La méditation et la science

Publié le 04 juin 2018 par Eric Acouphene


 1980 — Philippe a six ans. Il rentre de l’école.
« Qu’avez-vous fait aujourd’hui ? »
« On a cassé une fleur en morceaux. Et le maître a expliqué la racine, la tige, les pétales et encore un autre truc. Mais tu sais papa, il n’a rien dit de … la fleur ! »

   

1920 — Graf Dürckheim suit un séminaire à l’université de Kiel. Le maître de conférences affirme d’un ton professoral que « la note “do” est 256 oscillations par seconde ».
Dürckheim s’empresse de répliquer que le verbe être est sans doute abusif : « On ne peut affirmer de la sorte une telle équivalence ; ces 256 vibrations par seconde ne représentent à mon sens que la réalité physique de la note émise. Mais en tant qu’être humain je perçois des sons, et non des ondes ! »
A son retour du Japon, après dix années de pratique des exercices proposés dans le monde du zen, parmi lesquels la méditation appelée zazen, Dürckheim discernera plus encore ces deux approches du réel : l’expérimentation scientifique objective et l’expérience intérieure, le vécu intérieur subjectif.


2018 — Au cours du récent reportage, sur la 5ème chaîne, « Méditation : une révolution dans le cerveau! » [1] il apparaît clairement que les mesures quantitatives, que permettent le scanner, l’IRM, l’électroencéphalogramme, ne cessent de jouer le premier rôle dans l’intérêt porté à la méditation. Il a beaucoup été question, dans cette enquête très sérieuse, du cerveau et des télomères.
Les télomères ? L’extrémité d’un chromosome « dont la dégradation serait la cause de nombreuses pathologies » [Elizabeth Blackbum, biologiste moléculaire australo-américaine (prix Nobel de médecine 2009), et Elissa Epel, psychiatre à l'université de Californie]

Dommage que cette enquête ne propose pas leurs conclusions: « Nous ne sommes pas uniquement le produit de nos gènes; nos sentiments, nos émotions modèlent en permanence l'expression de ces gènes. De plus nous avons aujourd'hui la certitude que rien n'est irréversible. Nous savions déjà que la plasticité cérébrale était une réalité, maintenant nous savons aussi que les cellules du corps réagissent profondément avec notre état d'esprit. Et surtout, si nous sommes remplis de stress, cela peut être transformé, modifié ».
Cette découverte étonnante démontre le lien étroit entre les émotions et ce qui se passe à l'intérieur de la cellule. Mais ce qui est également étonnant c'est que le phénomène est réversible! « Nous avons aussi constaté que lorsque le niveau de stress diminue, la longueur des télomères augmente. L'aspect réversible vaut dans les deux sens. On peut se “soigner” soi-même, mais on peut aussi se rendre “malade”, et c'est nous qui tenons la barre en quelque sorte. » [2]


Tenez la barre ! Méditez !
Mais quelle forme de méditation ?


Depuis quelques années la méditation, dite moderne, prend place au cœur des études sur le corps-objet (Körper). Depuis plus de vingt-cinq siècles, la méditation, dite ancestrale, invite l’homme à se mettre à l’écoute du corps-vivant qu’il est (Leib) .
La science cherche dans quelle mesure la méditation moderne pourrait libérer l’homme des symptômes de cette maladie constituante : l’angoisse et les états qui l’accompagnent (inquiétude latente, peur souterraine, stress, dépression, burn-out) .
Depuis le Bouddha, la personne qui médite ne cherche pas à vaincre la maladie mais à ne pas continuer à vivre dans l’ignorance de son état de santé fondamental : le calme intérieur, la paix de l’âme.
Sur ce chemin de guérison qu’est la pratique de la méditation, la fonction-témoin n’est pas le scanner ou l’IRM ; la fonction-témoin est ce que la personne qui médite sent et ressent.

Rien n’est irréversible ? Alors …. Méditez !
Portez attention à la … fleur ! Considérez avec une attention soigneuse les … sons !
Prenez au sérieux cette qualité d’être, le calme, qui se présente à travers la … sensation et le sentEment !

Jacques Castermane [1]  Enquête de santé - Méditation : une révolution dans le cerveau, France 5,  émission diffusée le 16.05.2018
[2]  Dr. E. Blackburn, Dr. E. Epel, L’effet télomère, Guy Tredaniel Editeur, 2017, 400 p.

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