Alain Pire Expérience - au Zik - Zak - Ittre- le 13 mai 2017

Publié le 13 mai 2017 par Concerts-Review

Alain Pire Expérience - au Zik - Zak - Ittre- le 13 mai 2017

Simon Rigot

Avec une carrière riche de presque 40 années , il est inutile de présenter Alain Pire , qui n'a plus besoin de prouver à qui que ce soit ses qualités de musicien , de chanteur et de compositeur. Il a décidé avec Alain Pire Experience de se faire plaisir sans tenir compte des modes ni du "système" . "Cambridge" sort en 2014 , une explosion de Rock psychédélique que tous les fans des Beatles , des premiers Pink Floyd , des Who et des Kinks se doivent de posséder.

Une belle exposition sur Classic 21 , son public privilégié , lui avait permis de s'imposer comme un maître dans ce genre de musique remis au goût du jour avec des projets comme Moaning Cities , The Narcotic Daffodils ou le Cosmic Trip Machine de Will Z. En 2016 on avait pu admirer son talent au Festival ProgResiste avec justement Moaning Cities , et début 2017 un opus plus personnel a suivi , "Song from the 13th floor" . Une bonne occasion d'aller le voir chez Zik Zak , la nouvelle salle qui replace le Brabant Wallon sur la carte des endroits où le rock se savoure autrement que dans un bar enfumé à la sono pourrie. Grâce à notre ami GPS qui nous amène à bon port après être passé entre les forges de Clabecq et la Prison où je crois reconnaître le lieu de tournage de "Tango Libre" , on découvre un grand espace, un bar généreux et un public encore clairsemé mais qui semble attendre avec fébrilité Alain Pire Experience. On se rappelle qu'ado on avait acheté le deuxième album de Jo Lemaire + Flouze "Precious Time" (1980) sur lequel Alain Pire avait joué. On se rappelle avoir vu Michel Drucker Experience (avec Alain et sa fille) au Spirit en première partie d'une prestation du légendaire Arthur Brown en formule (presque) seul en scène .On a jamais eu l'occasion de voir Such a Noise , un de ses groupes où il a eu le plus de succès . Voir Alain Pire avec son répertoire résolument psychédélique est une perspective très alléchante. Mais en jouant en Power Trio va-t-il être capable de reproduire sur scène le chatoiement des disques , avec des chœurs , des claviers vintage , et parfois même des Sitars , Tablas et Tampura. Et bien on est pas déçus . Dés le début il attaque avec son tube du moment , l'imparable "Lazin in the afternoon" dont le clip à la vieille Volkswagen hippie vient juste de sortir https://www.youtube.com/watch?v=ePS_2dRtlQY , et enchaîne avec The Sun don't shine avec son riff de guitare à la Pete Townsend . Après deux morceaux du nouvel album il nous propose de plonger dans son riche répertoire , principalement du premier album de 2014 , à commencer par Drifting South dont la trame fait furieusement penser à une ambiance à la Shocking Blue quand le groupe batave imitait Jefferson Airplane. Déjà l'occasion de belles envolées de guitare sur une rythmique implacable qui se dilue dans une longue improvisation psychédélique qui constitue la quintessence du style. On est dans un autre monde , où on croise les ombres de Gong ou du Led Zeppelin de Dazed ans Confused pour revenir à la conclusion Pop. Détonnant! S'en suit Cambridge , écrit après une journée passée avec une ancienne petite amie de Syd Barett sur les traces de son fameux "lover" dans la légendaire cité universitaire. https://www.youtube.com/watch?v=pK4V1dN2urc

Bien sûr le début évoque Strawberry Fields Forever et son Mellotron.Je ne peux m'empêcher de penser à des pastiches dans les années 80 comme "Sewing the seeds of love"(Tears for fears) ou"The Mole from the minestry" (The Dukes of Stratosphear alias XTC) . Après le romantisme nostalgique de Cambridge , il se lance dans une reprise de "On the riverside" , de son ancien groupe Such a Noise, un morceau qui a plus de 20 ans mais est agréablement revisité avec d'abord un solo de basse puis un solo de guitare construit progressivement et qui passe par différentes ambiances , du plus lyrique au plus virtuose , montrant si besoin en était la totale maîtrise d'Alain Pire sur sa Gibson . Comment écouter de la musique après une telle démonstration ? Mais il ne s'arrête pas là et enchaîne trois morceaux du premier album. Drops on fallen leaves est assumé comme un morceau pink floydien dans le genre de Fat Old Sun sur Atom Heart Mother , puis Your elephants are everywere où l'apport d'une bande son permet de reproduire les instruments indiens et On the moon , toujours immanquablement floydien avec un solo plus hendrixien que nature. Comme il est d'humeur lunaire , il enchaîne avec When the moon du dernier album qu'il rebaptise ce soir "The Dark side of..." pour faire plaisir à un spectateur , mais qui n'a rien de floydien . c'est un des rares morceaux où il est impossible de citer une référence illustre précise , une excellente composition pleine de lyrisme épique.dans son final qu'on imaginerait avec un orchestre et des choeurs , puis nous replonge en pleine science fiction , selon ses propres dires grâce à sa machine à explorer le temps (Time machine du premier album) à cette année 1967 qui a livré pour tous les amateurs de classic rock un millésime rock du XXème siècle comparable à 1961 pour les amateurs de Bordeaux. Il se rêve assistant aux premiers concerts de Pink Floyd au UFO, mais dans Time Machine il fait un clin d'oeil à White Room de Cream pour partir ensuite dans un schéma harmonique totalement différend dans sa manière de composer . Alain Pire nous entraîne souvent ailleurs , là ou beaucoup de compositeurs restent prévisibles dans leurs progressions. Et pour enfoncer le clou , il revient avec Do you remember those days du nouvel album sur cette nostalgie d'une époque bénie pour les amateurs du genre . Et pourtant ce morceau est résolument moderne , avec une rythmique tribale hypnotique qui permet à Marcus Weymaere de nous offrir une ébauche de solo de batterie ponctué de phrases de guitares. Et de conclure le concert avec le dernier morceau du premier album , Number one , une dernière occasion pour Alain Pire de nous régaler de ses solos et de ses riffs. En rappel une version assez fidèle à l'original de Manic Depression de Jimi Hendrix Experience , sorti comme il le fait remarquer en ... 1967.

Enfin insistons sur le travail impeccable de Rene Stock à la Bass Rickenbacker et Marcus Weymaere qui non seulement assure la batterie , mais contrôle les séquences et imprime le rythme lorsqu'il s'agit d'ajouter à l'ensemble des petites notes de clavier ou d'instruments indiens. Ces trois là se trouvent les yeux fermés , la cohésion est irréprochable et manifestement le plaisir de jouer ensemble constitue un moteur qui rend la prestation jouissive et variée. Le son de la basse est précis et rond sans être ronflant , la batterie balance un groove implacable et quand Alain se lance dans un de ses innombrables soli, le backing est bétonné à l'instar de ses sections rythmiques légendaire de Power Trio (Jack Bruce - Ginger Baker / Noel Redding- Mitch Mitchell)