Le merle de mon jardin

Publié le 13 janvier 2023 par Onarretetout

Après le corbeau, l’aigrette, le cormoran et le héron gris, de Marc Le Gros, voici le merle. Marielle Macé, dans son livre Une pluie d’oiseaux, cite un poème de Fabienne Raphoz extrait de Jeux d’oiseaux dans un ciel vide (éd. Héros-Limite) :

« Le merle de mon jardin est un oiseau commun
       mais c’est le merle de mon jardin ;
le merle de mon jardin est un oiseau commun
      mais j’ai aussi treize manières de le regarder ;
le merle de mon jardin est un oiseau commun
       mais il est à lui seul le voyage tout entier ;
le merle de mon jardin n’est ni le ciel ni la terre
       mais il les réunit ; (…)
parfois je suis un peu le merle de mon jardin
       car je le suis des yeux ;
ainsi, pour le dire autrement, l’oeil du merle de mon jardin et mon regard ne font qu’un, mais j’ai moins d’acuité pour observer le merle de mon jardin
       qu’il n’en a pour me regarder depuis le pommier ;
(…)
le merle de mon jardin se tait à la mi-juillet
       mais garde son sale caractère — je l’appelle souvent the pipipissed off merle de mon jardin parce que j’ai un rapport passionnel avec la langue anglaise et le merle de mon jardin ;
(…)
       Ceci étant :
       le merle de mon jardin n’est sûrement pas mon merle, comme mon jardin n’est finalement pas mon jardin mais le monde du merle de mon jardin et de quelques-uns, pendant l’été, pendant l’hiver, par instants ou bien alors, durant toute l’année, comme le merle de mon jardin : le milan, la buse, le faucon, le martinet, le coucou, le pic, la corneille, le geai, la pie, la pie-grièche, le rougegorge (…) le hanneton, le bousier, le taupin, le gendarme, la punaise, le criquet, la sauterelle, la guêpe (…) mais encore la verge d’or,  la gesse, la balsamine, le trèfle, l’oeillet, la centaurée, le millepertuis, la carotte sauvage, le coquelicot, la reine-des-prés (…) et tous les autres, que je n’sais même pas nommer, que j’n’ai même pas vus ou que j’ai acclimatés à mon jardin à l’inverse du merle de mon jardin qui lui a choisi mon jardin. »

(mais est-ce un merle qui vient de se poser sur l'arbre de "mon" jardin ?)