Marine Le Pen présidente - 662ème semaine politique

Publié le 19 janvier 2020 par Juan

Elle s'y prend tôt. Elle fut tellement dangereuse et ridicule la dernière fois, en 2017. Qui a oublié cet incroyable débat de deuxième tour où l'on "découvrait" que la présidente du Rassemblement National ? Pour 2022, ça ira mieux. Macron a préparé le terrain.


Pendant des mois, des années avant cette élection présidentielle de 2017, la Blonde Immonde a fait la une des sondages, des journaux, des magazines, des débats politiques. On nous a effrayé l'électorat, on a multiplié les sondages pour promettre ce second tour qui arriva... de justesse. Car le score, sans qu'il ne s'agisse de contester sa validité, fut serré entre quatre candidats, un résultat aussi incroyable qu'inhabituel sous cette Vème République. On connaît la suite, si prévisible: n'importe quel castor pouvait gagner contre l'un des plus incompétentes et dangereuses figures politiques du pays de la décennie. Marine Le Pen est un épouvantail facile: elle est grossière, elle ne maitrise pas ses dossiers, elle est facilement et régulièrement prise en flagrant délit de mensonges, elle ne délivre aucune empathie.
Pour 2022, Marine s'y prend toujours aussi tôt: "Ma décision a été réfléchie mais elle est prise"
Pour 2022, le terrain est prêt. Marine Le Pen peut être présidente.
Les esprits sont prêts: effrayée par les réactions sociales successive à ses agressions conservatrices, la Macronie a progressivement durci sa réplique, pour tomber dans ce qui s'appelle de la répression politique.
Sur le plan légal, l’État de droit a bien changé. Il est prêt pour Marine. La Macronie a encore assoupli le cadre légal si bien qu'on se demande ce qui restera à faire à Marine Le Pen une fois au pouvoir. En France, en 2020, vous pouvez être arrêté, fouillé, perquisitionné, empêché de manifester, assigné à résidence, emprisonné plusieurs jours, espionné sans contrôle d'une justice indépendante. L'arsenal antiterroriste est d'abord utilisé contre des opposants politiques - des écolos, des étudiants, des Gilets Jaunes, des retraités, des journalistes de terrain, des grévistes. La loi asile de Macron a été applaudi par l'extrême droite. Macron a réactivé le débat sur l'identité nationale et l'immigration musulmane qu'affectionne les furibards xénophobes.
Sur le plan démocratique, la Macronie ne s'émeut pas que les forces de l'ordre sèment le désordre dans les consciences au nom de la protection du clan présidentiel. Le  gouvernement a lâché la bride des forces de l'ordre (« Allez-y franchement, n’hésitez pas à percuter. Ça fera réfléchir les suivants ») pour faire peur. Il tait les violences policières. Il s'offusque qu'on en parle. Pourquoi l'électorat présidentiel serait-il ému plus tard quand Marine Le Pen fera de même une fois élue ?
Quand un journaliste signale sa présence dans un théâtre, Macron le fait arrêter par la police à la sortie du spectacle sur un prétexte fallacieux mais qui a l'apparence du droit. Et Macron reçoit même le soutien de Marine Le Pen qui condamne... les manifestants.
La Macronie manipule les institutions: pour le scrutin européen (mai 2019), la Macronie cache son programme jusqu'à 4 semaines avant le scrutin. Beau respect du débat. Pour le scrutin municipal (mars 2020), le ministère de l'intérieur supprime l'enregistrement de l'appartenance politique des futurs candidats dans les communes de moins de 9000 habitants. La manœuvre est grossière. Il s'agit d'éviter de faire apparaître le réel score des macronistes dans le pays.
Sur le plan judiciaire, les droits des citoyens sont bafoués sans que la justice ne s'en saisisse ni ne s'en émeuve. Ainsi sur les violences policières contre des civils, filmées chaque semaine depuis bientôt deux ans, n'ont débouché que sur quelques enquêtes internes. L'IGPN a blanchit la surutilisation d'armes de guerre. Le gouvernement a commandé de milliers de ces grenades qu'aucune démocraties n'utilise pour le maintien de l'ordre. Il a envoyé des conseillers aider le gouvernement chilien qui applique très bien les consignes de viser les visages quand ses policiers ripostent contre la les manifestants (200 éborgnés en 2 mois !).
Un flic a été condamné pour avoir giflé un Gilet Jaune pourtant impassible. Mais on cherche toujours les coupables des arrachages de mains, des tirs à vue, des coups sur des civils à terre. Les policiers, casqués et masqués pour éviter qu'on ne les reconnaisse, masquent aussi leur numéro d'identification.
Ce silence de la justice sur les violences policières, cette absence de poursuites, les enquêtes si partiales qu'elles en deviennent risibles sur des abus de droits pourtant filmés ne choqueront aucun macroniste demain quand Marine Le Pen sera présidente. A l'inverse, la justice sait être rapide pour condamner des civils. Près de 400 Gilets Jaunes ont déjà été condamnés à de la prison ferme. D'un côté le clan macroniste met sur un pied d'égalité la violence des manifestants et des forces de l'ordre, de l'autre, il sanctionne la première avec rapidité et laisse faire la seconde.
Qui écoutera les castors macronistes donner des leçons contre le danger Le Pen  ? 
On est tout aussi impatient d'entendre le clan macroniste donner des leçons de moralité publique aux corrompus neo-fascistes: barbouzeries à l'Elysée (Benalla), trafic d'influence (Ferrand) , conflits d'intérêts (Delevoye), influences des lobbies (qui heurte jusqu'au Conseil de l'Europe), mises en examen (Modem), utilisation des biens de l'Etat à des fins privées (la piscine, le jet, etc), la Macronie présente tout l'éventail de ce l'inexemplarité en un temps si record - le mouvement fête à peine ses 4 bougies.

L'image que donne notre police dans l'exercice du maintien de l'ordre est désormais celle d'un Etat autocratique. Quand Marine Le Pen sera présidente, Christophe Castaner et Nicole Belloubet pourront rester en poste. On dirait même qu'ils s'y préparent tous les deux. Le 18 janvier 2020, le premier n'a toujours vu ni policier ni gendarme attaquer des manifestants autrement que lorsqu'ils étaient "acculés". La Macronie a légitimé toutes les outrances, toutes les atteintes aux droits de l'homme que l'on est en droit de craindre de l'extrême droite, toutes les amalgames qui abiment la République.
Sans rire.
Marine Le Pen a d'autres atouts pour sa campagne présidentielle.
Macron procède des mêmes outrances verbales pour requalifier la réalité à son avantage. Quand quelques opposants à réforme des retraites s'introduisent dans les locaux de la CFDT qui vient de s'accorder avec la Macronie, Macron requalifie la chose en "violences" ("Ces violences sont une honte pour notre démocratie" - Emmanuel Macron, cité par l'AFP), et aussitôt toutes la Macronie et la droite toute entière renchérissent. Les vidéos et les témoignages offrent pourtant une toute autre réalité, l'entrée calme et sans cri des "envahisseurs".
Macron endort aussi le débat politique. Il cherche à vider la politique de tout enjeu grâce à l'emploi d'une novlangue, avec sa "rhétorique perverse", son "vocabulaire travesti", la Macronie renomme la réalité et les conflits. L'objectif est de convaincre les convaincus qu'ils ne se sont pas trompés, et d'endormir les autres. C'est une différence notable avec l'hystérisation verbale d'un Trump: Macron comme Trump trahi les faits avec les mots; comme Trump il désigne ses adversaires politiques avec le vocabulaire habituellement réservé aux criminels (grévistes/preneurs d'otages) ou aux terroristes (syndicalistes "radicalisés", gauche "radicalisée", opposition "radicalisée", etc). Il le fait souvent avec le même mépris oratoire, mais à la différence de Trump il s'est pour l'instant abstenu de cette hystérie du Clown dangereux de la Maison Blanche.
Vider la politique de son sens permet de décourager les citoyens les moins motivés. A l'inverse de Mélenchon, Ruffin et autres insoumis qui consacrent l'essentiel de leur énergie citoyenne et l'intégralité de leur (faible) temps de parole publique à faire une pédagogie détaillée des évènements (cf. les 2heures de conférence sur les retraites à Amiens le 16 janvier), 
Macron a perdu sa gauche. Face à Le Pen, le nouveau président des riches aura peine à rassembler plus loin que le cœur de droite qui constitue aujourd'hui, selon tous les sondages depuis un an, le socle majoritaire de sa (faible) popularité. Le jeune monarque a trahi sa gauche avec toutes ces lois qu'on ne compte plus.
Le face à face promis du  avec l'héritière de Montretout aurait été cette fois-ci le duel Sarkozy/Le Pen que la République n'a jamais eu. En 2017, on a fait fait croire à l'électorat que le qualifié de justesse serait le barrage de tous et le champion de chacun. Il a fait la politique de Sarko, en pire.
En 2022, on s'en souviendra.
Ami castor, t'en souviendras-tu ?

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