Joseph Conrad, Marc-Aurèle, la mère de Marcel Proust et... Rome finalement

Par Dcmky

Le 14 janvier 1898, Joseph Conrad écrit à son ami Robert Cunninghame Graham:'La vie ne nous connaît pas et nous ne connaissons pas la vie - nous ne connaissons même pas nos propres pensées. La moitié des mots dont nous nous servons n'ont aucun sens, et de l'autre moitié chaque homme comprend chaque mot à la façon de sa folie et de sa vanité.'A l'intérieur, aussi bien qu'à l'extérieur - et sur toute la terre - la même incommunicabilité... Cette terrible absence d'illusion relative à l'essence même de son métier... Je trouve qu'elle donne encore plus de prix aux terribles efforts qu'en dépit de cette situation sans espoir, il a consentis pour mener à bien son oeuvre.


Des mots magnifiques qui, dans mon esprit, immédiatement en appellent d'autres: ceux de Marc-Aurèle appris par coeur il y a bien longtemps:'"Dans la vie d'un homme, le temps qui lui est imparti n'est qu'un instant, son existence un flux incessant, sa conscience un éclair fugitif, son corps la proie des vers, son âme un trouble tourbillon, son avenir sombre, sa gloire douteuse. En un mot, tout ce qui est corps est pareil à une onde impétueuse, tout ce qui est âme pareil aux rêves et aux brumes"(Marc-Aurèle, Pensées pour moi-même, livre II, XVII)

Marc-Aurèle (121-180)



Il était peut-être là finalement, le rapport avec Rome.Joseph Conrad est un stoïcien, comme nombre de ses héros.« Si vous n’êtes Romain, soyez digne de l’être » ( Corneille, Horace, Acte II, Scène 3)C'est, dit-on, la phrase qu'en septembre 1905, pour l'exhorter au courage, Jeanne, la mère de Marcel Proust, adressa à son fils fondant en larmes au pied du lit où elle était en train d'agoniser.

Jeanne Proust (1849-1905), portrait par Anaïs Beauvais (1880)