Baby Driver. Au rythme des voitures

Par Balndorn

Mutique, Baby (Ansel Elgort) attend dans la voiture que les braqueurs qu’il conduit terminent de dévaliser la banque. En silence ? Au contraire. Le jeune homme chante à pleins poumons la musique qui passe dans son iPod ; musique qui, lorsque la course-poursuite commencera, donnera à ce jouissif ballet mécanique son tempo effréné.
Comédie musicale automobile
Baby Driver, nouvelle création du maître du film de genre Edgar Wright, ne brille certes pas par son scénario – une classique histoire d’échappatoire au cercle vicieux des braquages –, mais éclaircit les liens étroits qui unissent musique et course-poursuite. On pourrait aller jusqu’à dire qu’il s’agit d’une comédie musicale, tant les différents morceaux nimbent chaque scène d’une aura particulière.Mais il faut alors parler d’une comédie musicale d’un genre particulier. Ou plutôt, de genre. Si Baby, conformément à la tradition de la comédie musicale classique, laisse la musique parler à sa place, il ne cède pas pour autant au lyrisme du chant et de la danse, comme le faisaient Sebastian et Mia dans La La Land. Car, dans le genre du film de voitures, c’est d’abord la conduite au volant, surhumaine, qui révèle le caractère.S’exhibe donc une science du tempo dans de spectaculaires séquences de course-poursuites. Tempo qui passe par l’articulation précise de la musique, in ou off, et d’un montage fragmentaire, à l’image de ces plans saccadés auxquels la BO donne un rythme, c’est-à-dire une unité organique, à défaut de logique.
Ode au futurisme
« Une automobile est plus belle que la Victoire de Samothrace », proclamait, prophétique, Marinetti dans son Manifeste du futurisme en 1909. Sans le revendiquer, Edgar Wright s’inscrit dans l’héritage de l’avant-garde italienne et de sa fascination pour une modernité technique, affranchie du contrôle humain.Baby Driver n’est certes pas le premier film de course-poursuite à utiliser une bande-originale frénétique, ni le meilleur ; mais il a le mérite de mettre en exergue le lien intime entre la musique et le montage. Le genre du film course-poursuite se montre alors sous un nouveau jour : exacte antithèse d’un certain théâtre parlé, il promeut l’image d’un monde où l’homme s’annihile dans la furie automobile.Par l’excès de vitesse, le conducteur dépasse son propre corps, et rejoint un au-delà de la condition humaine, purement scandé par la musique et l’image.

Baby Driver, d’Edgar Wright, 2017
Maxime