Les deux vies de Bauduin

Par Belzaran


Titre : Les deux vies de Bauduin
Scénariste : Fabien Toulmé
Dessinateur : Fabien Toulmé
Parution : Février 2017


Après une première bande dessinée autobiographique, « Ce n’est pas toi que j’attendais », Fabien Toulmé avait la lourde tâche de confirmer ses qualités d’auteur. Car raconter une période difficile de sa propre vie peut toucher le lecteur. Écrire une fiction nécessite de la rendre crédible. Avec « Les deux vies de Bauduin » et ses 260 pages, le dessinateur prend le temps de poser son sujet. Le tout est paru chez Delcourt.

Refaire sa vie, un sujet trop classique ?

Baudouin est trentenaire, célibataire, gagne très bien sa vie dans un boulot qui le bouffe. Son frère, esprit libre, fait de l’humanitaire et ne se pose pas de question, vivant au jour le jour. Lorsqu’il apprend qu’il est malade, Baudouin va, sous l’impulsion de son frère, changer d’existence.

C’est le sujet classique de la remise en question qui nous est offert. J’ai une vie « classique », rangée. Qu’aurais voulu mon moi adolescent ? Rien de nouveau sous les tropiques, Fabien Toulmé nous propose beaucoup de situations un peu trop vues : la vie de bureau c’est très mal, mieux vaut être artiste. C’est toujours la vision des artistes et de leur opinion extrêmement négative du travail considéré comme « normal ». Pour le coup, l’auteur ne renouvelle rien, tombant allègrement dans la caricature. Que ce soit Bauduin et son compteur de jours avant la retraite, où le fait d’avoir choisi de faire de lui un juriste, tout cela manque cruellement d’originalité. Ne parlons même pas des parents, dont les discours manquent totalement de finesse.

On cherchera avant tout le sel de l’ouvrage dans la relation entre ces deux frères diamétralement opposés, mais pourtant attachés l’un à l’autre. L’aîné, libre, qui pousse toujours le petit coincé, voilà qui fonctionne bien. Les flashbacks, finalement, se révèlent peu utiles. On sent bien l’intention derrière, mais il casse le rythme de lecture sans apporter suffisamment d’eau au moulin. Sans eux, le livre aurait été plus ou moins le même.

Malgré tout, la fin du livre s’éloigne un peu des clichés. Et certaines situations qui nous aurons fait tiquer prennent du sens et invitent à une relecture. Sans transcender l’ouvrage, il montre une intelligence d’écriture de Fabien Toulmé qui nous propose un ouvrage plus original qu’il n’y paraît.

Concernant le dessin, c’est très lisible, mais sans charme. Fabien Toulmé dessine correctement les personnages, les décors, mais ça manque de caractère. Les visages des personnages ont peu d’expression (Bauduin, derrière ses lunettes, n’a pas de pupilles). Clairement, le dessin de l’auteur a des limites qui l’empêchent, dans certains passages, d’être percutant.

« Les deux vies de Baudouin » est un ouvrage qui se lit sans peine, malgré quelques longueurs. Les défauts de jeunesse de son auteur, avec des personnages caricaturaux et une situation initiale vue et revue, ont de la peine à être gommé par un dessin sympa mais limité. Malgré tout, l’ouvrage réserve quelques surprises qui, à sa fermeture, nous laisse un bon souvenir.