Enterrement en linceul : l’ordonnance bruxelloise bientôt effective ?

Publié le 26 août 2017 par Daniel Leprecheur

Un long cheminement

Parmi les rites funéraires qu’elle impose, la religion musulmane ordonne l’usage du linceul et le placement du corps à même la terre une journée au plus tard après le décès. Or la législation des pays d’Europe impose de placer la dépouille dans un cercueil, dans un souci d’hygiène.

Depuis longtemps les communautés musulmane et juive de Belgique réclament l’autorisation du linceul. Tolérée en Flandre, cette pratique est restée lettre morte en Wallonie en 2009, lors de la refonte de la réglementation portant sur le funéraire. Pour argumenter ce refus, on a avancé la protection de la santé publique et la manière dont l’introduction du linceul allait perturber les méthodes de travail des entrepreneurs de pompes funèbres.

Il a fallu attendre 2012 pour que le député écologiste Ahmed Mouhssin, depuis conseiller municipal de Saint Josse, sensibilisé par les requêtes croissantes des fidèles musulmans, ne dépose un projet de loi au parlement. Après un an de débats, ce texte a été adopté à une écrasante majorité, non sans avoir vérifié qu’une telle mesure ne mettait pas en péril la salubrité des populations. S’appuyant sur la validité de l’expérience flamande, cette décision va en effet dans le sens d’une politique d’intégration des différentes communautés, de « l’égalité des différents cultes et la laïcité organisée ». Reste à l’encadrer au niveau technique, ce qui relève de l’arrêté d’application.

Un encadrement technique

Ce dernier doit notamment définir le cadre du process, plus particulièrement les caractéristiques du linceul en matière de perméabilité, de résistance à la pression, au rétrécissement, à la torsion et à l’étirement. L’idée est de préciser les normes en matière de solidité tout en excluant l’usage de substances toxiques ; ainsi le tissu ne devra pas comporter plus de 0,1 % de chlore dans ses fibres. Il devra être impénétrable pour les gaz et les liquides, ne pas les laisser passer. De même, il sera à usage unique, tout comme le cercueil : on ne pourra donc le réutiliser pour ensevelir un autre corps.

Relevant à la fois des autorités régionales et fédérales, l’arrêté a mis du temps à être façonné, en prenant en compte les normes dictées par l’Union Européenne. Arrivé à sa forme finale, il sera soumis au vote à la rentrée. Sa mise en application entraînera alors une adaptation des professionnels du funéraire, spécialisés dans les rituels musulmans ou généralistes : tous devront s’équiper en conséquence, constituer des stocks suffisants … et prévoir une baisse du chiffre d’affaire, le linceul coûtant par définition beaucoup moins cher qu’un cercueil.

Un changement de pratiques ?

Il va également falloir repenser le transport du corps du site de préparation jusqu’au tombeau : les linceuls ne sont pas équipés de poignées, aussi porter la dépouille va être beaucoup plus délicat et les équipes vont devoir s’organiser pour y parvenir de manière convenable et digne.