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Publié le 19 juillet 2008 par Raymond Viger

Le sens du nain Catherine Boisclair

(Agence Science-Presse) - Si les archéologues étudient les usages d’artefacts millésimes enfouis dans le sol, l’ethnologue Jocelyn Gadbois, lui, a creusé l’Internet pour répertorier les sens donnés à un objet contemporain à l’apparence insignifiante : le nain de jardin.

Son sujet de maîtrise « original et pertinent » a valu à l’étudiant de l’Université Laval une bourse du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH). Il annonce la publication prochaine d’un livre accompagné d’une tournée de conférences dans l’Hexagone. Un engouement plutôt étonnant pour un sujet de recherche d’abord exploré à la blague par son auteur.

« Oui, c’est quétaine le nain de jardin, mais ce n’est pas que ça! », clame Jocelyn. Sur Internet, il découvre une multitude de sites dédiés au petit bonhomme. « C’est tout un univers de sens qui s’ouvrait! », relate l’ethnologue. Bouc-émissaire et objet d’insultes, mais aussi objet de bonheur et de liberté, le nain se prête à n’importe quel discours malgré sa totale inutilité, ou peut-être grâce à elle, conçoit l’étudiant.

Le Front de libération des nains de jardin (FLNJ) accuse les propriétaires d’esclavagisme potager et encourage les internautes à faire des Amélie Poulain d’eux-mêmes. Le kidnapping libérateur, souvent perpétré par des adolescents, représente aux yeux du chercheur « une fugue métaphorique » et un geste « très revendicateur d’une identité naissante ». Jocelyn Gadbois établit aussi un lien entre la mobilité du nain de jardin et la mobilité sociale, problème de l’heure en France.

Son travail connaît des applications partout, se défend le candidat au doctorat, qui étudie les significations du billet de loterie pour sa thèse. « Les psychologues problématisent (sic) toujours la loterie de la même façon », se désole M. Gadbois, alors que pour lui, il importe d’explorer les sens accordés au billet pour mieux saisir le problème de la dépendance au jeu. Le CRSH lui a accordé une fois de plus une bourse, de 105 000 $ cette fois-ci.

Multitude de sens dans l’art
L’artiste Paryse Martin voit aussi plus que du kitch dans le nain de jardin. La chargée de cours en arts à l’Université Laval crée des exemplaires de cette créature fantastique. À ses yeux, le nain est important dans « le rapport à l’imaginaire, il nous donne des réponses sur l’inexplicable », comme la science peut le faire à sa façon, soutient-elle.

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