1872 — Une lettre et un photomontage de l'impératrice nue pour faire chanter l'empereur François-Joseph Ier

Publié le 20 septembre 2021 par Luc-Henri Roger @munichandco

La lettre du maître-chanteur
Capture d'écran du documentaire So lebten die Habsburger (II)


Ce dimanche 19 septembre 2021, la chaîne allemande 3Sat diffuse une série de documentaires produits par l'ORF sur les Habsbourgs, disponibles également sur la médiathèque de 3Sat. La deuxième partie du documentaire intitulé So lebten die Habsburger (Ainsi vivaient les Habsbourgs) révèle (à partir de la 20ème minute) la terrible anecdote d'un chantage exercé à l'encontre de l'empereur François-Joseph :

Le 22 décembre 1872, l'empereur ouvre son courrier à la Hofburg et n'en croit pas ses yeux : dans l'enveloppe se trouve une lettre rédigée en français et une photo de toute évidence trafiquée de Sissi nue en train de jouer de la lyre. 
Voici le contenu de la  lettre de chantage adressée à Sa Majesté l'empereur d'Autriche. La transcritption respecte les incorrections orthographiques : " J'ai l'honneur de vous envoyer une photogr[aphie] de votre femme, faisant partie d'une collection de phot. destinée à être vendu partout. Je crois qu'il serait extrêmement désagréable à Sa Majesté de voir ces portraits se vendre et j'ai obtenu du photographe qu'il brisat les négatives la promesse et brûlat les phot. si d'ici à  jours soit le 6 janvier une somme de 3 000 francs [aujourd'hui environ 10 000 euros] est envoyé à l'adresse de M. Cattelli poste restante Amsterdam. Si au contraire la somme n'est pas envoyée ou la moindre démarche est faite pour découvrir l'auteur ou le photographe une quantité de photographies seront lancées en circulation immédiate même dans les rues de Vienne."
La photographie jointe à la lettre montre une femme nue dont les traits sont clairement ceux de l'impératrice. Mais le corps voluptueux et grassouillet ne peut en aucun cas correspondre à la silhouette svelte d'Elisabeth. Toute personne familière avec les photographies de l'impératrice se rend aussitôt compte qu'il ne peut s'agir du corps svelte et sportif de Sissi.

Postituée amstellodamoise jouant de la harpe


L'empereur convoque la direction de la police de Vienne. L'inspecteur en chef Stehling est chargé de l'enquête sur cette affaire. Le dossier de la police indique que la lettre de chantage a été postée à Amsterdam. L'inspecteur Stehling se rend aux Pays-Bas, où il parvient rapidement à clarifier l'affaire. Il découvre que la photo originale provient d'une série de photos de femmes nues vendues par le studio Van Rooswinkel d'Amsterdam. L'enquête parvient rapidement à identifier l'acheteur de photos : il s'agit du marchand de jouets néerlandais Josef J. Kievits, un homme extrêmement endetté. L'analyse graphologique prouve qu'il est l'auteur de la lettre de chantage : l'inspecteur Stehling télégraphie le résultat de son enquête à Vienne en janvier 1873. Le maître chanteur avait placé un portrait de Sissi datant de 1864 sur le corps d'une prostituée et espérait pouvoir utiliser ce faux maladroit scandaleux pour forcer l'empereur d'Autriche à effectuer un paiement.
L'empereur s'abstint cependant de faire un procès pour éviter toute publicité.