(Notes sur la création) Claude Minière, Le fondement

Par Florence Trocmé

Fondement

“Was bleibet aber, stiften die Dichter”
Hölderlin, Andenken, 1803

On médite le souvenir de la belle Garonne, des activités sur ses rives, on écrit : « Mais ce qui demeure, le fondent les poètes ».  Peut-on encore nourrir cette assurance ?  Peut-on encore entretenir cette pensée ?  Il faut l’éprouver, j’en fais l’expérience lente en deux temps, trois mouvements :
     1. Le poète fonde ce qui demeure
     2. Le poème fonde le poète
 
Comment cela se fait-il ? 

Le poème n’est pas un résultat, il n’est pas l’addition de ses mots, la somme de ses matériaux.  Avant les lignes, il y avait un espace, une « enveloppe », une tonalité d’ensemble.  Les matériaux seront absorbés dans le poème.  Tant qu’il se développe, le poème honore son enveloppe.
Les choses demeurent parce qu’il y avait au commencement une mise en demeure du poète.  On recueille ce qu’on a semé ?  C’est le contraire : j’ai, au départ, le champ éclos, donné ; je vais chercher les graines.  Il y avait quelque chose avant le poème terminé, et déjà poème, n’est-ce pas ?
Claude Minière