Cyberdéfense : un nouvel enjeu de sécurité nationale.

Par Francois155

La guerre, cheminant au côté de l’homme à travers son Histoire, colonise avec lui tous les champs nouveaux, matériels et immatériels, que l’ingéniosité de son géniteur crée ou explore. Sur la terre, évidemment, parfois dessous ; sur les eaux et, là aussi, en dessous ; dans les airs et, sans aucun doute, prochainement dans l’espace, l’homme entraîne avec lui la guerre dans ses explorations de l’environnement qui l’entoure, cette dernière patientant simplement le temps que les progrès techniques, lents ou brusqués, lui en donnent la possibilité. De plus, autre caractéristique intéressante, une fois qu’elle a colonisé ce nouveau domaine de son empire, elle s’y installe pour toujours.

Fort naturellement, le cyberespace, création récente, mais ô combien prometteuse, n’échappe pas à cette loi d’airain. Les technologies de l’information et de la communication (TIC), le stockage et l’échange de données souvent sensibles à tous égards, l’interconnexion globalisée du réseau, l’influence des informations qu’il propage sur les populations et les décideurs, la difficulté technique de retracer l’agresseur une fois l’infraction commise, voilà, sans exhaustivité, des potentialités d’action qui font saliver notre déesse, volontaire et dominatrice.

Le terme couramment usité pour qualifier le cyberespace, « virtuel », semble d’ailleurs assez peu approprié, à la réflexion. On pourrait aisément lui préférer celui « d’immatériel », c'est-à-dire quelque chose qui existe, mais qu’on ne peut toucher physiquement. Lorsqu’on consulte ses comptes sur Internet, on n’a pas, du moins on l’espère, l’impression que cet argent durement gagné est virtuel (dans le sens premier de l’adjectif : qui n’existe qu’à l’état de possibilité…). Dans un registre encore plus intangible, une information multi diffusée sur le Web produira ses effets, bénéfiques ou perturbateurs, dans le monde réel, politique, économique ou autre.

Les possibilités d’action offertes par ce nouvel univers, et à l’intérieur de celui-ci, sont, pour la guerre, innombrables : depuis la simple guerre psychologique et d’influence, en passant par la guerre économique, l’espionnage, le piratage et le trucage des données, la paralysie de certains systèmes clés, voire même, cas extrême, la destruction pure et simple de tout le réseau adverse par l’emploi d’armes à impulsions électromagnétiques.

D’ores et déjà, certains pays se sont essayés à des cyberattaques, parfaites expressions de l’extension de la guerre dans des domaines « hors limites » : les plus connues ont visé l’Estonie, celles-ci ressemblant autant à une opération punitive qu’à un exercice grandeur nature censé valider et améliorer le concept ; sans oublier ce qu’il convient d’appeler les « attaques chinoises » du printemps 2007, à savoir l’envoi de courriers électroniques piégés à certains hauts responsables gouvernementaux dans des pays sélectionnés, dont la France.

La nécessité de se doter d’une cyberdéfense efficace est donc aujourd’hui plus indispensable que jamais, d’autant que la surprise stratégique qui nous touchera s’accompagnera très vraisemblablement d’une offensive massive contre nos systèmes informatiques. Du reste, sans aller jusque-là, on peut également imaginer des opérations de déstabilisation psychologique et de guerre de l’information par le truchement de site apparemment légitimes, mais qui diffuseraient insidieusement des nouvelles destinées à miner le moral du pays visé, des insinuations contre des entreprises stratégiques, des rumeurs contre les dirigeants politiques, etc.

Le récent Livre Blanc, d’ailleurs, ne méconnaît pas cette menace puisqu’il préconise la création d’une Agence de la sécurité des systèmes d’informations dotées de capacités défensives et offensives.

La Commission des Affaires Étrangères du Sénat a publié un excellent Rapport sur ces questions, rédigé par Roger Romani et intitulé « Cyberdéfense, un nouvel enjeu de sécurité nationale ». Clair, didactique et exhaustif, il revient intelligemment sur le sujet, enrichissant ainsi les pistes déjà fournies par le Livre Blanc.

Bien sûr, reste la question cruciale après la lecture de cet exposé passionnant : les moyens, expressions concrètes d’une volonté affichée, suivront-ils ?

VOIR LA PAGE D’ACCUEIL DU RAPPORT.

CONSULTER LE RAPPORT AU FORMAT PDF.