SANTÉ CARDIAQUE : Titine, l'alcool, et l'insuffisance cardiaque

Publié le 03 juillet 2018 par Santelog @santelog



Des niveaux modérés d’alcool peuvent avoir des effets bénéfiques sur la santé cardiaque, mais peuvent aussi entraîner, chez certains sujets de graves troubles cardiaques. Ces scientifiques de l’Imperial College London révèlent ainsi un nouveau lien entre l'alcool, la santé cardiaque et nos gènes. Ce lien, c’est Titine, un gène déjà documenté comme essentiel à la santé de nos muscles, dont le muscle cardiaque. L’équipe montre, dans le Journal of the American College of Cardiology (JACC) que certaines « versions » défectueuses de Titine sont liées à un type d'insuffisance cardiaque appelée cardiomyopathie dilatée.

La cardiomyopathie dilatée est caractérisée par un muscle du ventricule gauche (ou droit) affaibli et une dilatation de cavité cardiaque ce qui entraîne une réduction de la puissance de contraction du muscle cardiaque. Il en résulte une réduction de la fraction d'éjection ou volume de sang éjecté par le cœur à chaque battement.

Mais qui est donc Titine ? Titine est la plus grande des protéines mais surtout la plus abondante dans le muscle strié et la principale source d'élasticité musculaire. Chaque molécule de titine se compose d'une longue chaîne de faisceaux croisés ressemblant à une corde avec des centaines de nœuds. Titine a toujours été considérée comme une structure passive pour les muscles, mais de récents travaux ont révélé le rôle crucial de titine, celui d'ajuster l'élasticité de chaque muscle de notre corps, de manière à ce qu'il fonctionne ave une performance optimale.

Titine mutée et consommation d’alcool même modérée : les chercheurs de l'Imperial College de Londres, du Royal Brompton Hospital et du MRC London Institute of Medical Science passent ici en revue les versions défectueuses du gène titine, des mutations portées par environ une personne sur 100. Ils montrent que le gène défectueux peut interagir avec l'alcool et accélérer le développement de l'insuffisance cardiaque chez certains patients porteurs de ces versions défectueuses du gène, même s'ils ne boivent que des quantités très modérées d'alcool.

Titine, cardiomyopathie alcoolique et cardiomyopathie dilatée :

  • l’équipe montre ainsi, après évaluation de 141 patients atteints de cardiomyopathie alcoolique que le gène défectueux peut jouer un rôle dans la maladie. Ici, 13,5% des patients portaient la mutation soit une proportion bien plus élevée qu’en population générale. Ces résultats suggèrent que cette condition n'est pas simplement le résultat d'une intoxication alcoolique, mais qu'elle découle d'une prédisposition génétique et que d'autres membres de la famille peuvent donc également être à risque. L'alcool et la génétique interagissent, on le savait mais ici les chercheurs montrent le rôle clé de titine dans cette interaction qui peut mener à l'insuffisance cardiaque.
  • Dans une deuxième phase d’étude, les chercheurs montrent que cette interaction alcool + gènes vaut également pour le développement d’un autre type d'insuffisance cardiaque, la cardiomyopathie dilatée : environ 12% des cas seraient liés à un gène titine défectueux. Ainsi, lorsque l’équipe demande à 716 patients atteints de cardiomyopathie dilatée combien d'alcool ils ont consommé, aucun des participants ne déclare suffisamment d’alcool pour provoquer la cardiopathie. Cependant, chez les patients porteurs d’une mutation de titine, une consommation d'alcool modérément augmentée impacte fortement la capacité de pompage du cœur.

D’autres recherches restent nécessaires pour préciser l’impact de l'alcool chez les porteurs de titine défectueux, mais qui n'ont pas de problèmes cardiaques. « L'alcool et le cœur ont une relation complexe, des niveaux modérés d’alcool peuvent avoir des effets bénéfiques sur la santé cardiaque, mais peuvent aussi entraîner, chez certains sujets de graves troubles cardiaques. Cette recherche suggère que chez les personnes atteintes d'insuffisance cardiaque liée à titine, l'alcool peut aggraver la maladie », conclut le Dr Paul Barton, co-auteur de l’étude.

Source : Journal of the American College of Cardiology 20, May 2018 DOI: 10.1016/j.jacc.2018.03.462 Genetic Etiology for Alcohol-Induced Cardiac Toxicity (Visuel 2 : Cell)

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Équipe de rédaction Santélog Juil 3, 2018Rédaction Santé log