Quatrième de couverture :
Bruxelles, fin des années 1920. Prosper Goffineau, un clerc de notaire casanier et père de famille aimant, se découvre une nouvelle passion pour le football, et plus particulièrement pour le Sporting Club Anderlecht, qu’il ne manque pas d’aller voir dès qu’il le peut. Cette passion chronophage, qui le pousse à délaisser ses devoirs, n’est pas du goût de sa femme Octavie et de sa fille Angélique qui tentent de le ramener à sa routine.
Au rythme de la vie, des matchs, des victoires et des défaites, Prosper vivra joies et peines, soucis personnels et dilemmes de supporter, de mari et de père. Un roman d’addiction humoristique et tragique, sur fond de satire sociale.
En Belgique, la première phase du championnat de division 1A a pris fin le dimanche 18 avril, classant les équipes soit pour poursuivre la compétition et déterminer quel club sera champion de Belgique, quels clubs joueront l’année prochaine les différents championnats d’Europe et hélas, quel club doit descendre en division inférieure. Tout cela a fait vibrer les supporters belges, malgré l’interdiction d’assister physiquement aux matches, et je ne suis pas mécontente de savoir qu’au terme d’une saison tumultueuse, le RSC Anderlecht jouera les play-off 1.
Toute cette vibration, cette excitation, voilà ce que découvre Prosper Goffineau, un petit-bourgeois clerc de notaire, dans ce premier roman de Maurice Carême (eh oui, il n’a pas écrit que de la poésie), qui date de 1928. A cette époque, Anderlecht, fondé en 1908, n’est pas encore un grand club, il peine à se maintenir en division d’honneur et c’est cela que Carême (qui fut instituteur à Anderlecht à partir de 1918) donne à voir : les hauts et les bas de l’équipe font les joies et les peines d’un supporter qui, ayant découvert les joies du stade le dimanche après-midi, s’adonne à sa passion comme à une drogue. Initié par ses camarades supporters, Goffineau deviendra le meneur de son groupe. Il faut dire que les joies et même les douleurs du foot le changent de son univers domestique : sa femme Octavie, une vraie pisse-vinaigre, lui tient la dragée haute et sa fille Angélique, une coquette souffreteuse, ne rêve qu’à des romances éthérées. Octavie va très mal supporter (mauvais jeu de mots, désolée) la nouvelle passion de son mari et le quittera. Le roman a une portée morale puisque la débandade du couple ira de pair avec les difficultés du club d’Anderlecht jusqu’à la fin de la saison…
Comme conclut Denis Saint-Amand dans la postface, « L’oeuvre, aujourd’hui, ne peut avoir la portée moralisatrice que lui conférait le chroniqueur de L’Impartial au moment de sa sortie : instruire le lectorat sur les dangers du football ne participe pas des enjeux de sa réédition. Donner au lecteur un témoignage d’époque sur la représentation du football, sur les valeurs et les mœurs de la petite-bourgeoisie, à travers le regard encore jeune d’un auteur appelé à devenir « Prince en poésie », semble constituer un objectif plus probant.«
Je n’ai pu m’empêcher de penser à la célèbre pièce Bossemans et Coppenolle, qui met en scène deux amis mais supporters chacun d’un club bruxellois différent, mais la pièce date de 1938. Maurice Carême a été inspiré par le foot dès 1928.
« Philivert, doctoral, lui rappela aussitôt l’un des dix commandements du supporter :
« Si vous trouvez que l’arbitre ne vaut rien, consolez-vous : dans l’autre camp, on en pense tout autant, et comme deux négations font une affirmation, il est possible que l’arbitre s’acquitte en réalité très bien de ses fonctions. » »
« Seul des trois scribes de son bureau, il avait résisté à la passion du football. Mais la chaleur avec laquelle ses collègues établissaient des pronostics pour les matches et les discussions passionnées bruissant chaque jour à ses oreilles minaient peu à peu son indifférence envers ce sport. Il s’était demandé si le football − qu’il considérait jadis comme une niaiserie − était à ce point méprisable, puisque des gens intelligents y prenaient intérêt. »
Maurice CAREME, Le Martyre d’un supporter, Espace Nord, 2019 (La Renaissance du livre, 1928)
Le Mois belge 2021 – catégorie Cactus inébranlable (classique) et éditions du Sablon pour Bruxelles
Et c’est un nouveau titre pour ma série sur le football