Rapport d'information 2006 sur l'enseignement des disciplines scientifiques

Publié le 06 août 2008 par Olivier Leguay

Quelques morceaux choisis du rapport 3061 sur L'enseignement des disciplines scientifiques dans le primaire et le secondaire par la commission des affaires culturelles familiales et sociales:

Par ailleurs, aujourd'hui en France on peut être agrégé de mathématiques ou de physique sans savoir conduire une expérience.

[...] aujourd'hui le bon professeur est celui qui n'entend que les questions auxquelles il peut répondre c'est-à-dire celles qui sont dans le programme.

Le propre d'un chercheur c'est de se tromper mais c'est beaucoup plus difficile pour un enseignant.

[...] l'usage des technologies de l'informatique et d'Internet ne doit pas être au centre de la démarche, c'est un outil qui nécessite que les enseignants soient formés autrement et développent une autre vision de leur métier.

50 % des enseignants ne font jamais de formation continue et, sur le total des 800 000 journées de formation, les sciences ne représentent que 2 %.

M. Michel Fréchet, membre de l'association des professeurs de mathématiques de l'enseignement public, a renchéri en disant que son association a organisé une session de formation à Caen, à laquelle ont participé 800 professeurs, sur leur temps de vacances. La presse, sollicitée, n'a pas répondu à l'invitation, mais le journal Libération a jugé plus utile de consacrer une demi-page à une conférence sur les OVNI qui se tenait dans le même temps.

La situation n'est pas encore catastrophique parce qu'en période de chômage les jeunes recherchent la sécurité dans la fonction publique ; cependant, comme indiqué précédemment, en cinq ans le nombre de candidats aux CAPES de physique-chimie et de mathématiques a diminué significativement.

L'intégration de l'outil informatique aux enseignements de sciences, avec des objectifs pédagogiques précis encadrés par des enseignants bien formés, est totalement indispensable.

À un âge où il serait nécessaire que l'élève découvre, guidé par un professeur, la continuité entre mathématiques, sciences expérimentales et technologies, il est néfaste que se déroulent en parallèle et avec des professeurs différents des programmes qui s'ignorent. L'élève n'a ainsi aucune chance de découvrir que la majorité des problèmes scientifiques se situent et se résolvent aux interfaces de chacune des disciplines enseignées. Outre l'ennui généré par des enseignements cloisonnés et sortis de tout contexte, cette fragmentation s'oppose à la perception par les élèves de l'existence de champs professionnels tels que l'énergie, la chimie et l'environnement, le traitement de l'information et les réseaux, la physique et la climatologie, la géographie et les statistiques...

En 1995, 79 % des bacheliers scientifiques optaient pour des études scientifiques ou technologiques. En 2000, ils n'étaient plus que 68 %. Lors de la dernière rentrée 2000 places de classes préparatoires scientifiques n'ont pas été pourvues.

Évolution des horaires en mathématiques, physique-chimie et SVT depuis 1982


Mathématiques

Physique-chimie

SVT

Première S (1982-1993)

6 heures

5 heures

2,5 heures

Première S (1993-2001)

6 heures

4 heures

3 heures

Première S (depuis 2002)

5 heures

4,5 heures

4 heures

Terminale C (1983-1994)

9 heures

5 heures

2 heures

Terminale D (1983-1994)

6 heures

4,5 heures

5 heures

Terminale S (1994-2002)

6 heures

5 heures

3 heures

Terminale S (depuis 2003)

5,5 heures

5 heures

3,5 heures

En conclusion, il faut insister sur trois points qui contribuent particulièrement à disqualifier les études scientifiques dans notre pays.

Tout d'abord les mathématiques et les sciences exactes jouent un rôle d'outil de sélection dans notre système éducatif. Ce champ de connaissances est investi d'une charge émotionnelle importante et regardé, particulièrement par les filles, comme un enseignement d'élite inaccessible si l'on est simplement moyen. Soit on fait des sciences à un niveau très élevé, soit on n'en fait pas et ce dernier choix est fait par un nombre grandissant d'élèves. Cette situation est corroborée par les résultats obtenus dans les évaluations internationales. Le niveau en mathématiques de l'ensemble des élèves du secondaire français n'est pas supérieur à celui des étudiants des pays comparables. En revanche, un petit noyau d'élèves a des résultats très supérieurs à la moyenne.

En second lieu, les filières scientifiques universitaires pêchent par leur manque absolu de lisibilité. Elles ne peuvent être associées à aucun devenir professionnel perceptible et motivant alors que, de surcroît, elles sont perçues comme arides et sans lien avec les interrogations sur le monde. Dans un univers instable et insécurisant, il faut être particulièrement courageux, voire héroïque, pour s'aventurer dans ce labyrinthe.

Enfin, il faut anticiper la pénurie probable d'ici quelques années de candidats aux concours de recrutement d'enseignants du secondaire dans les disciplines scientifiques, cette pénurie découlant directement de la désaffection des jeunes pour les études universitaires en mathématiques et en sciences de la nature. C'est pourquoi la mission considère qu'il faut envoyer un message fort aux bacheliers et aux étudiants, sous forme d'un prérecrutement, de nature à transformer l'image des études universitaires scientifiques longues.

SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS POUR LE LYCÉE

¬ Développer l'enseignement des mathématiques comme science vivante en interaction avec les autres sciences et se construisant sur des problématiques très variées.

¬ Développer les laboratoires de mathématiques en s'appuyant sur les expériences en cours.

¬ Créer et généraliser une option science en classe de seconde.

¬ Recréer une véritable filière scientifique en première et terminale en allégeant les programmes dans les matières non scientifiques.

¬ Introduire des épreuves d'évaluation des capacités expérimentales en mathématiques, en sciences et vie de la terre et en physique-chimie au baccalauréat scientifique.

¬ Consacrer un temps suffisant aux activités de recherche et d'investigation qui favorisent le développement des capacités de raisonnement et de construction des savoirs.

¬ Réintroduire l'épreuve de mathématiques au baccalauréat en terminale littéraire, au besoin en réduisant le volume horaire dans d'autres matières.

¬ Introduire une meilleure articulation entre les programmes et les méthodes de travail de l'enseignement secondaire et de l'enseignement supérieur.

¬ Encourager et développer les activités scientifiques dans et hors l'école, sur des thèmes transversaux encadrés par des chercheurs ou des ingénieurs.

¬ Favoriser le développement des clubs scientifiques et l'organisation de compétitions nationales et internationales sur le modèle des Olympiades de physique et de Maths sans frontières.