La compagnie Mobilo Lyricus ( Marion Jacquemet et Benjamin Pras) au Centre de Congrès de Saint-Quay-Portrieux, le 11 février 2022

Publié le 14 février 2022 par Concerts-Review

La compagnie Mobilo Lyricus ( Marion Jacquemet et Benjamin Pras) au Centre de Congrès de Saint-Quay-Portrieux, le 11 février 2022

michel

Saint-Quay-Portrieux gâte ses résidents ( et ceux des communes voisines), les spectacles ( souvent gratuits) foisonnent et pas uniquement à la belle saison.

Malgré la présence d'un vilain virus, un cadeau chinois dont le monde se serait bien passé, la mairie avait organisé un double concert durant la période de Noël.

Février 2022, on célèbre le carnaval un peu partout sur terre, de Venise à Rio en passant par Nice et Las Tablas, à Saint-Quay, ni masques, plumes ou confetti, mais le spectacle ' Les Vols-au-Vent' proposé par la Compagnie Mobilo Lyricus.

Deux éléments de la troupe ont fait route vers le Centre de Congrès afin d' embarquer les Quinocéens pour une incursion au pays du Bel Canto: la mezzo-soprano Marion Jacquemet et le pianiste Benjamin Pras.

Ce dernier collectionne les lauriers et se débrouille aussi bien dans le domaine de la musique sacrée que dans celui du jazz ou de l'opéra.

Marion fait ses débuts en tant que danseuse, apprend à manier le saxophone, avant de bifurquer vers l'art lyrique et de monter sur scène pour interpréter des rôles dans divers opéras (Cosi fan Tutte, Die Fledermaus, La Grande-duchesse de Gérolstein, Madama Butterfly...e.a.).

Ce soir, le public aura droit à un florilège d'airs célèbres, ou oubliés, prélevés dans le riche répertoire de la colorature.

Coup d'envoi avec un extrait de 'Carmen' de Bizet, "Près des remparts de Séville".

Pas de doutes, Marion n'est ni Zahia, ni Clara Capri, ou autres minettes au chant défeuillé, son timbre, sonore et assuré, déjà impressionne.

Après ce hors-d'oeuvre andalou, la Cecilia Bartoli des Alpes annonce le déroulement du programme: une suite de trois airs datant du 18è siècle: le premier est extrait de "Giulio Cesare" d'Haendel, Marion a opté pour un aria interprété par Sesto, le fils de Jules, ensuite on passe à Mozart avec un extrait de ' Le nozze di Figaro', Cherubino en proie à des émois amoureux psalmodie " Non so più, cosa son, cosa faccio" et enfin, avec Rossini, on accompagne " L'Italiana in Algieri" pour écouter " Cruda Sorte".

Marion tout à son jeu nous gratifie de quelques minauderies et autres espiègleries ayant le don de dérider l'assistance.

Benjamin, concentré, accompagne la belle Isabella, toujours amoureuse de Lindoro, à la perfection.

Exit la mezzo- soprano qui doit reprendre son souffle, c'est parti pour un premier interlude au piano solo, Benjamin a sélectionné un monologue impressionniste composé par Claude Debussy, "L'Isle joyeuse ".

Pour vous qui profitez de la Manche à longueur d'année, il n'est guère difficile d'imaginer un lever de soleil sur la mer. L'amour lui aussi peut se révéler solaire, Debussy était amoureux en 1904.

La belle dame ressurgit et décide d'attaquer la période romantique avec ' Nobles Seigneurs, salut' de Giacomo Meyerbeer, un air, extrait de 'Les Huguenots', exigeant souffle, entrain, énergie et une pointe d'humour.

Le romantisme en France c'est Hector Berlioz,' Premiers transports' est extrait de la symphonie dramatique ' Roméo et Juliette'.

Chers paroissiens, la suivante ne demande aucune présentation.

Effectivement l'assistance a reconnu l'aria 'L'amour est un oiseau rebelle', une des pièces majeures de "Carmen" de Georges Bizet.

La femme fatale , sensuelle et bohème, a ensorcelé le brave homme assis à deux mètres de toi, ta compagne, par contre, n'a pas trop apprécié de l'entendre jouer les secondes voix chevrotantes.

Second solo du pianiste, qui a un faible pour Debussy, il ébauche ' La plus que lente', une valse composée en 1910, qui présente, selon lui , des harmonies qui annoncent le jazz.

Interprétation somptueuse et nouveau retour de Marion Jacquemet pour une suite consacrée aux mélodies françaises.

Gabriel Fauré nous emmène ' Au bord de l'eau', Reynaldo Hahn, lui, nous fait découvrir ' L'heure exquise', c'est le moment où la lune blanche luit dans les bois, les hiboux trouvent ça chouette.

Pour son dernier aparté, le pianiste a décidé d'improviser, comme le faisait Arthur Rubinstein à la fin de chaque récital.

Il me faut un thème et trois notes.

Philomène: les astres!

Malcolm, qui a des problèmes avec l'arithmétique: do mi sol fa !

Tous dans la fusée pour un périple sidéral, homérique et elliptique.

Le 20è siècle, à présent: ' La Pêche à la baleine' de Jacques Prévert et Joseph Kosma, ou la rencontre de Moby Dick et de Gaston Lagaffe.

Loufoque, tu dis, pas plus que la pêche aux moules, mais peut-être plus cruel.

Tu voulais de l'acrobatique, du casse-gueule, t'es servi avec le saugrenu ' Cabaret Voltaire' de Graciane Finzi, d'après le manifeste Dada d'Hugo Ball.

Après cette incursion savante et audacieuse dans le monde de la musique contemporaine iconoclaste, le duo termine par ' Les chemins de l'amour' de Francis Poulenc sur un texte de Jean Anouilh.

Ovation méritée et une friandise cocasse en guise de bis "Ah, que j'aime les militaires" , le rondeau de la Grande- Duchesse, charmée par les hussards, tiré de l'opéra bouffe" La grande Duchesse de Gérolstein" d'Offenbach.

C'est donc sur une note héroïco- comique que prend fin une soirée ayant tenu toutes ses promesses.