Soleil Gasoil

Par Capocapesdoc
Soleil Gasoil

Sébastien Ménard

Publie.net - La Machine Ronde - 2015

Résumé : Ensemble de textes et d'images (photos d'AnCé t.) réalisés entre 2005 et 2014 sur les routes de l'est.

Les images qu'induit la route, quand on arpente les plaines de l'Est ou que l'on roule en taxi vers Damas dont on ne sait encore que le nom. Les sensations, surtout : la poussière à la traîne des bus, le son des caoutchoucs sur l'asphalte, l'odeur du diesel brûlé. Il y a les bribes de réel saisies à la volée pendant les virées au Maghreb, en Europe de l'Est, au Proche-Orient. Et il y a les cris de violence proférée quand on a dû rentrer bosser et que cette vie nous meure. L'immense force de ce texte, c'est d'arriver à faire lever toute cette matière éparse, à ras le sol, normalement ignorée, et à lui donner forme et éclat. Du gasoil, faire soleil. Soleil gasoil. Le premier livre de Sébastien Ménard, qui écrit en continu sur diafragm.net. Un livre-repère pour une génération et le renouvellement du road book.

Mon avis : J'ai découvert cet auteur lors d'un projet artistique réalisé avec un classe de 5ème en 2016-2017. Les élèves ont bénéficié d'un atelier d'écriture avec Sébastien Ménard, ainsi que d'ateliers de théâtre avec des comédiens.

Les oeuvres de Sébastien parlent de voyage, de vécu, d'émotions et de sensations, de la vie. Et tout cela avec une écriture particulière. C'est du récit, mais aussi de la poésie.

De sont des paysages pris en photos, des scènes de vie racontées, des phrases retraçant les chemins de voyage et de la vie. Un recueil de textes poignant et nous transportant sur les routes de l'est.

Qui vont sur des pistes défoncées Carpates
traversent des campements de fortune
cabanes en plastique feux de camp - la
caisse carcasse elle file torrent de boue
la carlingue elle frotte dans les ornières
pauvre corps tremblé.
Qui s'exclament silencieux béats complets
devant les montagnes du Maramureş
mutilés mutins mes " monstres morts "
- morts pour quelques instants ils
n'existent pas souvent ils ne vivent pas tout
le temps.
Qui debout sur le vent du col de Borşa leurs
yeux même yeux de fantômes - voient les
mendiants gamins assoiffés et marques
ça reste ça stagne - fer plus chaud que
l'horizon éclaté de vert jaune.
Qui cherchent cherchent cherchent les
errants s'imaginent quel réel imbibé quelle
eau fine - et rêvent et rêvent et rêvent mes
errants libres pour quelque temps pour
quelque temps pour quelque temps.
Qui c'était un soir chaud d'août - au milieu
d'un carrefour quoi les chiens errants sous
des lampadaires les vieux fourgons il - un
de mes fantômes - une bière à la main une
torche dans l'autre - s'endort dingue et bec
ouvert la gueule.

39 fantômes, Soleil Gasoil, Sébastien Ménard