CITYTRIP : São Paulo – Brésil

Publié le 19 septembre 2019 par Misteremma @misteremma

Il est 4h42 lorsque mon avion Latam Airlines atterrit avec une heure d'avance sur le tarmac de l'aéroport de São Paulo (Brésil).

Je viens d'Orlando, ville aseptisée par la baguette magique de Mickey où les habitant.e.s vivent leur vie de Desperate Housewifes dans des " community ". Tout est propre, rangé, coloré, poli. Imaginez le coup de poing en arrivant dans une des villes les plus populeuses du monde.

Mes amis m'avaient prévenu : c'est une ville dangereuse ! " Ne sors pas ton téléphone en rue, tu vas te le faire piquer ! " . La parano m'envahit.

Mes amis m'avait également parlé des nombreuses institutions culturelles et de la riche tradition architecturale : " tu vas voir, toi qui aime l'architecture, cette ville est dingu e ". Sur le trajet de l'aéroport jusqu'à la rue Frei Caneca où se situe mon hôtel, je n'ai vu qu'un amoncellement de bâtiments plus laids les uns que les autres. La ville est plutôt sale et grouillante. Un embouteillage incessant nous accompagne sur le parcours. Depuis la vitre de mon Uber, la ville n'a pas l'air plus dangereux que Paris. Les gens sont là à l'arrêt de bus, ils marchent dans la rue, ils prennent le métro, ils semblent vivre normalement. Dans cette masse de gens bigarrés, il y a de nombreux SDF qui dorment dans la rue comme partout ailleurs. enfin presque... car ici, il y a comme un " + trash " qu'ailleurs. A moitié nus et sales, les pauvres errent dans la rue en faisant les poubelles et en mendiant. Vous buvez un apérol Spritz à la terrasse d'un café bobo et juste derrière votre chaise dort un type dans un sac poubelle. Personne ne s'en étonne. C'est le quotidien normal des mondes qui se croisent dans la mégalopole.

Puis il y a les fous. Ils sont partout. Je ne sais pas comment ils en sont arrivés là, je dirais que ce sont des SDF qui sont devenus fous. Je ne sais pas si ils sont dangereux mais ils dégoutent. Chacun tourne son regard pour ne pas les voir et surtout pour ne pas se faire accoster car le fou aime te parler.

Cette mixité de population se retrouve partout. A la rue Frei Caneca, quartier gay de São Paulo, un samedi soir : le carrefour avec la rue Peixoto Gomide est rempli de monde. La jeunesse est bien présente. Elle rit, elle boit, elle s'embrasse, elle se maquille, elle fait des selfies. Soudain, un type avec de long cheveux verts court après un autre gars. On suppose un vol de portable. Deux policiers les poursuivent. Arrivé en haut de la rue, le type aux cheveux verts rattrape le voleur. Les policiers arrêtent le voleurs et redescendent la rue avec lui. La population crie et applaudit l'arrestation, puis retourne à son amusement. Le voleur quant à lui est plaqué contre le mur, jambes écartées. Armés d'une mitraillette, les policiers me font penser à nos militaires plus qu'à des policiers. Ils procèderont à d'autres arrestations durant l'heure à laquelle j'étais présent, tout ça à côté de cette foule désinhibée, décomplexée et libre.

Alors, j'ai été voir cette richesse architecturale : le CESC 24 de Maio qui vient d'être restauré en 2017 par l'architecte Paulo Mendes da Rocha et le bureau MMBB. En fouillant sur Google, vous trouverez une vue magnifique d'une vaste piscine qui fait rêver. Du coup, je m'attends à un bâtiment incroyable au bout d'une longue avenue, avec un superbe dégagement. A l'arrivée, un building de 13 étages écrasé par ses voisins dans lequel les architectes ont empilé le riche programme du centre culturel. Sur le toit, une piscine à ciel ouvert dont le " jardin " se retrouve au 11ème étage avec une pataugeoire pour les plus petits. Une rampe vous entraîne dans une déambulation à travers les différentes fonctions dont le point de départ est un théâtre en sous-sol.

Le bâtiment accueille à l'heure actuelle la biennale d'architecture dont le gros du programme est placé au CCSP (Centro Cultural São Paulo). Imaginé par les architectes Eurico Prado Lopes et Luiz Telles dans les années 70, le bâtiment est un dédale de couloirs, de passerelles, de lieux d'exposition, de danses urbaines, de repos, de flânerie, de conférences, etc.

Nous parlons avec Éva le Roi, l'artiste - architecte franco-belge a été sélectionnée par la biennale pour présenter son projet " Alternative Insights: 5 stories of sao paulo " . Son projet propose une vision narrative de cinq situations particulières de la ville de São Paulo au travers de 5 illustrations à l'encre sur papier.

Parti à la rencontre de Paulo Mendes da Rocha, architecte moderniste ayant reçu le Prix Mies van der Rohe (2000) et le Prix Pritzker (2006), j'ai été visiter le Musée brésilien de la sculpture à São Paulo ( MuBE, Museu Brasileiro de Escultura) et la magnifique rénovation du musée Pinacoteca (1905, rénovée de 1993 à 1998) qui se trouve en face de la gare de Luz, rénovée également par l'architecte (architecte d'origine : Charles Henry Driver - 1867).

En 1967, Monsieur Masetti commande la construction d'une maison à Paulo Mendes da Rocha pour lui et ses 3 enfants. Le Brésil est en pleine dictature militaire instaurée le 31 mars 1964 à la suite du coup d'État mené par le maréchal Castelo Branco. Avec la Casa Masetti, l'architecte pose un acte politique, un manifeste contre la bourgeoisie. Il prend la vue que lui offre la vallée pour imaginé le dessin de cette maison en béton et construit un seul niveau qu'il pose sur 4 piliers. L'intérieur est composé de 4 chambres ayant chacune sa salle de bain et d'une grande pièce principale. La cuisine est séparée par un mur en béton qui ne continue pas jusqu'au plafond afin de garder une liaison avec le reste de l'espace. Paulo Mendes da Rocha travaille avec une fenestration zénithale pour apporter de la lumière en profondeur dans chaque pièce de la maison.

Lina Bo Bardi est la seconde architecte brésilienne dont je voulais absolument découvrir le travail. Nous avons démarré par le SESC Pompeia. Une merveille d'architecture moderne inaugurée en 1982.

De Lina Bo Bardi, São Paulo regorge d'autres bâtiments remarquables comme le MASP (1947) ou encore la Casa de Vidro (1951).

Voir São Paulo en prenant de la hauteur, c'est possible notamment depuis le bâtiment Edifício Copan (architectes : Oscar Niemeyer, Carlos Lemos). Des visites gratuites sont prévues à 10h30 et 15h. A quelques mètres de là, l' Edifício Itália vous accueille au 41ème étage pour 30 reals (un verre est offert avec la vue). Les horaires sont plus étendus et vous pourrez admirer la coucher de soleil jusqu'à 19h.

Vous ne pouvez pas venir à São Paulo et éviter le poumon vert de la ville : le Parc d' Ibirapuera. Il a été conçu par Roberto Burle Marx en 1954 à l'occasion du 400ème anniversaire de la la ville. Ses bâtiments ont été conçus par l'architecte Oscar Niemeyer.

Nous vous invitons à découvrir nos productions vidéos sur les site archiurbain.be (biennale d'architecture) et caviar.archi (Portrait de l'architecte Paulo Mendes da Rocha - Portrait du bureau d'architecture MMBB - CESC 24 di Maio - Casa Masetti)... à voir très prochainement !