[fanfiction Harry Potter] Antje #18

Par Artemissia Gold @SongeD1NuitDete

  Un chapitre fourre-tout et posté en retard… bonne lecture

Chapitre 18

Smoke on the water

Antje quitta l’infirmerie à la fin du week-end. Son attitude dans les jours qui suivirent força le respect : elle parvenait à faire comme si tout était normal. « Je ne veux pas que les autres sachent ce qui s’est passé, m’expliqua-t-elle à son retour. Ça ne les regarde pas et puis je n’ai pas envie de me faire remarquer. » Ses arguments se tenaient mais j’admirais tout de même son courage. J’étais le premier à tirer une tête de cent pieds de long quand j’avais un problème — après l’incident de la Cabane hurlante, j’étais certainement passé pour un épouvantable rabat-joie — et, ne serait-ce que six mois auparavant, Antje n’aurait jamais caché ses larmes. À présent, elle les réservait à son oreiller, la nuit, quand les autres filles dormaient.

Il lui fallut du temps cependant pour parler librement de ce qui s’était passé. Même avec moi, Antje faisait comme si de rien n’était. Elle semblait juste un peu absente, parfois. Son père lui envoya une lettre quelques jours après qu’elle ait quitté l’infirmerie pour lui dire qu’il ne voulait pas qu’elle aille à l’enterrement. À mon grand étonnement, elle accepta la chose avec un haussement d’épaule. « C’est avant qu’elle meure que j’aurais voulu lui dire au revoir, affirma-t-elle. Maintenant, c’est juste une épreuve de plus. » Je n’étais pas sûr de comprendre ce qu’elle voulait dire mais je n’étais sans doute pas très bien placé pour ça.

La vie reprit donc son cours, même si elle avait un arrière-goût un peu bizarre. Comme me l’avait promis McGonagall, ma punition avait été allégée. Certes, je faisais toujours mes devoirs sous la surveillance d’un prof après les cours mais mes soirées et une partie de mes week-ends étaient libres. Il s’agissait, cela dit, que je file droit. Au début, je pris au sérieux les avertissements de ma directrice de maison et dus me retenir de faire des mauvais coups. Puis, un soir, l’idée survint.

Nous nous trouvions tous les quatre dans la salle commune, quelques jours avant la pleine lune de mai. Je m’ennuyais à pleurer. Les quatre murs de la salle commune m’oppressaient. J’avais envie de sortir mais je connaissais le risque. James, Remus, Peter et moi avions pas mal grandi ces derniers mois et, à présent, il nous était impossible de nous cacher à quatre sous la cape d’invisibilité sans qu’on puisse voir nos pieds. Nous commençâmes donc à réfléchir à un moyen de nous promener dans l’école en toute sécurité et progressivement nous vint l’idée de fabriquer de nos propres mains un plan clandestin de l’école et du parc sur lequel nous pourrions surveiller les allées et venues des uns et des autres. Remus avait trouvé un sortilège dans un bouquin de la bibliothèque qui nous permettrait d’y parvenir. Il nous faudrait un peu de temps pour le maîtriser mais il s’agirait de la dernière étape. Il nous fallait d’abord dessiner la carte et le reste viendrait plus tard.

Cette idée nous plongea dans l’euphorie. D’abord, si nous arrivions à tout faire comme nous le voulions, un bel avenir peuplé de mauvais coups et autres incartades au règlement s’ouvrirait devant nous jusqu’à la fin de nos études. Ensuite, ça nous permettrait de nous occuper de façon constructive et amusante sans quitter la tour de Gryffondor et de tromper l’ennui. Nous décidâmes donc de mettre ce plan à exécution juste après la plein lune.

Cette fois-ci, d’ailleurs, je préférai ne pas accompagner les copains. Je n’avais pas très envie de l’admettre mais retourner à l’endroit où j’avais failli provoquer une catastrophe me mettait mal à l’aise. Certes, j’étais toujours persuadé que c’était la faute de Rogue mais… il me fallait quand même avouer que j’étais un tout petit peu responsable. James, Remus et Peter ne firent aucun commentaire sur ma décision et je leur assurai qu’ils pourraient compter sur moi le mois suivant. À l’approche des BUSE, il me faudrait prendre l’air et je ne penserais certainement plus à ce qui s’était passé.

oOØOo

À la fin du mois de mai, je fus convoqué dans le bureau de McGonagall au même titre que mes camarades de cinquième année pour l’inévitable « conseil d’orientation » qui précédait les BUSE. N’ayant aucune idée de ce que je voulais faire de ma vie, j’avais passé le week-end à éplucher les documents mis à notre disposition dans la salle commune sans y trouver le plan de carrière de ma vie. J’imaginais que mes parents souhaitaient me voir faire carrière au ministère dans un secteur aussi chiant que le Département de la Justice magique ou un truc comme ça, mais il était hors de question que je perde mon temps à moisir derrière un bureau. La famille Black vivant sur des tas d’or depuis des générations, mon père n’avait jamais travaillé de sa vie. Il s’était juste acheté un Ordre de Merlin à l’aide d’un gros backchich juteux. Ma mère, elle s’était contentée de nous élever, mon frère et moi. Bref, même si j’en avais eu la moindre envie, j’aurais difficilement pu suivre l’exemple parental, d’autant qu’ils ne me coucheraient certainement pas sur leur testament. Regulus, le « fils prodigue », hériterait de tout alors que je n’étais qu’un bon à rien.

Je n’en menais donc pas large devant ma directrice de maison qui m’observait d’un air aigu derrière la montagne de prospectus qui encombraient son bureau. Je m’installai sur ma vieille copine la chaise tendue de tissu écossais et attendis que McGonagall prenne la parole.

« Avez-vous déjà réfléchi à ce que vous souhaiteriez faire après avoir quitté Poudlard ? » me demanda-t-elle.

Je laissai passer un silence avant de répondre.

« Oui, j’y ai réfléchi, finis-je par dire, mais je n’en ai aucune idée. »

L’enseignante en métamorphose soupira et se mit à feuilleter mon dossier scolaire qu’elle avait devant elle.

« Dans l’ensemble, affirma-t-elle, vos résultats sont excellents. Vous pourriez envisager n’importe quelle carrière si vous n’étiez pas aussi turbulent et si vous réfléchissiez un peu plus aux conséquences de vos actes. »

Je ne me donnai pas la peine de prendre acte de cette remarque : c’était on ne peut plus prévisible.

« Je ne veux pas travailler dans un bureau, dis-je, histoire de couper court à la leçon de morale.

— Ça ne me surprend pas, répliqua McGonagall. Dans ce cas, cela réduit un peu vos choix. Vous étudiez l’arithmancie, n’est-ce pas ?

— Oui.

— Dans ce cas, peut-être pourriez-vous envisager un emploi chez Gringotts, ils envoient souvent des gens à l’étranger. Il faudra juste que vous appreniez à faire preuve de prudence. »

Je notai l’idée, qui n’était pas mauvaise, dans un coin de ma tête et ajoutai :

« J’aime bien les créatures magiques.

— Il existe des perspectives d’emploi dans ce secteur, dit ma directrices de maison en me tendant un document, mais là encore, il s’agit de ne pas faire n’importe quoi. »

L’entretien dura encore un moment et je rejoignis mes camarades après un énième sermon sur la maturité et la pespective de ne plus avoir cours d’histoire de la magie en sixième année. Après tout, c’était déjà ça.

J’avais cela dit l’esprit un peu embrouillé. Au repas de midi, je vis Antje plongée dans un dépliant de l’hôpital Sainte-Mangouste qu’elle avait récupéré dans la salle commune. De toute évidence, même si elle n’aurait pas à faire son choix de carrière avant l’année suivante, elle était intéressée par un avenir de guérisseuse. Je me pris à me demander si nous serions encore ensemble à la fin de nos études et ce qui se passerait à ce moment-là… même si une chose était sûre : les gens que j’aimais passeraient avant tout le reste, carrière ou non.

oOØOo

Les semaines suivantes furent presque uniquement consacrées aux révisions. James et moi estimions ne pas en avoir besoin mais Remus et Peter, eux, y tenaient. Leurs conseils d’orientation s’étaient avérés un peu compliqués : les résultats scolaires de Peter étaient juste passables et lui laissaient peu de perspectives à moins qu’il travaille très dur et fasse d’énormes progrès et quant à Remus, même McGonagall dut admettre qu’il lui serait difficile de trouver un travail où on le laisse s’absenter deux jours par mois sans que ça finisse par sembler suspect. Elle lui annonça toutefois qu’un nouveau protocole de recherche était en cours à l’hôpital Sainte-Mangouste visant à limiter les effets de la lycanthropie. Il était donc permis d’avoir de l’espoir.

Les Brevets Élémentaires de Sorcellerie Universelle se déroulaient en deux temps : chaque jour était consacré à une matière. L’examen écrit avait lieu le matin tandis que l’après-midi était consacrée aux épreuves pratiques. Après avoir potassé contre mon gré pendant un mois et compte tenu de mes résultats, j’étais parfaitement serein. J’avais cela dit de la peine pour Remus qui, en plus de son stress et de sa fatigue, devait gérer les autres élèves qui trafiquaient dans leur coin des potions de mémoire frauduleuses et autres trucs inutiles garantissant la réussite aux examens tout en étant totalement bidon. Il se fâcha même tout rouge après le chéri de Britta Hopkins qui tentait de persuader cette dernière de garder un oignon moisi dans sa poche au moment des épreuves. Ce fut d’ailleurs une scène assez amusante, jusqu’à ce que Remus ne menace de passer sa mauvaise humeur sur nous.

oOØOo

Dans l’ensemble, les examens se passèrent sans problème. J’en arrivais même à me demander pourquoi on faisait un tel cirque à propos des BUSE. Qu’y avait-il de différent avec les autres épreuves que nous devions passer depuis la première année ? Dans tous les cas, je sortis de chaque épreuve assez content de moi et j’étais quasiment certain d’obtenir un gros tas de mentions « Optimal », sauf peut-être en histoire de la magie parce que j’avais certainement confondu des noms de clans de trolls pour ne pas changer.

Un petit événement, cela dit, perturba quelque peu le déroulement des examens. Nous venions de terminer notre écrit en Défense contre les forces du Mal. Les questions, d’une simplicité enfantine, avaient en grande partie été consacrées aux créatures dangereuses que nous avions étudiées toute l’année. Il nous fallut même évoquer les signes distinctifs du loup-garou, ce qui nous fit bien rire à l’exception de Peter qui était tellement stressé qu’il prenait tout au pied de la lettre. Il faisait un temps magnifique et nous profitâmes d’avoir un peu de temps avant le repas de midi pour flâner un peu dans le parc. Tandis que James jouait avec un Vif d’Or qu’il avait chipé Merlin savait où sous le regard (un peu trop) admiratif de Peter et que Remus révisait, je bayais aux corneilles. Antje était encore en cours, à cette heure-ci. Ses examens devaient avoir lieu plus tard. J’aurais bien voulu qu’elle soit là. J’aurais également bien voulu qu’on soit en période de pleine lune, histoire de faire des projets de promenades nocturnes sous nos formes d’animaux. En un mot comme en cent, je m’ennuyais… jusqu’à ce que survienne Rogue.

Je l’avais laissé tranquille depuis l’incident de la Cabane hurlante. Une fois n’étant pas coutume, j’avais obéi aux profs qui m’avaient spécifié l’interdiction de l’approcher. Je regardai avec amusement James jeter quelques maléfices au cafard graisseux en ajoutant de temps en temps quelques commentaires sur son gros pif et ses cheveux gras. C’était peut-être un peu gratuit mais ça trompait l’ennui de manière infiniment plaisante. Quoi de plus rigolo que de voir ce minable se débattre et subir des sarcasmes ? Pas grand-chose, si vous voulez mon avis. Il essaya bien de se défendre en mélangeant de façon ridicule formules magiques et gros mots mais James lui jeta un sort de nettoyage qui lui fit cracher du savon. À ce moment-là, Lily Evans surgit pour défendre son copinou.

« Laissez-le TRANQUILLE », glapit-elle.

Trop content d’avoir une occasion de parler à sa préfète chérie, James essaya de faire de l’humour, sans succès. Il lui proposa ensuite de fiche la paix à Rogue en échange d’un rendez-vous avec elle, ce qui se solda par un échec. Malheureusement, Servilus profita de l’échange pour se libérer des sortilèges de mon meilleur ami et pour lui jeter un maléfice de son cru, une saloperie appelée Sectusempra et qui provoquait des plaies. J’étais quasiment sûr qu’on pouvait commettre un meurtre avec ça. Furieux, James pointa à nouveau sa baguette sur Rogue et le fit léviter, la tête en bas. Il était tellement ridicule, avec ses jambes squelettiques qui dépassaient de son calcif douteux que j’oubliais momentanément qu’Antje, jadis, avait elle aussi été victime de ce maléfice et des moqueries qui en découlaient. Evans intervint à nouveau et James fut bien obligé de libérer le cafard.

« Tu as de la chance qu’Evans ait été là, Servilus », dit James.

La réponse de l’intéressé mit un sacré froid dans l’atmosphère :

« Je n’ai pas besoin de l’aide d’une sale petite Sang-de-Bourbe comme elle ! », glapit-il.

J’en restai quasiment bouche-bée. Tout ce temps à lui lécher les bottes et à lui tourner autour pour finir par lui jeter au visage l’insulte la plus infâmante de notre monde ? Quel imbécile ! Dans tous les cas, Evans prit acte de l’injure en question :

« Très bien, je ne m’en mêlerai plus, à l’avenir. Et si j’étais toi, je laverais mon caleçon, Servilus. »

James voulut forcer Rogue à s’excuser. Evans se fâcha et traita mon meilleur ami de prétentieux. Elle n’avait peut-être pas tout à fait tort mais je ne pus m’empêcher de la trouver injuste. Après une dernière injure, elle nous planta là et alla rejoindre ses copines un peu plus loin.

Je n’aurais su dire si James était furieux ou malheureux. Dans tous les cas, son intention semblait bel et bien de passer ses nerfs sur Rogue. Après l’avoir à nouveau fait léviter la tête en bas, il claironna :

« Qui veut me voir enlever le caleçon de Servilus ? »

Il avait déjà attrapé l’élastique du sous-vêtement et s’apprêtait à tirer dessus quand…

« Finite Incantatem. »

Rogue s’écroula par terre. James eut un mouvement de recul et je me retournai. C’était Antje. Elle pointait sa baguette magique droit devant elle et nous regardait d’un air furieux.

« Vous vous croyez drôles ? » demanda-t-elle.

Rogue se redressa. Il nous jeta un regard furieux et s’en fut d’un pas vif.

« Tu n’es pas en cours ? demandai-je à Antje d’un air bête.

— Le professeur Franck est souffrante, nous apprit-elle. Le cours est annulé. Vous pouvez m’expliquer ce qui s’est passé ? »

Comme James ne disait rien, je fus bien obligé de tout lui dire. Antje sembla encore plus en colère :

« James Potter, tu es un crétin fini, aboya-t-elle. Et en plus, tu ne comprends rien. Ce que tu étais sur le point de faire est dégoûtant. Ça ne va pas, la tête, d’humilier les gens à ce point-là ?

— Rogue le méritait, grogna mon meilleur ami d’un ton buté.

— Non. Personne ne mérite ça. Et crois-moi, je le déteste autant que toi. D’ailleurs, pourquoi tu as voulu faire ça ? Pour t’amuser ? Parce qu’il a traité Lily Evans de Sang-de-Bourbe ? Ou parce qu’elle t’a jeté ?

— Antje, ne prononce pas ce mot-là, intervins-je, pris d’un frisson désagréable.

— Tais-toi, Sirius. Ce n’est pas à toi que je parle, et je dis ce que je veux. Quant à toi, James, si tu espère encore que Lily tombe amoureuse de toi, ce dont je doute franchement, il va falloir que tu arrêtes de te croire au-dessus du lot et de faire le malin devant les gens. »

Sur ces mots, elle nous planta là et alla rejoindre Lily Evans que nous pouvions reconnaître de loin grâce à sa couleur de cheveux. James n’en menait pas large.

« Je ne sais plus où j’en suis, marmonna-t-il.

— Je crois qu’Antje a raison, dit Remus en récupérant le bouquin qu’il avait mis de côté dès que Rogue était apparu dans notre champ de vision. Tu as été trop loin, James.

— Mais… »

Mon meilleur ami me jeta un regard presque implorant, comme s’il s’attendait à ce que je le soutienne. Seulement, à bien y réfléchir, je partageais l’avis de Remus et, par extention, celui d’Antje, et ce même si Rogue était un nul qui méritait une bonne leçon.

« Tu te serais sali les mains en retirant le caleçon de Servilus, dis-je d’un ton dégagé. Et puis franchement, qui aurait eu envie de voir ses fesses ?

— Sans parler du côté face, ajouta Peter en gloussant.

— Quel côté face ? Y a rien à voir, à part peut-être un haricot. »

James perdit son air morose et se mit à rire avec nous. L’incident fut alors considéré comme clos.

oOØOo

Le lendemain, nous apprîmes que Lily Evans avait décidé de ne plus adresser la parole à Rogue. Elle en avait discuté avec Antje qui s’était empressée de nous le répéter. Je crus déceler un vague soulagement dans le regard de James mais je n’aurais su dire ce qu’il pensait de cette nouvelle. Avait-il vu ce crétin de Servilus comme une sorte de rival potentiel ? Pensait-il à présent pouvoir l’asticoter à loisir maintenant qu’Evans ne serait plus là pour le défendre ? Ça ne changerait pas grand-chose, après tout. Il semblait définitivement grillé auprès de la préfète. Tu me fais vomir, lui avait-elle dit. Je ne sortirais pas avec toi, même si je n’avais plus le choix qu’entre toi et le calmar géant. Ce n’était pas anodin et James le savait. À mon sens, il n’avait plus guère le choix qu’entre renoncer à cette fille ou s’adapter à ce qu’elle cherchait chez un garçon. Je préférais la première solution. Evans avait l’air d’aimer les mecs super chiants qui se prenaient beaucoup trop au sérieux.

Je n’allais cependant pas le lui dire.

  Un chapitre fourre-tout et posté en retard… bonne lecture

Chapitre 18

Smoke on the water

Antje quitta l’infirmerie à la fin du week-end. Son attitude dans les jours qui suivirent força le respect : elle parvenait à faire comme si tout était normal. « Je ne veux pas que les autres sachent ce qui s’est passé, m’expliqua-t-elle à son retour. Ça ne les regarde pas et puis je n’ai pas envie de me faire remarquer. » Ses arguments se tenaient mais j’admirais tout de même son courage. J’étais le premier à tirer une tête de cent pieds de long quand j’avais un problème — après l’incident de la Cabane hurlante, j’étais certainement passé pour un épouvantable rabat-joie — et, ne serait-ce que six mois auparavant, Antje n’aurait jamais caché ses larmes. À présent, elle les réservait à son oreiller, la nuit, quand les autres filles dormaient.

Il lui fallut du temps cependant pour parler librement de ce qui s’était passé. Même avec moi, Antje faisait comme si de rien n’était. Elle semblait juste un peu absente, parfois. Son père lui envoya une lettre quelques jours après qu’elle ait quitté l’infirmerie pour lui dire qu’il ne voulait pas qu’elle aille à l’enterrement. À mon grand étonnement, elle accepta la chose avec un haussement d’épaule. « C’est avant qu’elle meure que j’aurais voulu lui dire au revoir, affirma-t-elle. Maintenant, c’est juste une épreuve de plus. » Je n’étais pas sûr de comprendre ce qu’elle voulait dire mais je n’étais sans doute pas très bien placé pour ça.

La vie reprit donc son cours, même si elle avait un arrière-goût un peu bizarre. Comme me l’avait promis McGonagall, ma punition avait été allégée. Certes, je faisais toujours mes devoirs sous la surveillance d’un prof après les cours mais mes soirées et une partie de mes week-ends étaient libres. Il s’agissait, cela dit, que je file droit. Au début, je pris au sérieux les avertissements de ma directrice de maison et dus me retenir de faire des mauvais coups. Puis, un soir, l’idée survint.

Nous nous trouvions tous les quatre dans la salle commune, quelques jours avant la pleine lune de mai. Je m’ennuyais à pleurer. Les quatre murs de la salle commune m’oppressaient. J’avais envie de sortir mais je connaissais le risque. James, Remus, Peter et moi avions pas mal grandi ces derniers mois et, à présent, il nous était impossible de nous cacher à quatre sous la cape d’invisibilité sans qu’on puisse voir nos pieds. Nous commençâmes donc à réfléchir à un moyen de nous promener dans l’école en toute sécurité et progressivement nous vint l’idée de fabriquer de nos propres mains un plan clandestin de l’école et du parc sur lequel nous pourrions surveiller les allées et venues des uns et des autres. Remus avait trouvé un sortilège dans un bouquin de la bibliothèque qui nous permettrait d’y parvenir. Il nous faudrait un peu de temps pour le maîtriser mais il s’agirait de la dernière étape. Il nous fallait d’abord dessiner la carte et le reste viendrait plus tard.

Cette idée nous plongea dans l’euphorie. D’abord, si nous arrivions à tout faire comme nous le voulions, un bel avenir peuplé de mauvais coups et autres incartades au règlement s’ouvrirait devant nous jusqu’à la fin de nos études. Ensuite, ça nous permettrait de nous occuper de façon constructive et amusante sans quitter la tour de Gryffondor et de tromper l’ennui. Nous décidâmes donc de mettre ce plan à exécution juste après la plein lune.

Cette fois-ci, d’ailleurs, je préférai ne pas accompagner les copains. Je n’avais pas très envie de l’admettre mais retourner à l’endroit où j’avais failli provoquer une catastrophe me mettait mal à l’aise. Certes, j’étais toujours persuadé que c’était la faute de Rogue mais… il me fallait quand même avouer que j’étais un tout petit peu responsable. James, Remus et Peter ne firent aucun commentaire sur ma décision et je leur assurai qu’ils pourraient compter sur moi le mois suivant. À l’approche des BUSE, il me faudrait prendre l’air et je ne penserais certainement plus à ce qui s’était passé.

oOØOo

À la fin du mois de mai, je fus convoqué dans le bureau de McGonagall au même titre que mes camarades de cinquième année pour l’inévitable « conseil d’orientation » qui précédait les BUSE. N’ayant aucune idée de ce que je voulais faire de ma vie, j’avais passé le week-end à éplucher les documents mis à notre disposition dans la salle commune sans y trouver le plan de carrière de ma vie. J’imaginais que mes parents souhaitaient me voir faire carrière au ministère dans un secteur aussi chiant que le Département de la Justice magique ou un truc comme ça, mais il était hors de question que je perde mon temps à moisir derrière un bureau. La famille Black vivant sur des tas d’or depuis des générations, mon père n’avait jamais travaillé de sa vie. Il s’était juste acheté un Ordre de Merlin à l’aide d’un gros backchich juteux. Ma mère, elle s’était contentée de nous élever, mon frère et moi. Bref, même si j’en avais eu la moindre envie, j’aurais difficilement pu suivre l’exemple parental, d’autant qu’ils ne me coucheraient certainement pas sur leur testament. Regulus, le « fils prodigue », hériterait de tout alors que je n’étais qu’un bon à rien.

Je n’en menais donc pas large devant ma directrice de maison qui m’observait d’un air aigu derrière la montagne de prospectus qui encombraient son bureau. Je m’installai sur ma vieille copine la chaise tendue de tissu écossais et attendis que McGonagall prenne la parole.

« Avez-vous déjà réfléchi à ce que vous souhaiteriez faire après avoir quitté Poudlard ? » me demanda-t-elle.

Je laissai passer un silence avant de répondre.

« Oui, j’y ai réfléchi, finis-je par dire, mais je n’en ai aucune idée. »

L’enseignante en métamorphose soupira et se mit à feuilleter mon dossier scolaire qu’elle avait devant elle.

« Dans l’ensemble, affirma-t-elle, vos résultats sont excellents. Vous pourriez envisager n’importe quelle carrière si vous n’étiez pas aussi turbulent et si vous réfléchissiez un peu plus aux conséquences de vos actes. »

Je ne me donnai pas la peine de prendre acte de cette remarque : c’était on ne peut plus prévisible.

« Je ne veux pas travailler dans un bureau, dis-je, histoire de couper court à la leçon de morale.

— Ça ne me surprend pas, répliqua McGonagall. Dans ce cas, cela réduit un peu vos choix. Vous étudiez l’arithmancie, n’est-ce pas ?

— Oui.

— Dans ce cas, peut-être pourriez-vous envisager un emploi chez Gringotts, ils envoient souvent des gens à l’étranger. Il faudra juste que vous appreniez à faire preuve de prudence. »

Je notai l’idée, qui n’était pas mauvaise, dans un coin de ma tête et ajoutai :

« J’aime bien les créatures magiques.

— Il existe des perspectives d’emploi dans ce secteur, dit ma directrices de maison en me tendant un document, mais là encore, il s’agit de ne pas faire n’importe quoi. »

L’entretien dura encore un moment et je rejoignis mes camarades après un énième sermon sur la maturité et la pespective de ne plus avoir cours d’histoire de la magie en sixième année. Après tout, c’était déjà ça.

J’avais cela dit l’esprit un peu embrouillé. Au repas de midi, je vis Antje plongée dans un dépliant de l’hôpital Sainte-Mangouste qu’elle avait récupéré dans la salle commune. De toute évidence, même si elle n’aurait pas à faire son choix de carrière avant l’année suivante, elle était intéressée par un avenir de guérisseuse. Je me pris à me demander si nous serions encore ensemble à la fin de nos études et ce qui se passerait à ce moment-là… même si une chose était sûre : les gens que j’aimais passeraient avant tout le reste, carrière ou non.

oOØOo

Les semaines suivantes furent presque uniquement consacrées aux révisions. James et moi estimions ne pas en avoir besoin mais Remus et Peter, eux, y tenaient. Leurs conseils d’orientation s’étaient avérés un peu compliqués : les résultats scolaires de Peter étaient juste passables et lui laissaient peu de perspectives à moins qu’il travaille très dur et fasse d’énormes progrès et quant à Remus, même McGonagall dut admettre qu’il lui serait difficile de trouver un travail où on le laisse s’absenter deux jours par mois sans que ça finisse par sembler suspect. Elle lui annonça toutefois qu’un nouveau protocole de recherche était en cours à l’hôpital Sainte-Mangouste visant à limiter les effets de la lycanthropie. Il était donc permis d’avoir de l’espoir.

Les Brevets Élémentaires de Sorcellerie Universelle se déroulaient en deux temps : chaque jour était consacré à une matière. L’examen écrit avait lieu le matin tandis que l’après-midi était consacrée aux épreuves pratiques. Après avoir potassé contre mon gré pendant un mois et compte tenu de mes résultats, j’étais parfaitement serein. J’avais cela dit de la peine pour Remus qui, en plus de son stress et de sa fatigue, devait gérer les autres élèves qui trafiquaient dans leur coin des potions de mémoire frauduleuses et autres trucs inutiles garantissant la réussite aux examens tout en étant totalement bidon. Il se fâcha même tout rouge après le chéri de Britta Hopkins qui tentait de persuader cette dernière de garder un oignon moisi dans sa poche au moment des épreuves. Ce fut d’ailleurs une scène assez amusante, jusqu’à ce que Remus ne menace de passer sa mauvaise humeur sur nous.

oOØOo

Dans l’ensemble, les examens se passèrent sans problème. J’en arrivais même à me demander pourquoi on faisait un tel cirque à propos des BUSE. Qu’y avait-il de différent avec les autres épreuves que nous devions passer depuis la première année ? Dans tous les cas, je sortis de chaque épreuve assez content de moi et j’étais quasiment certain d’obtenir un gros tas de mentions « Optimal », sauf peut-être en histoire de la magie parce que j’avais certainement confondu des noms de clans de trolls pour ne pas changer.

Un petit événement, cela dit, perturba quelque peu le déroulement des examens. Nous venions de terminer notre écrit en Défense contre les forces du Mal. Les questions, d’une simplicité enfantine, avaient en grande partie été consacrées aux créatures dangereuses que nous avions étudiées toute l’année. Il nous fallut même évoquer les signes distinctifs du loup-garou, ce qui nous fit bien rire à l’exception de Peter qui était tellement stressé qu’il prenait tout au pied de la lettre. Il faisait un temps magnifique et nous profitâmes d’avoir un peu de temps avant le repas de midi pour flâner un peu dans le parc. Tandis que James jouait avec un Vif d’Or qu’il avait chipé Merlin savait où sous le regard (un peu trop) admiratif de Peter et que Remus révisait, je bayais aux corneilles. Antje était encore en cours, à cette heure-ci. Ses examens devaient avoir lieu plus tard. J’aurais bien voulu qu’elle soit là. J’aurais également bien voulu qu’on soit en période de pleine lune, histoire de faire des projets de promenades nocturnes sous nos formes d’animaux. En un mot comme en cent, je m’ennuyais… jusqu’à ce que survienne Rogue.

Je l’avais laissé tranquille depuis l’incident de la Cabane hurlante. Une fois n’étant pas coutume, j’avais obéi aux profs qui m’avaient spécifié l’interdiction de l’approcher. Je regardai avec amusement James jeter quelques maléfices au cafard graisseux en ajoutant de temps en temps quelques commentaires sur son gros pif et ses cheveux gras. C’était peut-être un peu gratuit mais ça trompait l’ennui de manière infiniment plaisante. Quoi de plus rigolo que de voir ce minable se débattre et subir des sarcasmes ? Pas grand-chose, si vous voulez mon avis. Il essaya bien de se défendre en mélangeant de façon ridicule formules magiques et gros mots mais James lui jeta un sort de nettoyage qui lui fit cracher du savon. À ce moment-là, Lily Evans surgit pour défendre son copinou.

« Laissez-le TRANQUILLE », glapit-elle.

Trop content d’avoir une occasion de parler à sa préfète chérie, James essaya de faire de l’humour, sans succès. Il lui proposa ensuite de fiche la paix à Rogue en échange d’un rendez-vous avec elle, ce qui se solda par un échec. Malheureusement, Servilus profita de l’échange pour se libérer des sortilèges de mon meilleur ami et pour lui jeter un maléfice de son cru, une saloperie appelée Sectusempra et qui provoquait des plaies. J’étais quasiment sûr qu’on pouvait commettre un meurtre avec ça. Furieux, James pointa à nouveau sa baguette sur Rogue et le fit léviter, la tête en bas. Il était tellement ridicule, avec ses jambes squelettiques qui dépassaient de son calcif douteux que j’oubliais momentanément qu’Antje, jadis, avait elle aussi été victime de ce maléfice et des moqueries qui en découlaient. Evans intervint à nouveau et James fut bien obligé de libérer le cafard.

« Tu as de la chance qu’Evans ait été là, Servilus », dit James.

La réponse de l’intéressé mit un sacré froid dans l’atmosphère :

« Je n’ai pas besoin de l’aide d’une sale petite Sang-de-Bourbe comme elle ! », glapit-il.

J’en restai quasiment bouche-bée. Tout ce temps à lui lécher les bottes et à lui tourner autour pour finir par lui jeter au visage l’insulte la plus infâmante de notre monde ? Quel imbécile ! Dans tous les cas, Evans prit acte de l’injure en question :

« Très bien, je ne m’en mêlerai plus, à l’avenir. Et si j’étais toi, je laverais mon caleçon, Servilus. »

James voulut forcer Rogue à s’excuser. Evans se fâcha et traita mon meilleur ami de prétentieux. Elle n’avait peut-être pas tout à fait tort mais je ne pus m’empêcher de la trouver injuste. Après une dernière injure, elle nous planta là et alla rejoindre ses copines un peu plus loin.

Je n’aurais su dire si James était furieux ou malheureux. Dans tous les cas, son intention semblait bel et bien de passer ses nerfs sur Rogue. Après l’avoir à nouveau fait léviter la tête en bas, il claironna :

« Qui veut me voir enlever le caleçon de Servilus ? »

Il avait déjà attrapé l’élastique du sous-vêtement et s’apprêtait à tirer dessus quand…

« Finite Incantatem. »

Rogue s’écroula par terre. James eut un mouvement de recul et je me retournai. C’était Antje. Elle pointait sa baguette magique droit devant elle et nous regardait d’un air furieux.

« Vous vous croyez drôles ? » demanda-t-elle.

Rogue se redressa. Il nous jeta un regard furieux et s’en fut d’un pas vif.

« Tu n’es pas en cours ? demandai-je à Antje d’un air bête.

— Le professeur Franck est souffrante, nous apprit-elle. Le cours est annulé. Vous pouvez m’expliquer ce qui s’est passé ? »

Comme James ne disait rien, je fus bien obligé de tout lui dire. Antje sembla encore plus en colère :

« James Potter, tu es un crétin fini, aboya-t-elle. Et en plus, tu ne comprends rien. Ce que tu étais sur le point de faire est dégoûtant. Ça ne va pas, la tête, d’humilier les gens à ce point-là ?

— Rogue le méritait, grogna mon meilleur ami d’un ton buté.

— Non. Personne ne mérite ça. Et crois-moi, je le déteste autant que toi. D’ailleurs, pourquoi tu as voulu faire ça ? Pour t’amuser ? Parce qu’il a traité Lily Evans de Sang-de-Bourbe ? Ou parce qu’elle t’a jeté ?

— Antje, ne prononce pas ce mot-là, intervins-je, pris d’un frisson désagréable.

— Tais-toi, Sirius. Ce n’est pas à toi que je parle, et je dis ce que je veux. Quant à toi, James, si tu espère encore que Lily tombe amoureuse de toi, ce dont je doute franchement, il va falloir que tu arrêtes de te croire au-dessus du lot et de faire le malin devant les gens. »

Sur ces mots, elle nous planta là et alla rejoindre Lily Evans que nous pouvions reconnaître de loin grâce à sa couleur de cheveux. James n’en menait pas large.

« Je ne sais plus où j’en suis, marmonna-t-il.

— Je crois qu’Antje a raison, dit Remus en récupérant le bouquin qu’il avait mis de côté dès que Rogue était apparu dans notre champ de vision. Tu as été trop loin, James.

— Mais… »

Mon meilleur ami me jeta un regard presque implorant, comme s’il s’attendait à ce que je le soutienne. Seulement, à bien y réfléchir, je partageais l’avis de Remus et, par extention, celui d’Antje, et ce même si Rogue était un nul qui méritait une bonne leçon.

« Tu te serais sali les mains en retirant le caleçon de Servilus, dis-je d’un ton dégagé. Et puis franchement, qui aurait eu envie de voir ses fesses ?

— Sans parler du côté face, ajouta Peter en gloussant.

— Quel côté face ? Y a rien à voir, à part peut-être un haricot. »

James perdit son air morose et se mit à rire avec nous. L’incident fut alors considéré comme clos.

oOØOo

Le lendemain, nous apprîmes que Lily Evans avait décidé de ne plus adresser la parole à Rogue. Elle en avait discuté avec Antje qui s’était empressée de nous le répéter. Je crus déceler un vague soulagement dans le regard de James mais je n’aurais su dire ce qu’il pensait de cette nouvelle. Avait-il vu ce crétin de Servilus comme une sorte de rival potentiel ? Pensait-il à présent pouvoir l’asticoter à loisir maintenant qu’Evans ne serait plus là pour le défendre ? Ça ne changerait pas grand-chose, après tout. Il semblait définitivement grillé auprès de la préfète. Tu me fais vomir, lui avait-elle dit. Je ne sortirais pas avec toi, même si je n’avais plus le choix qu’entre toi et le calmar géant. Ce n’était pas anodin et James le savait. À mon sens, il n’avait plus guère le choix qu’entre renoncer à cette fille ou s’adapter à ce qu’elle cherchait chez un garçon. Je préférais la première solution. Evans avait l’air d’aimer les mecs super chiants qui se prenaient beaucoup trop au sérieux.