du voyage, du dépaysement, du déplacement. Elle lui emprunte sa structure quadrangulaire. Elle agit sur la matière épaisse d’un noir dense par prélèvement, effacement ou  gravure avec des outils qu’elle imagine et fabrique. Sa non- représentation est chargée d’historicité et, comme Alex Burke, la reconstruction d’une mémoire est son propos.

Valérie John NP

L’abstraction

Néanmoins, on compte tout de même des tenants de l’abstraction au sens traditionnel du terme.

Noemi Ruiz ( Porto Rico ) , plasticienne et administratrice du musée de Porto Rico,  propose une abstraction structurée et  Lope Max Diaz ( Porto Rico ) , une variante « géométrisante » de l’abstraction.

A Barbade, ce qui a retenu mon attention, c’est la façon dont de très jeunes artistes de Barbade s’emparent de l’art abstrait pour le reformuler de façon contemporaine : Alicia Alleyne et Mark King

Allicia Alleyne

Mark King 2015

A Sainte Lucie, Winston Branch (1947-) s’adonne au tachisme

Winston BranchNP

L’art Naïf, personne n’en doute aujourd’hui, est loin d’être la seule production artistique d’Haïti. Et de nombreuses expositions ont rendu hommage à cette part abstraite, non négligeable, de l’art haïtien. Notamment, celles de Gérald Alexis, critique d’art, auteur de nombreux ouvrages mais aussi commissaire d’exposition.

Le pionnier de l’abstraction en Haïti est Lucien Price. Dès 1947, il crée deux séries, Symphonie et Rythmes chants d’Afrique où il cherche à transposer le rythme en peinture Price est héritier des indigénistes, il veut donc que son art reflète ce qui est haïtien mais, il est moderne et adopte, dans cette série, le langage abstrait. Moderne, il a voulu montrer que le concept de tambour pouvait être conduit au-delà de la simple représentation de l’instrument.

Lucien Price
Rythmes Chants d’Afrique 1949

Cette transcription en ligne d’un rythme musical fait penser à cette théorie-de Dora Vailler, citée par Gérald Alexis selon laquelle:

   …pour l’artiste créateur qui veut et  qui doit exprimer son univers intérieur, l’imitation, même réussie, des choses de la nature, du monde qui l’entoure, ne peut être un but en soi. Et il envie l’aisance, la facilité avec lesquelles l’art le plus immatériel, la musique y parvient. On comprend alors qu’il se tourne vers cet art, et qu’il s’efforce dans le sien de découvrir des procédés similaires. » ‘(*)

Le rythme reste au cœur des créations de Tiga avec Jam session mais aussi de Ronald Mevs.

L’oeuvre de Gérard Hyppolite dit Hipolit est également marquée par l’abstraction. Sa dernière exposition Module 30, se fonde sur un module identique, répété et décliné à la manière d’une partition musicale, agrémentée d’une  recherche scénographique particulière.  Son abstraction se veut l’expression de son intériorité.

En Martinique, on pourrait aussi évoquer Mathieu Jean Gensin (né en 1934)  , qui a participé fugacement au groupe Negro – Caraïbe, propose une abstraction lyrique matiériste avec des inclusions de petits objets, de cauris par exemple.

Serge Hélenon (né en 1934) est l’un des deux membres de l’Ecole Negro – Caraïbe avec Louis Laouchez. Il abandonne la figuration au début des années soixante au profit de l’abstraction qu’il développe dans des peintures à l’huile, des gravures au carborandum et des assemblages qu’il baptise Expressions bidonvilles. Ses compositions sont sobres. La puissance et la densité du noir sont dynamisées par quelques accents de couleurs en contrepoints.

Serge Hélénon
1989

Il n’y a pas d’intention de figuration chez Julie Bessard même si ses formes peuvent évoquer le minéral, le végétal. Son intention, c’est l’abstraction. Sa démarche se concentre sur l’espace, la relation entre l’espace et les formes.  Dans ce travail sur l’espace, la  couleur,  la texture et le rythme,  la gestualité reste volontairement visible. En effet, le résultat visuel correspond au geste et n’exprime en rien  l’intériorité de l’artiste. L’équilibre de la composition de tous ces éléments conjugués crée un chemin pour l’œil.

Julie bessard
Fonoirs NP

Cette analyse mériterait certainement d’être approfondie. Ce ne sont que quelques exemples. Mais peut – être suffisent – ils pour expliquer le contexte de l’éclosion de l’art abstrait dans la Caraïbe et pour dégager quelques-unes de ses particularités, en relation avec le concept d’abstraction divergente de Kobena Mercer.

Dominique Brebion

Ouvrages consultés :

Kobena Mercer,  The discrepant anstraction

Veerle Poupeye, Caribbean art

Anne Wamsley, Stanley Greaves,  Art in the Caribbean, an intoduction

Nathalie Heinich, Le paradigme de l’art contemporain

Gérald Alexis Divers articles :

Peinture haïtienne : quelle peinture?  

Une oeuvre abstraite porteuse de mémoire