L'année de grâce de Kim Liggett

Publié le 06 décembre 2020 par Lael69

Kim Liggett

Casterman

Traduit de l'anglais par Nathalie Peronny

Octobre 2020

528 pages / 19,90 euros

Young Adult dès 13 ans

Thèmes : Féminisme, Dystopie, Violence

Quatrième de couverture :  « Personne ne parle de l'année de grâce. C'est interdit. Nous aurions soi-disant le pouvoir d'attirer les hommes et de rendre les épouses folles de jalousie. Notre peau dégagerait l'essence pure de la jeune fille, de la femme en devenir. C'est pourquoi nous sommes bannies l'année de nos seize ans : notre magie doit se dissiper dans la nature afin que nous puissions réintégrer la communauté. Pourtant, je ne me sens pas magique. Ni puissante. » Un an d'exil en forêt. Un an d'épreuves. On ne revient pas indemne de l'année de grâce. Si on en revient.

Je suis ressortie de cette lecture avec la nette impression d'avoir loupé la très forte impression qu'il a laissé sur bon nombre de lecteurs qui l'ont adoré. Je ressors beaucoup plus déroutée et partagée par cette histoire d'une grande violence et cruauté. Si le roman se veut féministe et engagé c'est parce qu'il place son héroïne au coeur d'une société arriérée et patriarcale. On découvre ainsi une société dominée par les hommes, pleine de violence et d'injustice, dans laquelle les femmes n'ont aucune liberté. A l'âge de 16 ans, les jeunes filles doivent partir une année en forêt, comme un rite d'initiation pour éliminer leur magie qui envoûteraient les hommes et rendraient jalouses les femmes. Certaines d'entre elles sont choisies par les hommes pour devenir leurs épouses à leur retour, les autres qui ne sont pas choisies devront travailler. Et cette société ressemble étrangement aux moeurs douteuses du Moyen-Age et avant toute époque d'émancipation des femmes. Par contre je n'y ai rien vu de très actuel dans l'univers si ce n'est le côté religieux et extrémiste qui dénigre les femmes et les rendent victimes de pensées arriérées.

On va découvrir ce monde avec Tierney, l'héroïne qui petit à petit va distiller une envie de révolution et de solidarité dans cette société. Enfin elle va essayer parce qu'elle va être choisie contre toute attente et devoir survivre dans la forêt. Et ce rite de passage est cru, violent, aliénant, et la plupart des jeunes filles ne reviennent pas vivantes. Et pour cause c'est une véritable boucherie, elles s'entretuent, sont cruelles entre elles, se tendent des pièges. C'est vraiment tordu et bizarre, à la limite de la folie. Au final Tierney s'en sort en tombant amoureuse d'un braconnier Riker (un clan de la forêt qui kidnappe les filles qui font leur année de grâce et font le commerce de leurs organes). Elle tombe amoureuse. Mouais... un peu facile non pour une héroïne qui à la base refuse le mariage et d'être asservie à un homme !

Et oui, je n'ai pas trop compris pourquoi dans un roman qui se dit féministe et prône l'indépendance des femmes, met en scène une histoire d'amour romantique, où l'homme se positionne en sauveur de Tierney (car c'est quand même grâce à lui qu'elle reste en vie)... Je reste sceptique d'avoir valorisé une telle position dans ce type de romans. Me direz-vous cela rajoute un peu d'espoir et de douceur dans cette brutalité qui plus d'une fois m'a fait tiqué ! Et oui les épisodes dans la forêt font penser à Hunger Games mais ce n'est pas du tout pareil, c'est beaucoup moins addictif ici. C'est plus lent.

La fin est dans la lignée de cette histoire d'amour et elle se veut être un brillant hymne à la vie pour montrer que le combat de Tierney n'était pas vain et c'est touchant. L'histoire est sombre et déroutante tout le long. J'ai néanmoins beaucoup aimé l'écriture immersive, rythmée au fil des saisons de Kim Liggett, mais ça reste glauque et tranchant. Au final je suis bien incapable de vous dire si j'ai aimé ce roman qui pour moi a été plébiscité au rang des grands romans féministes alors qu'il s'inscrit plutôt dans la catégorie des survival horror. Et me voilà bien embêtée car je pensais que ça allait être un coup de coeur et j'en ressors surprise mais surtout un peu perplexe.