Night and day

Par Rob Gordon
Un film coréen dans lequel le héros parcourt les rues de Paris et boit des pots avec des filles pendant deux heures vingt-cinq, ça vous fait fuir ? Ça se comprend, mais c’est fort dommage : l’incomparable patte de Hong Sang-soo fait de Night and day un enchantement permanent. Toujours fasciné par les rapports-hommes femmes, la lâcheté des uns et l’indécision des autres, le réalisateur son film le plus épuré, les histoires d’amour compliquées laissant place aux errances d’un et un seul homme, déchiré entre sa femme restée en Corée et les quelques compatriotes en mini-jupe qu’il croise dans les rues de la capitale française.
Volontairement ou non, HSS signe un bel hommage à François Truffaut, cinéaste surcoté mais incontestablement doué dans sa façon de filmer les longues balades sans but. On découvre ou on redécouvre Paris avec le héros, sorte de grand type un peu mou mais très attachant, qui traine ses guêtres d’arrondissement en arrondissement et de fille en fille, tellement cœur d’artichaut qu’il n’a pas le temps de concrétiser avec une demoiselle qu’il est déjà tombé amoureux d’une autre. Miraculeusement, on évite les clichés du Paris carte postale, et seule une courte vignette à propos des crottes de chiens vient flirter avec les idées reçues – un peu vraies sans doute, mais surtout entendues mille milliards de fois.
Sous forme d’éphéméride, Night and day est un petit journal intime où sont consignés pêle-mêle des sensations, des rencontres, des coups de cœur. S’il n’est sans doute pas le meilleur film de son auteur par manque d’un fil conducteur plus épais, il peut constituer une bonne entrée en matière pour découvrir le fabuleux Hong Sang-soo avant d’aller voir Woman on the beach au mois d’août puis d’enchaîner avec des perles comme Turning gate ou Le jour où le cochon est tombé dans le puits.
8/10