Le succès touristique espagnol est manifeste. Il donne même le tournis : les 68,5 millions d'arrivées internationales sont largement dépassées. On en annonce 75 millions et on n'en doute pas car une grande partie du trafic touristique espagnol arrive désormais en avion, ce qui facilite la comptabilité.
La performance touristique espagnole se lit également dans les dépenses par tête, largement supérieures à celles de la France avec des recettes moyennes par arrivée à 824 dollars en Espagne contre 543 dollars pour la France à 84 millions de touristes étrangers (données du Forum Economique Mondial).
L'Espagne fait donc bien mieux que la France sur la rentabilité touristique et tend à nous dépasser sur l'accueil international. Sa performance est réelle et dépend d'un système bien différent du nôtre. Le pays compte 1594 offices de tourisme et une organisation touristique par communauté, équivalent de nos grandes régions, soit 16 dans le pays. L'échelle équivalente à nos départements n'est pas concernée par la promotion touristique. Les organisations des communautés comprennent des effectifs réduits, tout comme les offices de tourisme. Je n'ai pas la ventilation des personnels des offices de tourisme et des organisations communautaires, mais mes expériences professionnelles et de voyageur m'ont toujours alerté sur le faible nombre d'intervenants dans ces structures. Et les budgets affectés, le sont principalement à la promotion, tout en étant plus forts que ceux de la France.
J'ai pris la route du Sud
Tout récemment j'ai effectué un petit voyage d'agrément vers la région qui compte le plus d'offices de tourisme du pays : l'Andalousie, avec 246 structures d'information touristique.
Mon voyage a commencé par une étape à Chinchon, charmant village au Sud de Madrid. Très couru par les Madrilènes, tant en hiver qu'aux beaux jours, Chinchon offre une remarquable place à galeries, des églises fermées à la visite individuelle, un théâtre, un château, quelques spécialités gastronomiques disponibles dans les commerces ouverts sur la place tous les week-end, dimanches après-midi compris. Et un petit train d'ânes sur lesquels montent les enfants de manière continue. La ville est belle à Chinchon.
Granada et ses millions de visiteurs
Deuxième étape : Granada. Sa circulation auto est un enfer : bouchons, sens de circulation, modifications récentes du plan de circulation au point que le GPS m'a fait tourner deux fois de suite au même endroit sans trouver d'issue, il est vrai qu'une seule voie ouverte face à 3 sens interdits, ça complique la donne. A Granada, les voyageurs du mois de mai proviennent du monde entier et en particulier d'Asie. Evidemment l'Alhambra est le phare de la ville et j'ai découvert que s'il m'était impossible d'effectuer une réservation de billets via le site de l'Alhambra quelques jours avant mon arrivée car il n'y avait plus de places disponibles, l'hôtel a bien joué son rôle de concierge à un prix très attractif. D'ailleurs, pour tous les conseils, c'est l'hôtel qui est en pointe : conseils éclairés sur les restaurants, balades, boutiques... Car côté services numériques, la situation est moins favorables que dans nos destinations. Le wifi est annoncé mais rarement tenu.
Cordoba, si calme et si fleurie
Dernière étape Cordoba. En plein dans la fête des patios fleuris avec des défilés de visiteurs, locaux en groupes associatifs et touristes qui patientent sagement pour entrer et ressortir au bout de quelques minutes de contemplation des efforts de fleurissement des habitants. L' office de tourisme est moderne : il propose un espace de découverte archéologique rapide et gratuit, des sanitaires fort usités, un wifi de champion quant au débit, mais pas sur le nom qui comprend le mot ayto (ayutamiento : mairie). Si tu as n'a pas lu Lazarillo de Tormes dans le texte, et même, pas sûr que tu fasses la connexion ! Côté accueil deux dames, dont celle à laquelle je me suis adressée ne démériterait pas de figurer dans un cycle allongé, avec sessions de rattrapage, pour une formation APEX !
Des ingrédients simples et des lacunes
Dans les points faibles à pénibles du tourisme espagnol du moment :
- faire l'effort de s'exprimer en espagnol, surtout quand votre niveau n'est pas si mauvais et s'entendre répondre systématiquement en anglais est insupportable
- l'absence de wifi territorial ou son annonce et sa non tenue
- l'absence de solutions digitales optimales (les sites web publics sont vétustes à peu modernes)
- si applications, principalement dans l'univers Google Play
Mention spéciale aux touristes asiatiques dont beaucoup semblent plus inspirés par leurs selfies que par l'environnement et les richesses culturelles qu'ils ont choisis de visiter.
François Perroy est aujourd'hui cofondateur d'Agitateurs de Destinations Numériques et directeur de l'agence Emotio Tourisme, spécialisée en marketing et en éditorial touristiques. Il a créé et animé de 1999 à 2005 l'agence un Air de Vacances. Par ailleurs, il produit et anime le classeur "Diriger un office de tourisme" chez Territorial. Précédemment, il a occupé des fonctions de directeur marketing au sein de l'agence Haute Saison (DDB) et de journaliste en presse professionnelle du tourisme à L'Officiel des Terrains de Camping et pour l'Echo Touristique. Il écrit par ailleurs des ouvrages et articles techniques sur le tourisme ainsi que des créations plus personnelles. Contact : fperroy at etourisme.info (cette adresse apparait en clair pour éviter les robots)