Ce qu'enseigne l'histoire des maladies infectieuses

Publié le 28 mars 2020 par Francisrichard @francisrichard

L'histoire des maladies infectieuses montre comment peu à peu les hommes ont trouvé des remèdes pour les traiter en refusant la pensée magico-religieuse, qui est un leurre et n'a évidemment aucun effet sur elles.

La quarantaine

Au moment de la Peste Noire (1347-1351), les remèdes, inspirés de croyances, affaiblissent les organismes plutôt qu'autre chose, d'autant que l'origine de cette peste principalement bubonique reste inconnue.

A défaut, des mesures préventives sont donc prises. Les premières mises en quarantaine apparaissent en 1377. La mortalité n'en reste pas moins très élevée. Seuls 50 à 70% des populations de l'époque survivent.

Le médecin des papes, Guy de Chauliac, contracte la maladie en soignant des malades. Comme il pratique la chirurgie (auparavant l'apanage des barbiers), il en réchappe en incisant lui-même ses bubons...

Ce n'est que plus de cinq siècles plus tard, en 1894, que le bacille de la maladie, qui est transmise à l'homme par des puces de rongeurs, notamment les rats, est enfin découvert par le pasteurien Alexandre Yersin.

La peste, sous ses formes bubonique et pulmonaire, est aujourd'hui traitée par des antibiotiques, tels que la streptomycine, les tétracyclines et les fluoroquinolones, qui ne sont efficaces que si elles sont administrées à temps.

Les antibiotiques

En 1928, Alexandre Fleming constate, à la suite de la contamination fortuite d'une culture, que la levure connue sous le nom de penicillium notatum empêche la croissance de certains microbes virulents.

A partir de cette découverte, il faut attendre 1940 pour que Howard Florey et Ernst Boris Chain réussissent à isoler la substance responsable, la pénicilline, mais en toute petite quantité, pas plus de 100 mg.

C'est aux États-Unis que la production industrielle de pénicilline se développe dès 1942 à partir d'une autre levure, le penicillium chrysogenum, qui en produit deux cent fois plus que celle découverte par Fleming.

Selman Waksman isole l'actinomycine en 1940 et la streptomycine en 1943, qui est le premier antibiotique efficace contre le bacille responsable de la tuberculose, découvert par Robert Koch en 1882.

La tuberculose, transmise par voie aérienne, est l'une des premières causes de mortalité dans le monde. Les tuberculoses multirésistantes sont traitées par une association de plusieurs antibiotiques.  

Depuis 1945, nombre d'antibiotiques ont été découverts, produits industriellement et commercialisés, et permettent ainsi de lutter contre de telles maladies infectieuses multirésistantes aux antibiotiques usuels.   

Les vaccins

La variole est considérée comme éradiquée depuis 1980, grâce à la vaccination (le mot vient de vaccine). Celle-ci a pu être mise en oeuvre grâce à un médecin anglais, Edward Jenner, à la fin du XVIIIe siècle.

Jenner a constaté que les vachers qui ont subi les atteintes de la vaccine, la variole des bovidés, maladie bénigne pour les hommes, sont immunisés contre la variole des hommes, maladie grave pour eux.

Il préconise une vaccination généralisée par transmission du matériel infectieux de la vaccine à l'homme, alors que jusque-là elle était faite par variolisation, c'est-à-dire par contamination par une variole peu virulente.

La variole, apparue en Asie il y a 3000 ans, fut transmise en Europe, puis propagée par les colonisations. Jusque dans les années 1950, près de 50 millions de cas étaient enregistrés chaque année dans le monde.

La vaccination permet donc d'enrayer une maladie. Un autre exemple, celui de la poliomyélite, le prouve. Avant l'ère vaccinale, dans les années 1950, cette maladie touchait 600'000 enfants par an dans le monde.

Le lavage des mains

Au milieu du XIXe siècle, un médecin hongrois, Ignác Fülöp Semmelweis, travaille dans une clinique obstétricale de Vienne. Il constate que la fièvre puerpérale est plus fréquente dans une salle que dans une autre. 

Dans l'une, les accouchées sont examinées par les médecins et les étudiants et, dans l'autre, elles sont surveillées par une sage-femme. Il observe que les étudiants se rendent directement de la salle d'autopsie à la clinique.

Semmelveis acquiert la conviction que les étudiants communiquent ainsi du matériel pathogène. En les obligeant à se laver les mains dans une solution chlorée, il fait considérablement baisser la proportion de cas mortels.

Les idées de Semmelveis déplaisent à ses collègues qui obtiennent son congédiement. De retour à Budapest, il n'a guère plus de succès auprès du corps médical. Et il termine ses jours dans un asile d'aliénés...

Conclusion

Ces exemples montrent que les succès de la science médicale sont relativement récents et que rien n'est jamais définitif. Jean Starobinski en 1963 disait: Si la maladie est aussi vieille que la vie, la médecine est une science jeune. Ses propos restent d'actualité.

L'Histoire nous apprend qu'en matière de maladies infectieuses, le génie humain, personnifié souvent par des figures hors normes, se caractérise par:

- une observation intelligente des faits,

- une adaptation aux circonstances,

- une mise en oeuvre rapide des solutions quand elles émergent.

Bref, le principe de précaution, basé sur des risques hypothétiques, non confirmés, n'est pas de mise en la matière, non seulement quand il y a urgence, mais de manière générale, parce qu'il paralyse toutes initiatives qui pourraient être bénéfiques.

Francis Richard