Jean Hegland – Dans la forêt

Par Yvantilleuil

Ce roman, paru en 1996 aux États-Unis, aura donc mis un certain temps à sortir de la forêt et à traverser l’Atlantique.

Jean Hegland y raconte l’isolement et la survie de deux sœurs au sein d’un pays dévasté par une catastrophe non identifiée. Si l’origine du décor post-apocalyptique n’est jamais spécifiée, cette fin du monde n’est néanmoins pas soudaine, mais plutôt progressive. Pas de zombies donc, ni de météorite, mais l’électricité et le téléphone qui fonctionnent d’abord par intermittence, puis plus du tout. Les énergies fossiles, les médicaments et les vivres qui viennent à manquer… et un monde tel qu’on le connaît qui s’efface petit-à-petit…

De plus, les deux sœurs que l’on accompagne durant ce huis-clos vivent à 50 kilomètres de la ville la plus proche et mettent donc encore plus de temps à saisir l’étendue de la catastrophe. Pourtant, même si elles ont été élevées dans une maison bâtie au cœur de la nature, elles doivent apprendre à se débrouiller et à survivre dans cette forêt encore plus isolée qu’avant. Alors que les ordinateurs, les téléphones et les micro-ondes perdent toute utilité, certains vieux objets entassés dans la remise du père reprennent progressivement vie…

La grande force de ce roman est en effet le réalisme avec lequel il décrit la fin de notre société de consommation au profit d’une vie plus en harmonie avec la nature. Tel Robinson sur son île, les deux jeunes filles se retrouvent livrées à elles-mêmes et prennent conscience de la futilité des objets, des valeurs et des rêves qu’ils croyaient tellement importants. Aller à Harvard ne signifie plus rien dans ce monde où les plus grandes richesses se cueillent dans la forêt. Dans ce retour parfois contemplatif à la nature, les valeurs changent et même les livres deviennent dispensables à la fin… l’horreur quoi !

Si les critiques sont dithyrambiques et que j’ai fortement apprécié la lecture, je me permets tout de même de formuler quelques points qui m’ont moins plu. Il y a tout d’abord la lenteur de certains passages. Ce retour à la nature va non seulement de pair avec un changement de style de vie, mais également avec un changement de rythme et, personnellement, quand je dois suivre quelqu’un qui ramasse des glands pendant plusieurs pages pour survivre, faut m’excuser, mais j’ai tendance à piquer du nez. Ensuite, lorsque l’une des sœurs fait systématiquement des recherches dans son encyclopédie afin de trouver des réponses aux richesses et aux menaces qui l’entourent, j’ai parfois eu l’impression de lire une page Wikipedia, mieux écrite certes, mais tout de même. Puis, finalement, il y a le fait de ne pas connaître la véritable cause de cette catastrophe. Je sais très bien que celle-ci ne constitue qu’un prétexte au développement de ce huis-clos, mais il n’y a rien à faire, ça m’énerve de ne pas savoir…

Un très bon roman, qui nous invite à réfléchir, à regarder notre monde d’un autre œil et à relativiser l’importance du confort de notre petite vie de grand consommateur alors que la véritable richesse se situe probablement ailleurs… pourquoi pas au cœur de cette forêt…

Ils en parlent également : Jérôme, Noukette

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