Le Parfum de l’invisible, Manara… pour public averti !

Par Antigone

Lorsque j’étais étudiante, je lisais beaucoup de BD. J’ai découvert alors Hugo Pratt, et tout naturellement ses albums en collaboration avec Milo Manara. Je me souviens combien ses dessins me fascinaient à l’époque et surtout sa manière de croquer les corps. En janvier 2019, lors du Festival d’Angoulême, j’ai eu la chance de pouvoir visiter l’exposition Manara. Elle contenait de nombreuses planches originales. Moi qui voulait devenir dessinatrice BD quand j’étais collégienne, et qui vit dans une famille qui dessine, c’était une occasion fabuleuse de voir comment le travail a été fait, les corrections surtout, et le trait. J’ai adoré cette exposition. La plupart des planches étaient soft, un coin sous rideau était réservé à celles plus sulfureuses. J’aurais aimé acheter lors de cette visite un album de la collaboration Pratt/Manara. Je suis repartie avec le catalogue de l’exposition (pas encore lu) et cet album non équivoque. Heureusement, Stephie et son Mardi c’est permis me permet d’en parler enfin aujourd’hui. En avant-propos, Milo Manara explique son point de départ et le thème de l’invisibilité utilisé. Intrigué adolescent par sa lecture de L’homme invisible de HG Wells, il a voulu montrer combien ce pouvoir était une chance plutôt qu’une malédiction. Il cite aussi le film Parfum de femme de Dina Risi et le roman Les ténèbres et le miel de Giovani Arpina. Et puis il se moque un peu de nous et de lui même, en concluant…

« Je ne sais pas si ces savantes citations ont réussi à élever le ton de mon histoire mais je dois confesser que, malgré les nombreuses années écoulées, dans un petit coin de ma tête si peu adulte, je continue à percevoir l’invisibilité comme une chance extraordinaire qui rend la vie beaucoup, beaucoup plus drôle. » 

Et voilà qui donne vraiment le ton de cet album qui contient deux histoires (sur le thème de l’invisibilité donc), à la fois loufoques et érotiques. Je dois dire que j’ai été un peu déçue du manque de subtilité dont je gardais un souvenir (erroné ?) de mes lectures des albums en collaboration avec Hugo Pratt. Mais l’humour est bien au rendez-vous, ainsi que le merveilleux talent de dessinateur de Manara. Dommage donc que le scénario des deux histoires soit un peu trop léger, l’occasion surtout de scènes érotiques, qui (à mon avis) sont elles par contre plutôt réussies.
Dans la première partie, nous rencontrons un docteur en physique, ayant découvert une pommade (parfum caramel) capable de le rendre invisible. Amoureux d’une danseuse, Béatrice, il se sert de se subterfuge pour l’approcher. Mais c’est en fait une autre jeune femme qui découvre son existence. Après de nombreux rebondissements invraisemblables, les voici devenus très proches.
Dans la deuxième partie, c’est une autre jeune femme qui va cette fois-ci à la rencontre du professeur ayant découvert le processus d’invisibilité. Elle le menace afin de découvrir son secret, déterminée à utiliser ce procédé pour braquer une banque. Rien ne va se passer comme prévu, et de situations loufoques en scènes burlesques, les deux personnages vont également finir par se retrouver très proches.

La planche photographiée ci-dessous est une des rares publiables sur mon blog. Les corps sont en général nus et dans des positions plus érotiques que vraiment sensuelles. Manara exploite le fantasme de l’invisibilité sous de nombreuses facettes. Il donne aussi le pouvoir aux femmes, qui même si elles sont conscientes du désir masculin n’oublient pas de garder le contrôle. Malgré mes gros bémols, je ne regrette pas cette lecture qui m’a donné pour le coup envie de me plonger enfin dans le catalogue de l’exposition, délaissé sur ma PAL depuis janvier.

Editions Glénat – septembre 2010

J’ai aimé ce livre, un peu, beaucoup…    

Lu dans le cadre du Premier mardi c’est permis chez Stephie