[fanfiction Harry Potter] Antje #15

Par Artemissia Gold @SongeD1NuitDete

Bonne lecture à tous ! Petite précision à noter, le prochain chapitre sera disponible seulement dans 15 jours.

Chapitre 15

Heart of glass

Antje, très pâle, regardait le couloir par lequel Kowalski venait de disparaître. Elle se tordit les mains avec nervosité :

« Merde, merde, merde », marmonna-t-elle.

En temps normal, elle se montrait rarement grossière. J’aurais pu trouver ça drôle si son expression ne m’avait pas un peu inquiété. Je voulus lui enlacer les épaules mais elle s’écarta brusquement.

« Calme-toi, dis-je.

— Me calmer ? s’écria Antje d’une voix aiguë. Kowalski nous a vus, Sirius. Toute l’école sera au courant avant ce soir !

— Et alors ?

— Et alors, je n’ai pas envie que ça se sache ! Surtout elle et ses saletés de copines ! »

Il me fallait admettre que je partageais en partie son point de vue : moi non plus, je n’avais pas très envie que tout le monde soit au courant mais pas pour les mêmes raisons. Antje craignait les réactions des gens. À titre personnel, je m’en battais l’œil avec une patte d’hippogriffe mais il s’agissait de mes affaires privées. Seulement, les histoires de couples passionnaient une bonne partie des élèves qui n’avaient rien d’autre à faire de leurs journées que de se préoccuper de qui sortait avec qui. Être l’objet de l’attention générale pour une raison pareille n’était pas dans mes projets mais Kowalski étant ce qu’elle était, je devrais faire avec, du moins jusqu’à ce que je me lasse des regards en coin et autres ricanements auxquels il nous serait difficile d’échapper.

Je repris Antje par les épaules et la serrai suffisamment fort pour la dissuader de me repousser.

« Retournons dans la salle commune », dis-je.

Elle ne répondit pas mais je savais très bien qu’elle gambergeait.

Nous traversâmes l’école en silence. Plus nous avancions dans les couloirs, plus je sentais Antje se tendre à mes côtés. Je lui aurais volontiers fait remarquer que Kowalski ne répandrait pas son venin en cinq minutes mais elle ne m’aurait pas cru. À ce compte-là, autant économiser sa salive.

oOØOo

Je repérai rapidement James et Peter qui jouaient à la bataille explosive dans un coin. Je traînai Antje à ma suite et ne la lâchai que pour la laisser s’écrouler dans un fauteuil. Mon meilleur ami leva un œil de son jeu :

« Vous revoilà, dit-il. Qu’est-ce que vous avez fabriqué à la bibliothèque ? »

Antje, qui regardait autour d’elle avec nervosité comme si elle s’attendait à ce que tout le monde la montre du doigt, tourna la tête vers James et se frappa le front du plat de la main :

« Oh bon sang, grogna-t-elle.

— Qu’est-ce qui se passe ? », demanda mon pote en plissant les yeux derrière ses lunettes.

Je ne dis rien et préférai la laisser expliquer ce qui s’était passé. Elle baissa les yeux, les sourcils froncés, comme si les plis de sa robe la fascinaient.

« Je suis une idiote, dit-elle tout bas.

— Je ne suis pas d’accord, objecta James, mais j’aimerais bien que tu m’expliques ce qui te fait penser une chose pareille. »

Elle leva la tête et le regarda bien en face :

« J’ai compris ce qui arrive à Remus. Je sais pourquoi il ne va pas en cours un ou deux jours par mois. Ça m’a pris un peu de temps mais… enfin bon, je voulais vérifier un truc à la blibliothèque et Sirius est venu me chercher. Quand on est sortis… Kowalski nous a surpris. J’ai…

— Attends, interrompit Peter, elle vous a entendu parler de Remus ?

— Non, répondit Antje très vite. On n’allait pas discuter de ça dans les couloirs. Seulement, elle… enfin… »

Incapable de terminer sa phrase, elle baissa à nouveau les yeux. James eut un sourire de travers :

« Elle vous a vus en train de vous bécoter, c’est ça ?

— Pas exactement, intervins-je. Je lui faisais un câlin, c’est tout. Elle a dit un truc comme quoi c’était « dégueulasse », ce qui est un peu se foutre du monde vu la façon dont Hopkins se donne en spectacle, et puis elle est partie. »

À mes côtés, Antje serra les plis de sa robe entre ses doigts.

« J’ai paniqué à l’idée qu’elle le répète à tout le monde mais même si elle le fait, ce sera toujours moins grave que ce qui arrive à Remus. Je suis vraiment stupide. Je fais toute une histoire de pas grand chose, finalement. »

James secoua la tête.

« Tes problèmes ne peuvent pas être comparés avec ceux de Remus, dit-il, parce qu’ils ne sont pas du même ordre. Certes, il a un petit souci poilu remarquablement ennuyeux mais on s’occupe bien de lui. Dumbledore lui a permis de faire ses études normalement, ce qu’il aurait très bien pu refuser. Tout le monde fait ce qu’il peut et nous, ses amis, on est restés avec lui même après avoir compris. Toi, tu viens de chez les Moldus, on te le reproche tout le temps, Kowalski et les autres sont incapables de comprendre que la valeur d’une personne va au-delà de la popularité ou d’un tour de taille minuscule, donc c’est normal que tu aies peur. Tu n’as pas à te le reprocher ni à te traiter d’idiote. De toute façon, si tu étais une idiote, je ne serais pas en train de te parler parce que j’ai horreur des crétins. »

Mon meilleur ami, qui semblait surpris de sa propre tirade, se gratta l’arrière de la tête, ce qui eut pour effet d’ébouriffer encore plus sa tignasse si c’était possible. Antje sourit. Peter ramassa son sac posé au pied de son fauteuil et fouina dedans pour en sortir un Chocogrenouille un rien écrabouillé.

« Tiens, dit-il en tendant la confiserie à Antje. Mange ce choco. Remus dit toujours que ça fait du bien quand on n’a pas le moral. »

Le batracien chocolaté était en triste état, aussi il se contenta de ramper sur la table au lieu de sauter quand Antje ouvrit le paquet. De toute façon, bondissant ou pas, son destin était d’être mangé, aussi il ne fit pas long feu.

oOØOo

Si Kowalski s’était attendue à provoquer un petit scandale et révélant à qui de droit (selon elle) ma relation avec Antje, elle fut probablement déçue. Hopkins elle-même ne fit pas grand cas de l’anecdote : elle se contenta de venir me trouver un matin avant le cours de potions pour me dire que je n’avais aucun goût en matière de filles et qu’à partir de là, elle ne me considérait plus comme une fréquentation potentielle. Je me contentai de lui répondre avec un sourire hypocrite que c’était tant mieux et que ça me ferait des vacances. Ses copines passaient devant moi le nez en l’air dans une attitude qu’elles pensaient méprisante mais qui en fait relevait du plus parfait ridicule. D’après ce que j’appris par la suite, Hopkins leur avait dit qu’à partir du moment où elle avait cessé de s’intéresser à ma personne, elles avaient l’ordre de faire de même. Ces suiveuses sans cervelle s’étaient donc empressées de lui obéir, à l’exception de Kowalski elle-même qui prenait un air mauvais à chaque fois qu’Antje se trouvait dans son champ de vision.

Bien entendu, les Serpentard furent mis au courant d’une façon ou d’une autre mais leur réaction fut on ne peut plus prévisible. J’étais déjà considéré comme infréquentable et que ma petite amie soit d’ascendance moldue était une preuve supplémentaire de ma traitrise envers mon propre sang. Ce balourd stupide de Mulciber, qui se destinait ouvertement à devenir Mangemort, me fit remarquer qu’il n’aimerait pas être à la place de ma mère, ce à quoi je lui répondis : « Moi non plus, c’est une vieille grenouille répugnante à l’esprit étroit. » Niak niak niak.

Antje ne me parlait pas beaucoup des remarques que lui firent les uns et les autres. « Ça n’est pas tellement différent de ce qu’ils disent d’habitude », éluda-t-elle un soir où nous étions tous les deux dans une classe vide. Cela dit, ce calme apparent ne dura pas. Deux semaines plus tard, je ne vis pas Antje au repas de midi. J’attendis que James ait le dos tourné pour m’enquérir de son absence auprès d’Evans qui n’en savait pas plus que moi, et il en allait de même pour les sœurs Smith. Je ne connaissais pas suffisamment les gens de sa promotion pour leur poser la moindre question et j’aurais préféré subir un Sortilège Impardonnable plutôt que de poser la moindre question à Kowalski qui s’esclaffait bêtement dans son coin avec ses copines. En jetant un coup d’œil autour de moi, je constatai que ça ricanait sec à la table des Serpentard. Au moment où je me demandais ce qui leur prenait, à cette bande de babouins décérébrés, je croisai le regard de mon frère. Curieusement, Regulus semblait absolument consterné. Je le vis se lever et l’instant d’après, il était à côté de moi. James le toisa en fronçant les sourcils :

« Qu’est-ce que tu fous là, toi ? » demanda-t-il en fronçant les sourcils. Mon cadet l’ignora superbement :

« Si tu cherches ta chérie, Sirius, elle est à l’infirmerie. »

Bien évidemment, la moutarde me monta au nez le temps de dire « Quidditch ».

« Qu’est-ce qui s’est passé ? demandai-je, prêt à secouer Regulus comme un prunier s’il refusait de me répondre.

— T’as qu’à lui demander. Tout ce que je peux te dire, c’est que certains de mes camarades ont un humour indigne de Sang-Purs. »

Il en avait dit suffisamment pour éviter de s’en prendre une. Je me levai et le bousculai en disant :

« Un petit conseil, frangin. Change de poteaux. »

Je quittai la Grande Salle et me rendis à l’infirmerie. Je n’avais pas fini mon repas mais tant pis. En traversant le hall, je passai devant les sabliers qui comptaient le nombre de points pour la coupe des Quatre Maisons et constatai que celui de Serpentard était un peu plus vide que la veille. Qu’est-ce que ces abrutis avaient encore fabriqué ?

oOØOo

En voyant Antje, je crus avoir opéré un voyage dans le temps et être revenu deux mois plus tôt. Malgré l’absence de marques de brûlures et de croûtes sur les mains, ses cheveux étaient à nouveau presque à ras. Dans le bureau de l’infirmière, j’entendais la voix de stentor du vieux Slughorn qui, de toute évidence, s’entretenait avec Madame Pomfresh. Je m’assis au pied du lit d’Antje et lui pris la main.

« Qu’est-ce qui s’est passé ? » demandai-je.

Elle poussa un soupir désabusé.

« Visiblement, dit-elle, c’est très rigolo de me faire perdre mes cheveux. Un type de Serpentard m’a jeté un sort pendant le cours de potion, tous mes cheveux sont tombés dans mon chaudron et il a fondu. Ça a failli provoquer une catastrophe. Le professeur Slughorn était très en colère, il a enlevé un tas de points à Serpentard et le type a eu une semaine de retenue. »

J’envisageai vaguement d’exiger le nom du coupable pour lui faire subir une petite vengeance de mon crû mais j’étais conscient qu’Antje n’aurait pas été d’accord, aussi je décidai de m’abstenir. Il existait certainement un autre moyen de l’identifier.

« Tu sais pourquoi il a fait ça ? me demanda-t-elle. Tu vas voir, c’est à pleurer de rire. Ils prétendent tous que visiblement, ça ne te dérange pas de sortir avec une Sang de Bourbe mais que peut-être qu’en voyant une Sang de Bourbe chauve, tu changerais peut-être d’avis.

— Bande de cons », grognai-je.

Je lui lâchai la main et l’attirai contre moi. C’était bizarre de ne plus sentir ses longs cheveux contre mon visage mais je n’en fis pas grand cas.

« Ça ne change rien, dis-je tout bas. Même si une troisième oreille avait poussé au sommet de ton crâne, je sortirais quand même avec toi. »

Elle s’écarta pour me regarder d’un air soupçonneux :

« T’es sûr ?

— Bon, peut-être pas, admis-je, mais tu vois ce que je veux dire. »

Elle sourit et me repoussa :

« Tu devrais aller en cours, dit-elle. Je serai sortie de l’infirmerie en fin d’après-midi. On se verra ce soir. »

Je la lâchai à regret et quittai l’infirmerie en pensant que les Serpentard ne perdaient rien pour attendre.

oOØOo

Au début du mois de février commença le deuxième épisode du roman-feuilleton sentimental de Poudlard. Après le bal de Noël venait la Saint-Valentin. Malgré ma relation avec Antje, je persistais à trouver ce truc stupide et, à ma grande satisfaction, elle partageait totalement mon avis :

« Je ne comprends pas que les sorciers aient adopté cette tradition moldue, me dit-elle un soir. En plus, c’est juste pour faire de l’argent. Comme si se faire des cadeaux ou aller au restaurant suffisait à prouver quoi que ce soit, non mais franchement… »

Sa mine consternée me fit sourire et, dans le même temps, je ne pus m’empêcher de penser à un truc que m’avait dit Lily Evans plusieurs mois auparavant, sur le fait que les filles disaient parfois le contraire de ce qu’elles pensaient. Ce raisonnement avait beau être foutrement tordu, je me pris à penser que, peut-être, Antje serait contente que je lui donne une carte ou un petit cadeau pour la Saint-Valentin. Seulement, je ne savais pas quoi lui offrir. Je lui avais déjà envoyé des chocolats pour Noël et en acheter d’autres risquerait de sembler redondant. Ce manque d’inspiration m’embêtait un peu…

… Du moins il m’embêta jusqu’à ce qu’Ornella Kowalski fasse à nouveau des siennes.

Peut-être aurions-nous dû nous méfier, Antje et moi, des regards insistants de cette idiote la veille au soir, alors que nous étions installés tous les deux dans le même fauteuil à regarder James et Remus jouer aux échecs. Toujours est-il que ce matin-là, elle avait la mine défaite au moment de me retrouver devant le dortoir des garçons. Kowalski avait fouillé dans sa valise et y avait volé des choses auxquelles Antje tenait beaucoup. Du courrier, un livre et un flacon de parfum.

« J’ai l’habitude de tout ranger dans un sac au fond de ma malle, dit-elle. Quand j’ai voulu prendre mon parfum ce matin, le sac était vide, à part ce truc. »

Elle me tendit un bout de parchemin sur lequel était écrit Puisque tu as pris ce qui se doit d’être à moi, à moi de me servir dans ce qui est à toi. C’est comme ça que fonctionne la justice.

« Elle a dû tout jeter, dit Antje. Qu’est-ce qu’elle pourrait faire d’un roman moldu et des lettres de mes parents ?

— Je suis désolé », répliquai-je sans savoir quoi dire d’autre.

Elle baissa la tête en reniflant. Je crus qu’elle allait se mettre à pleurer mais elle se contenta de pousser un soupir à fendre l’âme.

« Descendons déjeuner, dit-elle. Je ne dois pas lui laisser croire que ça m’atteint. »

Je la pris par les épaules et l’embrassai sur la joue, faisant fi des gens qui devaient nous observer. J’étais furieux contre Kowalski mais en même temps, j’étais très fier qu’Antje ne se laisse pas aller comme elle l’aurait fait deux mois auparavant. Pourtant, elle aurait eu de quoi.

oOØOo

Comme tous les matins, le courrier arriva à grand bruit à la table du petit déjeuner. Une chouette déposa devant Antje une boîte en carton de forme cubique. Elle l’ouvrit, les sourcils froncés, et y découvrit une petite bouteille remplie d’un liquide vert.

« C’est mon flacon de parfum, dit-elle. Mais il n’y a pas de parfum dedans. Je ne sais pas ce que c’est que ce truc. »

J’expliquai rapidement ce qui était arrivé aux affaires d’Antje à James, Remus et Peter qui n’étaient toujours pas au courant et, du coin de l’œil, je vis Kowalski se lever pour murmurer quelque chose à l’oreille de mon amie qui la repoussa d’un geste brusque. Elle se leva et se rendit à la table des professeurs avec son flacon de parfum.

« Cafteuse », grogna Kowalski.

J’eus bien envie de la saisir par les cheveux et de lui enfoncer la figure dans le bol de porridge le plus proche mais, avant que j’aie pu faire un geste, Antje revint accompagnée de McGonagall.

« Miss Kowalski, suivez-moi dans mon bureau, dit-elle froidement. Je souhaiterais avoir un petit entretien avec vous. »

Tout d’un coup, Kowalski eut l’air beaucoup moins bravache. Elle se leva et suivit notre directrice de maison, la tête basse. Antje s’assit à côté de moi et se servit un peu de café.

« Je ne comptais pas la dénoncer, dit-elle. Je suis juste allée voir le professeur Slughorn pour lui demander ce qu’il y avait dans le flacon. C’est de l’Empestine, il paraît que ça pue et que ça donne des furoncles. Le professeur McGonagall a tout entendu et elle a voulu savoir ce qui s’était passé. »

J’imaginais aisément la scène. Quand l’enseignante en métamorphose posait ce genre de question, il était quasiment impossible d’éluder ou de mentir. Après tout, c’était peut-être mieux comme ça. Peut-être qu’après un bon savon, Kowalski allait se calmer.

J’avisai le flacon de parfum. Il était bon pour la poubelle à présent. Peter tendit la main et se saisit de la petite bouteille :

« C’est le même parfum que ma mère, dit-il à voix basse. Curieux, il ne sent pas pareil sur Antje. Je ne l’aurais jamais reconnu. »

L’idée commença alors à se former dans mon esprit. Si la mère de Peter portait ce parfum, il venait forcément du monde sorcier. À ce que je sache, Mrs. Pettigrow ne s’aventurait jamais dans le monde moldu car elle n’y était pas à l’aise. Les origines d’Antje faisaient qu’elle aurait très bien pu acheter ses produits de beauté chez les Moldus et un parfum qui s’appelait « Fleurs du matin » aurait pu venir de n’importe où. À présent, il me faudrait trouver un moyen d’acheter ce truc d’ici la Saint-Valentin, quitte à me rendre à Pré-au-Lard par un passage secret le week-end suivant.

oOØOo

Le soir venu, tandis que je me trouvais dans un coin de la salle commune avec mes copains et Antje, Kowalski se planta devant nous, un paquet de lettres à la main.

« Tiens, je te les rends, dit-elle. Par contre, ton bouquin, je l’ai jeté. J’ai promis à McGonagall de m’excuser et de te laisser tranquille. »

Antje récupéra son courrier et le fourra dans son sac. Elle regarda Kowalski d’un air froid.

« Je n’accepte pas tes excuses parce que tu n’en penses pas un mot. »

À dire vrai, je ne croyais pas non plus en la sincérité de cette idiote. Tandis qu’elle se détournait, le nez en l’air, j’aperçus l’exemplaire de Sorcière hebdo qu’elle avait sous le bras et une idée me vint.

« Hé, Kowalski ! File-moi ton canard. »

Elle me jeta un coup d’œil surpris et sembla hésiter.

« Vas-y, donne, insistai-je. Et vas lire un vrai livre, ça te rendra peut-être plus intelligente. »

C’était salaud, j’en avais bien conscience, mais elle ne l’avait pas volé. Au bord des larmes — à croire que je l’avais vexée — Kowalski me tendit son journal.

Il y avait probablement des bons de commande pour du parfum, là-dedans.

Antje me regarda avec étonnement :

« Pourquoi tu as fait ça ? demanda-t-elle.

— Pour l’emmerder », répondis-je brièvement.

Je n’allais certainement pas lui dire la vérité, ça n’aurait plus été une surprise.

Bonne lecture à tous ! Petite précision à noter, le prochain chapitre sera disponible seulement dans 15 jours.

Chapitre 15

Heart of glass

Antje, très pâle, regardait le couloir par lequel Kowalski venait de disparaître. Elle se tordit les mains avec nervosité :

« Merde, merde, merde », marmonna-t-elle.

En temps normal, elle se montrait rarement grossière. J’aurais pu trouver ça drôle si son expression ne m’avait pas un peu inquiété. Je voulus lui enlacer les épaules mais elle s’écarta brusquement.

« Calme-toi, dis-je.

— Me calmer ? s’écria Antje d’une voix aiguë. Kowalski nous a vus, Sirius. Toute l’école sera au courant avant ce soir !

— Et alors ?

— Et alors, je n’ai pas envie que ça se sache ! Surtout elle et ses saletés de copines ! »

Il me fallait admettre que je partageais en partie son point de vue : moi non plus, je n’avais pas très envie que tout le monde soit au courant mais pas pour les mêmes raisons. Antje craignait les réactions des gens. À titre personnel, je m’en battais l’œil avec une patte d’hippogriffe mais il s’agissait de mes affaires privées. Seulement, les histoires de couples passionnaient une bonne partie des élèves qui n’avaient rien d’autre à faire de leurs journées que de se préoccuper de qui sortait avec qui. Être l’objet de l’attention générale pour une raison pareille n’était pas dans mes projets mais Kowalski étant ce qu’elle était, je devrais faire avec, du moins jusqu’à ce que je me lasse des regards en coin et autres ricanements auxquels il nous serait difficile d’échapper.

Je repris Antje par les épaules et la serrai suffisamment fort pour la dissuader de me repousser.

« Retournons dans la salle commune », dis-je.

Elle ne répondit pas mais je savais très bien qu’elle gambergeait.

Nous traversâmes l’école en silence. Plus nous avancions dans les couloirs, plus je sentais Antje se tendre à mes côtés. Je lui aurais volontiers fait remarquer que Kowalski ne répandrait pas son venin en cinq minutes mais elle ne m’aurait pas cru. À ce compte-là, autant économiser sa salive.

oOØOo

Je repérai rapidement James et Peter qui jouaient à la bataille explosive dans un coin. Je traînai Antje à ma suite et ne la lâchai que pour la laisser s’écrouler dans un fauteuil. Mon meilleur ami leva un œil de son jeu :

« Vous revoilà, dit-il. Qu’est-ce que vous avez fabriqué à la bibliothèque ? »

Antje, qui regardait autour d’elle avec nervosité comme si elle s’attendait à ce que tout le monde la montre du doigt, tourna la tête vers James et se frappa le front du plat de la main :

« Oh bon sang, grogna-t-elle.

— Qu’est-ce qui se passe ? », demanda mon pote en plissant les yeux derrière ses lunettes.

Je ne dis rien et préférai la laisser expliquer ce qui s’était passé. Elle baissa les yeux, les sourcils froncés, comme si les plis de sa robe la fascinaient.

« Je suis une idiote, dit-elle tout bas.

— Je ne suis pas d’accord, objecta James, mais j’aimerais bien que tu m’expliques ce qui te fait penser une chose pareille. »

Elle leva la tête et le regarda bien en face :

« J’ai compris ce qui arrive à Remus. Je sais pourquoi il ne va pas en cours un ou deux jours par mois. Ça m’a pris un peu de temps mais… enfin bon, je voulais vérifier un truc à la blibliothèque et Sirius est venu me chercher. Quand on est sortis… Kowalski nous a surpris. J’ai…

— Attends, interrompit Peter, elle vous a entendu parler de Remus ?

— Non, répondit Antje très vite. On n’allait pas discuter de ça dans les couloirs. Seulement, elle… enfin… »

Incapable de terminer sa phrase, elle baissa à nouveau les yeux. James eut un sourire de travers :

« Elle vous a vus en train de vous bécoter, c’est ça ?

— Pas exactement, intervins-je. Je lui faisais un câlin, c’est tout. Elle a dit un truc comme quoi c’était « dégueulasse », ce qui est un peu se foutre du monde vu la façon dont Hopkins se donne en spectacle, et puis elle est partie. »

À mes côtés, Antje serra les plis de sa robe entre ses doigts.

« J’ai paniqué à l’idée qu’elle le répète à tout le monde mais même si elle le fait, ce sera toujours moins grave que ce qui arrive à Remus. Je suis vraiment stupide. Je fais toute une histoire de pas grand chose, finalement. »

James secoua la tête.

« Tes problèmes ne peuvent pas être comparés avec ceux de Remus, dit-il, parce qu’ils ne sont pas du même ordre. Certes, il a un petit souci poilu remarquablement ennuyeux mais on s’occupe bien de lui. Dumbledore lui a permis de faire ses études normalement, ce qu’il aurait très bien pu refuser. Tout le monde fait ce qu’il peut et nous, ses amis, on est restés avec lui même après avoir compris. Toi, tu viens de chez les Moldus, on te le reproche tout le temps, Kowalski et les autres sont incapables de comprendre que la valeur d’une personne va au-delà de la popularité ou d’un tour de taille minuscule, donc c’est normal que tu aies peur. Tu n’as pas à te le reprocher ni à te traiter d’idiote. De toute façon, si tu étais une idiote, je ne serais pas en train de te parler parce que j’ai horreur des crétins. »

Mon meilleur ami, qui semblait surpris de sa propre tirade, se gratta l’arrière de la tête, ce qui eut pour effet d’ébouriffer encore plus sa tignasse si c’était possible. Antje sourit. Peter ramassa son sac posé au pied de son fauteuil et fouina dedans pour en sortir un Chocogrenouille un rien écrabouillé.

« Tiens, dit-il en tendant la confiserie à Antje. Mange ce choco. Remus dit toujours que ça fait du bien quand on n’a pas le moral. »

Le batracien chocolaté était en triste état, aussi il se contenta de ramper sur la table au lieu de sauter quand Antje ouvrit le paquet. De toute façon, bondissant ou pas, son destin était d’être mangé, aussi il ne fit pas long feu.

oOØOo

Si Kowalski s’était attendue à provoquer un petit scandale et révélant à qui de droit (selon elle) ma relation avec Antje, elle fut probablement déçue. Hopkins elle-même ne fit pas grand cas de l’anecdote : elle se contenta de venir me trouver un matin avant le cours de potions pour me dire que je n’avais aucun goût en matière de filles et qu’à partir de là, elle ne me considérait plus comme une fréquentation potentielle. Je me contentai de lui répondre avec un sourire hypocrite que c’était tant mieux et que ça me ferait des vacances. Ses copines passaient devant moi le nez en l’air dans une attitude qu’elles pensaient méprisante mais qui en fait relevait du plus parfait ridicule. D’après ce que j’appris par la suite, Hopkins leur avait dit qu’à partir du moment où elle avait cessé de s’intéresser à ma personne, elles avaient l’ordre de faire de même. Ces suiveuses sans cervelle s’étaient donc empressées de lui obéir, à l’exception de Kowalski elle-même qui prenait un air mauvais à chaque fois qu’Antje se trouvait dans son champ de vision.

Bien entendu, les Serpentard furent mis au courant d’une façon ou d’une autre mais leur réaction fut on ne peut plus prévisible. J’étais déjà considéré comme infréquentable et que ma petite amie soit d’ascendance moldue était une preuve supplémentaire de ma traitrise envers mon propre sang. Ce balourd stupide de Mulciber, qui se destinait ouvertement à devenir Mangemort, me fit remarquer qu’il n’aimerait pas être à la place de ma mère, ce à quoi je lui répondis : « Moi non plus, c’est une vieille grenouille répugnante à l’esprit étroit. » Niak niak niak.

Antje ne me parlait pas beaucoup des remarques que lui firent les uns et les autres. « Ça n’est pas tellement différent de ce qu’ils disent d’habitude », éluda-t-elle un soir où nous étions tous les deux dans une classe vide. Cela dit, ce calme apparent ne dura pas. Deux semaines plus tard, je ne vis pas Antje au repas de midi. J’attendis que James ait le dos tourné pour m’enquérir de son absence auprès d’Evans qui n’en savait pas plus que moi, et il en allait de même pour les sœurs Smith. Je ne connaissais pas suffisamment les gens de sa promotion pour leur poser la moindre question et j’aurais préféré subir un Sortilège Impardonnable plutôt que de poser la moindre question à Kowalski qui s’esclaffait bêtement dans son coin avec ses copines. En jetant un coup d’œil autour de moi, je constatai que ça ricanait sec à la table des Serpentard. Au moment où je me demandais ce qui leur prenait, à cette bande de babouins décérébrés, je croisai le regard de mon frère. Curieusement, Regulus semblait absolument consterné. Je le vis se lever et l’instant d’après, il était à côté de moi. James le toisa en fronçant les sourcils :

« Qu’est-ce que tu fous là, toi ? » demanda-t-il en fronçant les sourcils. Mon cadet l’ignora superbement :

« Si tu cherches ta chérie, Sirius, elle est à l’infirmerie. »

Bien évidemment, la moutarde me monta au nez le temps de dire « Quidditch ».

« Qu’est-ce qui s’est passé ? demandai-je, prêt à secouer Regulus comme un prunier s’il refusait de me répondre.

— T’as qu’à lui demander. Tout ce que je peux te dire, c’est que certains de mes camarades ont un humour indigne de Sang-Purs. »

Il en avait dit suffisamment pour éviter de s’en prendre une. Je me levai et le bousculai en disant :

« Un petit conseil, frangin. Change de poteaux. »

Je quittai la Grande Salle et me rendis à l’infirmerie. Je n’avais pas fini mon repas mais tant pis. En traversant le hall, je passai devant les sabliers qui comptaient le nombre de points pour la coupe des Quatre Maisons et constatai que celui de Serpentard était un peu plus vide que la veille. Qu’est-ce que ces abrutis avaient encore fabriqué ?

oOØOo

En voyant Antje, je crus avoir opéré un voyage dans le temps et être revenu deux mois plus tôt. Malgré l’absence de marques de brûlures et de croûtes sur les mains, ses cheveux étaient à nouveau presque à ras. Dans le bureau de l’infirmière, j’entendais la voix de stentor du vieux Slughorn qui, de toute évidence, s’entretenait avec Madame Pomfresh. Je m’assis au pied du lit d’Antje et lui pris la main.

« Qu’est-ce qui s’est passé ? » demandai-je.

Elle poussa un soupir désabusé.

« Visiblement, dit-elle, c’est très rigolo de me faire perdre mes cheveux. Un type de Serpentard m’a jeté un sort pendant le cours de potion, tous mes cheveux sont tombés dans mon chaudron et il a fondu. Ça a failli provoquer une catastrophe. Le professeur Slughorn était très en colère, il a enlevé un tas de points à Serpentard et le type a eu une semaine de retenue. »

J’envisageai vaguement d’exiger le nom du coupable pour lui faire subir une petite vengeance de mon crû mais j’étais conscient qu’Antje n’aurait pas été d’accord, aussi je décidai de m’abstenir. Il existait certainement un autre moyen de l’identifier.

« Tu sais pourquoi il a fait ça ? me demanda-t-elle. Tu vas voir, c’est à pleurer de rire. Ils prétendent tous que visiblement, ça ne te dérange pas de sortir avec une Sang de Bourbe mais que peut-être qu’en voyant une Sang de Bourbe chauve, tu changerais peut-être d’avis.

— Bande de cons », grognai-je.

Je lui lâchai la main et l’attirai contre moi. C’était bizarre de ne plus sentir ses longs cheveux contre mon visage mais je n’en fis pas grand cas.

« Ça ne change rien, dis-je tout bas. Même si une troisième oreille avait poussé au sommet de ton crâne, je sortirais quand même avec toi. »

Elle s’écarta pour me regarder d’un air soupçonneux :

« T’es sûr ?

— Bon, peut-être pas, admis-je, mais tu vois ce que je veux dire. »

Elle sourit et me repoussa :

« Tu devrais aller en cours, dit-elle. Je serai sortie de l’infirmerie en fin d’après-midi. On se verra ce soir. »

Je la lâchai à regret et quittai l’infirmerie en pensant que les Serpentard ne perdaient rien pour attendre.

oOØOo

Au début du mois de février commença le deuxième épisode du roman-feuilleton sentimental de Poudlard. Après le bal de Noël venait la Saint-Valentin. Malgré ma relation avec Antje, je persistais à trouver ce truc stupide et, à ma grande satisfaction, elle partageait totalement mon avis :

« Je ne comprends pas que les sorciers aient adopté cette tradition moldue, me dit-elle un soir. En plus, c’est juste pour faire de l’argent. Comme si se faire des cadeaux ou aller au restaurant suffisait à prouver quoi que ce soit, non mais franchement… »

Sa mine consternée me fit sourire et, dans le même temps, je ne pus m’empêcher de penser à un truc que m’avait dit Lily Evans plusieurs mois auparavant, sur le fait que les filles disaient parfois le contraire de ce qu’elles pensaient. Ce raisonnement avait beau être foutrement tordu, je me pris à penser que, peut-être, Antje serait contente que je lui donne une carte ou un petit cadeau pour la Saint-Valentin. Seulement, je ne savais pas quoi lui offrir. Je lui avais déjà envoyé des chocolats pour Noël et en acheter d’autres risquerait de sembler redondant. Ce manque d’inspiration m’embêtait un peu…

… Du moins il m’embêta jusqu’à ce qu’Ornella Kowalski fasse à nouveau des siennes.

Peut-être aurions-nous dû nous méfier, Antje et moi, des regards insistants de cette idiote la veille au soir, alors que nous étions installés tous les deux dans le même fauteuil à regarder James et Remus jouer aux échecs. Toujours est-il que ce matin-là, elle avait la mine défaite au moment de me retrouver devant le dortoir des garçons. Kowalski avait fouillé dans sa valise et y avait volé des choses auxquelles Antje tenait beaucoup. Du courrier, un livre et un flacon de parfum.

« J’ai l’habitude de tout ranger dans un sac au fond de ma malle, dit-elle. Quand j’ai voulu prendre mon parfum ce matin, le sac était vide, à part ce truc. »

Elle me tendit un bout de parchemin sur lequel était écrit Puisque tu as pris ce qui se doit d’être à moi, à moi de me servir dans ce qui est à toi. C’est comme ça que fonctionne la justice.

« Elle a dû tout jeter, dit Antje. Qu’est-ce qu’elle pourrait faire d’un roman moldu et des lettres de mes parents ?

— Je suis désolé », répliquai-je sans savoir quoi dire d’autre.

Elle baissa la tête en reniflant. Je crus qu’elle allait se mettre à pleurer mais elle se contenta de pousser un soupir à fendre l’âme.

« Descendons déjeuner, dit-elle. Je ne dois pas lui laisser croire que ça m’atteint. »

Je la pris par les épaules et l’embrassai sur la joue, faisant fi des gens qui devaient nous observer. J’étais furieux contre Kowalski mais en même temps, j’étais très fier qu’Antje ne se laisse pas aller comme elle l’aurait fait deux mois auparavant. Pourtant, elle aurait eu de quoi.

oOØOo

Comme tous les matins, le courrier arriva à grand bruit à la table du petit déjeuner. Une chouette déposa devant Antje une boîte en carton de forme cubique. Elle l’ouvrit, les sourcils froncés, et y découvrit une petite bouteille remplie d’un liquide vert.

« C’est mon flacon de parfum, dit-elle. Mais il n’y a pas de parfum dedans. Je ne sais pas ce que c’est que ce truc. »

J’expliquai rapidement ce qui était arrivé aux affaires d’Antje à James, Remus et Peter qui n’étaient toujours pas au courant et, du coin de l’œil, je vis Kowalski se lever pour murmurer quelque chose à l’oreille de mon amie qui la repoussa d’un geste brusque. Elle se leva et se rendit à la table des professeurs avec son flacon de parfum.

« Cafteuse », grogna Kowalski.

J’eus bien envie de la saisir par les cheveux et de lui enfoncer la figure dans le bol de porridge le plus proche mais, avant que j’aie pu faire un geste, Antje revint accompagnée de McGonagall.

« Miss Kowalski, suivez-moi dans mon bureau, dit-elle froidement. Je souhaiterais avoir un petit entretien avec vous. »

Tout d’un coup, Kowalski eut l’air beaucoup moins bravache. Elle se leva et suivit notre directrice de maison, la tête basse. Antje s’assit à côté de moi et se servit un peu de café.

« Je ne comptais pas la dénoncer, dit-elle. Je suis juste allée voir le professeur Slughorn pour lui demander ce qu’il y avait dans le flacon. C’est de l’Empestine, il paraît que ça pue et que ça donne des furoncles. Le professeur McGonagall a tout entendu et elle a voulu savoir ce qui s’était passé. »

J’imaginais aisément la scène. Quand l’enseignante en métamorphose posait ce genre de question, il était quasiment impossible d’éluder ou de mentir. Après tout, c’était peut-être mieux comme ça. Peut-être qu’après un bon savon, Kowalski allait se calmer.

J’avisai le flacon de parfum. Il était bon pour la poubelle à présent. Peter tendit la main et se saisit de la petite bouteille :

« C’est le même parfum que ma mère, dit-il à voix basse. Curieux, il ne sent pas pareil sur Antje. Je ne l’aurais jamais reconnu. »

L’idée commença alors à se former dans mon esprit. Si la mère de Peter portait ce parfum, il venait forcément du monde sorcier. À ce que je sache, Mrs. Pettigrow ne s’aventurait jamais dans le monde moldu car elle n’y était pas à l’aise. Les origines d’Antje faisaient qu’elle aurait très bien pu acheter ses produits de beauté chez les Moldus et un parfum qui s’appelait « Fleurs du matin » aurait pu venir de n’importe où. À présent, il me faudrait trouver un moyen d’acheter ce truc d’ici la Saint-Valentin, quitte à me rendre à Pré-au-Lard par un passage secret le week-end suivant.

oOØOo

Le soir venu, tandis que je me trouvais dans un coin de la salle commune avec mes copains et Antje, Kowalski se planta devant nous, un paquet de lettres à la main.

« Tiens, je te les rends, dit-elle. Par contre, ton bouquin, je l’ai jeté. J’ai promis à McGonagall de m’excuser et de te laisser tranquille. »

Antje récupéra son courrier et le fourra dans son sac. Elle regarda Kowalski d’un air froid.

« Je n’accepte pas tes excuses parce que tu n’en penses pas un mot. »

À dire vrai, je ne croyais pas non plus en la sincérité de cette idiote. Tandis qu’elle se détournait, le nez en l’air, j’aperçus l’exemplaire de Sorcière hebdo qu’elle avait sous le bras et une idée me vint.

« Hé, Kowalski ! File-moi ton canard. »

Elle me jeta un coup d’œil surpris et sembla hésiter.

« Vas-y, donne, insistai-je. Et vas lire un vrai livre, ça te rendra peut-être plus intelligente. »

C’était salaud, j’en avais bien conscience, mais elle ne l’avait pas volé. Au bord des larmes — à croire que je l’avais vexée — Kowalski me tendit son journal.

Il y avait probablement des bons de commande pour du parfum, là-dedans.

Antje me regarda avec étonnement :

« Pourquoi tu as fait ça ? demanda-t-elle.

— Pour l’emmerder », répondis-je brièvement.

Je n’allais certainement pas lui dire la vérité, ça n’aurait plus été une surprise.