Grande • Vince Lahay à Bonjour Minuit, Saint-Brieuc, le 27 février 2022

Publié le 02 mars 2022 par Concerts-Review

Grande * Vince Lahay à Bonjour Minuit, Saint-Brieuc, le 27 février 2022

michel

Nouveau concert dominical à Bonjour Minuit , démarrage à 18h, c'est mieux pour se préparer au boulot du lundi, pas forcément au soleil.
Le programme annonce Grande (aus Tours) und Vince Lahay ( aus Glomel), l'un est catalogué indie folk, les Tourangeaux ( pas de la famille d'Ariana) se définissent comme des adeptes du loud folk, d'autres sources indiquent cold folk, pour profiler large, on les désignera comme un groupe de rock alternatif, d'indie, si tu préfères.

La grande salle de Bonjour Minuit est aménagée en formule cabaret, tables et chaises attendent un public qui ne s'est pas déplacé en nombre.

Coup d'oeil à l'agencement scénique: des guitares acoustiques et électriques, une contrebasse, des violons, des claviers/synthés, quelques shakers, une batterie, combien seront-ils sur le podium?

Réponse à 18h00 pile, ils sont quatre, pas de batteur, Vince Lahay ( chant/guitare) est soutenu par Dylan James ( contrebasse, guitare électrique, secondes voix), un gars dont le bristol mentionne plusieurs groupes: An Tri Dipop, Skaramaka, Nefertiti in the kitchen, Moger, pour n'en citer que quelques uns, Tamm-Kreiz le répertorie dans une petite dizaine de formations pratiquant le Fest - Noz.

Floriane Le Pottier, déjà vue avec le Dour et Pottier Quartet, se charge du violon, Pierre Droual ( Dièse 3, Quatuor Poisson-chat, Skeduz, Gwenfol, Kiñkoñs, e a ) aux claviers et violon, complète la formation.

Vince est l'auteur de deux albums: Birds on the Grave ( 2017) et Spring is on the Ride ( 2021).

Pierre au synthé et Dylan, à la guitare électrique, introduisent la première plage, Vince fait entendre sa voix précise et haut perchée, le lumineux' Spring is on the ride' nous rappelle que l'hiver touche à sa fin et que la nature s'éveille.

La plage se lit comme du folk fragile évoquant les peintres intimistes tels Henri Le Sidaner ou Henri Martin.

Floriane rejoint les garçons, Vince propose un road trip bucolique porté par des cordes souveraines ( pendant tout le concert la contrebasse sera caressée par un archer cotonneux), le morceau est baptisé ' From Mile to Mile'.

Les jolies harmonies vocales évoquent les Fleet Foxes , Bon Iver , Iron & Wine et d'autres sympathisants d'un folk feutré à tendance baroque.

' Sober night' et son côté Nick Drake porte-t - il bien son titre, ...I need more wine... chante-t- il d'une voix plaintive, tandis que les violons se lamentent en bruit de fond.

' Crosses' se montre plus mouvementé.

Dylan frappe sa contrebasse de la paume, la guitare et les violons tissent de fines arabesques , le cours d'eau part en méandres sinueux, tu te prends à rêver de longues balades dans des futaies majestueuses.

Le voyage se poursuit, avec le ' Weatherman' , tu traverses une ville déserte où, après une effroyable tempête, ne subsiste qu'un seul arbre.

Après cette parabole qui éveille en toi des images de chansons de Nina Simone, le groupe te propose une pause sur un 'Park Bench' pour te raconter la fin d'une liaison amoureuse.

'The Painter' a sorti une palette aux couleurs pastel, pas de gros coups de pinceaux agressifs mais un paysage champêtre reposant et quelque peu mélancolique.

Les sanglots longs des violons de l'automne annoncent la plage ' Go find someone else', car moi je dois trouver ma voie, hope you will find love soon,..... nos chemins se séparent.

Vince en solitaire ébauche ' Steal away', il sera rejoint en vue du terme par des violons joués en mode pizzicato tandis que Dylan, agenouillé, tripote la loop station pour créer des climats vaporeux.

La suivante dépeint un pêcheur à l'éthique douteuse, il rencontre une cousine de Moby Dick, tombe malheureusement à l'eau, découvre une épave échouée dans les fonds marins, elle est bourrée d'or, il décide de remonter le trésor but .... he drowned .

La fable précède 'These wooden arms' , un titre somptueux qui ouvre le dernier disque .

C'est à Ben Howard que tu songes à l'écoute de cette plage radieuse qui, en principe, devait conclure le récital.

Saint- Brieuc insiste et ne devra pas attendre des heures pour le rappel , un hommage quasi symphonique au père, simplement intitulé ' Father'.

Fin d' un concert propice à la méditation qui agit comme un baume en ces temps perturbés.

Grande

" GRANDE c'est le doux trash d'une tasse de thé dans un concert punk, c'est une claque douce dans un gant en cuir."

Comme les singes ne sont poètes, ils empruntent ( volent) la description à l'Electrophone.

Sinon, Grande ( singulier, mais à deux) ne sont pas les gosses de Sophie Huriaux, la Grande Sophie, mais de beaux enfants venus de Tours.

Chloé Boureux joue du violon et assure les backings et Gabriel Debray, pas le metteur en scène, chante et joue de la guitare. Sur scène, le duo est entouré de Mélanie Loisel à la contrebasse ( Parlegast va Grantaleure, Antifer, Möbius Band, etc...) et de Annabelle Akms à la batterie ( Polyanna, CHEVALIEN).

La discographie de Grande se compte sur deux doigts, si on omet les singles, l'EP Grande de 2017 et Chasing the Giant en 2020.

Après une longue amorce atmosphérique, la voix claire et enveloppante de Gabriel fusionne avec l'assemblage sonore, la playlist mentionne ' Coldplay' comme titre . On n'a retrouvé aucun morceau de la bande à Chris Martin contenant les lyrics ...we drive on the same road.... et plus loin...please don't be sad, don't be mad.... on suppose donc qu'il s'agit d'une de leurs nouvelles compositions, lustrée et brillamment orchestrée.

Le groupe embraye sur une plage en français, ' Sommeil', si les préliminaires sont apaisés, très vite le violon et la contrebasse tracent une ligne menaçante, soudain "hop" crie Gabriel et le morceau part crescendo.

Vachement agité ce sommeil, monsieur rêve de nuits d'orgie.

Le réveil sera moite.

Chloé en mode pizzicato pour introduire la valse ' Yellow Saturday' qui esquisse l'épopée des gilets jaunes, elle a laissé des cicatrices aussi bien morales, que physiques.

...can't you feel the rage growing... murmure-t-il, cette colère n'a pas été comprise par tous.

Les arpèges de 'This Fever' évoquent Jeux Interdits, une nouvelle fois le morceau s'allume sur un tempo andante, petit à petit, le violon s'active, la rythmique suit le mouvement, le chant prend des intonations douloureuses, et c'est sur un roulement de tambour menaçant que le titre, superbe, se meurt.

Chloé et Gabriel en duo pour une chanson qualifiée de triste, les prières ne sont pas toujours tristes, ' Pray the Lord' l'est, franchement!

..I've been broken for years... c'est pas la joie, but don't try to fix me.

Il était un géant d'argile qui se nourrissait des larmes des pauvres mortels... ' The Giant' est bourré d'images qui collent à l'actualité.

Place à la confession poignante ' Hold' , un lament, sur fond de cordes ténébreuses; qui t'arrachera quelques larmes.

Des bruitages aqueux servent à introduire 'White Roses' , un morceau qui éclate en folle sarabande lors d'un dernier mouvement agité.

Sur la lancée expiatoire le groupe nous soumet ses ' Demons' .

Chacun d'entre nous cache des génies malfaisants quelque part dans son corps ou son âme, les démons de Grande sont du genre turbulent .

L'univers du groupe est souvent associé à des gens aussi respectables que PJ Harvey ou Agnes Obel, bizarrement c'est à certains morceaux aux teintes orientales de Sting que tu penses à l'écoute de ' Demons'.

Avec l'orageux ' The Ceiling' le groupe vire au rock fougueux pour retrouver un semblant de lenteur avec ' Wild Animals' qui démarre comme un cortège religieux avant d'éclater au final. Les animaux sauvages ont flairé l'odeur du sang, il faut s'attendre au carnage.

Il nous reste deux titres, il n'y aura pas de rappel mais on ira boire quelques bières ensemble.

Le premier, en français', ' Silence' prend la forme d'un tango qui se termine sur un cri rageur, il annonce le troublant ' La petite sirène' , malgré le titre le texte est interprété in English.

Pour une analyse psychanalytique du conte, tu peux , soit lire Marie France ou t'adresser à Carl Gustav Jung. Sache que les contes peuvent être cruels, et trompeurs.... et si la petite sirène était de sexe masculin?

La question reste ouverte, un point est incontestable toutefois, étonnantes sont les capacités de Grande, un jeune groupe qui combine intensité, magie, efficacité et pouvoir suggestif.

Leur tournée " Chasing the Giant" les conduira à la Boule Noire le 18 mars, n'hésitez pas à parcourir leur page facebook pour découvrir les autres dates!