La faillite de l’étatisme

Publié le 15 janvier 2023 par Magazinenagg

 Par Olivier Maurice.

Les collapsologues ont tout à fait raison : nous vivons bien une période d’Apocalypse, à la nuance près que ce n’est pas la planète qui s’effondre, c’est l’État qui part en totale déconfiture.

En quarante ans de « néolibéralisme » (entendez par là en quarante ans de soviétisation menée par des fils à papa parisiens pourris gâtés) la France s’est propulsée avec vigueur et confiance dans une trajectoire menant tout droit dans le mur.

Le prétendument meilleur système de santé au monde est en fait un dispensaire qui ne tient que par miracle et par l’abnégation de plus en plus rare de soignants au bord de l’effondrement.

Le pays des Lumières s’enfonce dans les classements sur l’éducation. L’illettrisme a doublé en un siècle et est passé de 3 % en 1914 à 7 % selon les derniers chiffres officiels.

L’agriculture, fondement du pays des 54 appellations de fromage, des grands vins et des restaurants étoilés est mourante. Le nombre d’agriculteurs a été divisé par deux, le nombre d’exploitations par quatre.

L’industrie a été divisée par deux, enregistrant le plus fort recul de la zone euro.

Et on pourrait ainsi continuer la liste : la dégradation de l’état des routes, les délais indignes des procédures judiciaires

Mais depuis deux ans, les choses ne font que s’accélérer. À ces problèmes lancinants se dégradant inexorablement mais suffisamment lentement pour que l’on puisse s’y adapter ou trouver des excuses, sont venues se superposer des crises de plus en plus violentes ayant toutes la même origine : l’incurie de l’administration et du gouvernement censés avoir la charge de les régler.

L’État inflationniste

La crise de l’énergie et l’inflation nous font presque regretter le folklore de la comédie covid. Le pire étant sans aucun doute que l’État n’a toujours pas compris qu’il en est responsable et qu’il continue avec vigueur et ardeur à aggraver chaque jour la crise.

Dernière bêtise en date : le chèque bois énergie.

Jusqu’à aujourd’hui, la France était le premier pays en Europe à utiliser le bois comme source d’énergie. N’en doutons pas, maintenant que l’État a porté son attention sur le secteur et fourré ses petits doigts boudinés dans l’affaire, le secteur ne va pas tarder à péricliter.

Le bois de chauffage est un sous-produit de l’exploitation forestière. Pour l’instant. Le marché s’est régulé tout seul, que ce soit le marché des granulés ou des bûches, sans avoir d’impact sur l’exploitation forestière qui reste largement dominée par les plantations à long terme en vue de valoriser les grumes utilisées principalement en construction et dans les diverses industries.

Le gouvernement précédent avait déjà commencé à s’intéresser au secteur. Résultat : une augmentation de 14 % du prix du bois de coupe en un an. Le prix du bois de chauffage avait bien sûr suivi. Les subventions déversées par le nouveau chèque vont comme de toute bonne logique aller encore augmenter les prix.

Les mécanismes en présence

Ce n’est pourtant pas compliqué à comprendre ! Depuis la mise en place d’un système monétaire décorrélé d’une matière de référence, trois éléments fixent les prix :

Premièrement : la disponibilité de monnaie « déblocable » comparée à la quantité de monnaie « exigible » par les divers impôts et taxes. Si vous ne payez pas les impôts, les taxes, les cotisations obligatoires… vous allez en prison. Ce n’est pas plus compliqué que cela : vous n’avez pas le choix.

Cette demande d’argent confère de la valeur à la monnaie en obligeant les individus et les entreprises à vendre des actifs ou à moduler leurs investissements en fonction de la ponction fiscale.

Deuxièmement : la disponibilité de la monnaie « débloquée », comparée aux actifs « bloqués » et qui est fixée par les taux d’intérêts, le prix à payer pour obtenir de la monnaie échangeable, mais également par la création de rentes, d’obligations d’État qui donnent lieu à intérêts et deviennent disponibles dès qu’elles arrivent à terme.

Cette offre d’argent réduit la valeur de la monnaie par le mécanisme d’intérêt qui conduit à une augmentation du volume de monnaie.

Enfin, troisièmement : l’équilibre des prix fixé par les capacités de remplacement. C’est ce que l’on a longtemps appelé « le marché », mais qui est en fait une interconnexion des prix plus ou moins fluide selon la liberté et la capacité d’échange qui se résume dans deux lois : l’effet de substitution et l’effet de revenu.

Ce dernier mécanisme, microéconomique alors que les deux premiers sont macroéconomiques, agit comme une espèce de matelas amortisseur ou de réseau qui interconnecterait tous les prix les uns avec les autres et les rendraient tous dépendants.

Le leurre des subventions

Normalement, tout ce système s’équilibre « naturellement » : l’argent exigé pour les taxes est dépensé par l’État, les placements financiers créent de la valeur qui vient compenser l’augmentation monétaire liées aux intérêts, les consommations se déplacent en fonction des solutions disponibles et amortissent les variations et les variations de demande, de disponibilité et de rentabilité…

Normalement…

Reprenons notre bois de chauffage. L’équilibre des prix du pellet et de la bûche est issu de nombre de facteurs qui vont borner ses prix. Bien plus que la disponibilité des produits, c’est la valeur « chauffage » qui va fixer le prix du bois : la quantité de chaleur restituée comparée aux autres moyens de chauffage.

Imaginons que chaque foyer disposerait à la fois d’une pompe à chaleur (électrique), d’une chaudière au fuel, d’une chaudière à gaz et d’un poêle bouilleur. Clairement, il est logique d’allumer le moyen de chauffage qui donne le meilleur résultat en fonction de la météo et qui lui coûte le moins cher, par exemple le poêle à bois la journée, la pompe à chaleur la nuit pendant les heures creuses sauf pendant les nuits très froides où il est plus économique de faire fonctionner une chaudière au gaz, etc.

Bien sûr cette situation est imaginaire. Mais dans la réalité, il est loin d’être rare que le poêle ne soit pas couplé à des radiateurs électriques, à une pompe à chaleur ou une chaudière. Même si on n’est pas à 100 % de capacité de substitution d’une source d’énergie par une autre, cet effet de substitution se concrétise à l’échelle macroscopique du pays et s’opère de proche en proche dans d’autres substitutions pour se diffuser à l’ensemble du système de prix : le prix du bois de chauffage va influencer le prix du bois de construction (et inversement), qui va influencer le prix des poutres en bois, qui va influencer le prix des poutres en métal, qui va influencer le prix du fer, qui va influencer le prix des automobiles, qui va influencer le prix des téléviseurs, etc.

À la moindre variation, le système de prix va se rééquilibrer tout seul (plus ou moins rapidement il est vrai) et la subvention du prix de la bûche et du pellet sera au bout du compte équilibrée par tout une séries de glissement d’autres prix. Ce système est à somme nulle car ce n’est pas lui qui fixe la valeur globale, il ne fait qu’équilibrer un système dont la « somme » doit correspondre à la quantité de monnaie collectée et dépensée par l’État dans son budget de fonctionnement.

Le fait de subventionner le chauffage au bois ne va donc pas impacter uniquement les foyers à bas revenus se chauffant uniquement au bois, mais tous les prix. En fin de compte, les seuls résultats tangibles auront été de déséquilibrer certains prix (et de créer des problèmes ou des aubaines pour certaines filières) et surtout d’augmenter la quantité de monnaie en circulation et donc de créer de l’inflation : l’effet d’aubaine sur le bois de chauffage se traduira vite en désillusion par l’augmentation d’autres prix.

L’État inflationniste

C’est l’équilibre du budget de l’État qui détermine la valeur de l’argent que celui-ci émet pour payer son fonctionnement. On a cru que l’interdiction faite à l’État d’imprimer du papier allait empêcher cette maladie chronique de l’endettement des finances publiques qui a maintes fois créé des crises financières catastrophiques et fait chanceler les souverains et ce depuis la plus ancienne Antiquité.

Le fameux « système libéral » dénoncé par tous les vendeurs d’illusion a permis une incroyable période de stabilité et de développement économique depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale en donnant la possibilité à l’État de faire disparaître sa création monétaire dans le système bancaire et ainsi d’éviter d’interférer dans l’économie.

Mais c’était sans compter l’incompétence et l’inconséquence de certains dirigeants et de certains pays, particulièrement la France, qui ont utilisé cette aubaine pour faire n’importe quoi, en particulier pour subventionner des secteurs entiers de l’économie jusqu’au moment où la bulle explose ou que l’État se retrouve au bout de ces capacités de cavalerie, risque qui peut arriver à tout moment.

Le chauffage au bois vient d’entrer dans la longue liste des secteurs économiques étatisés, non pas par nationalisation, mais par mise en dépendance à l’argent public, après l’immobilier : crise de 1991 en Francecrise des subprimes aux USA en 2008… le système de protection sociale en déficit chronique depuis sa création et qui peut s’écrouler à tout moment comme en Grèce en 2010, les transports…

Crise à venir

Le paquebot de l’étatisation de l’énergie est lancé à pleine vitesse avec à la proue les fameuses énergies renouvelables et la lutte donquichottesque contre le thermomètre, façons élégantes de nommer des machines à détourner l’argent public et à créer de la dette souveraine et donc de l’inflation sous forme larvée ou sous forme de bulles. Cette inflation conduira sans aucun doute à une gigantesque crise de l’énergie dans les années à venir, si elle n’a pas déjà commencé.

Il devient de plus en plus évident que les États-Nation, créés au XIXe siècle sur le modèle de l’État providence imaginé par Bismarck, sont amenés à disparaître ou pour le moins à se transformer radicalement, car dans l’état actuel des choses, ils amènent bien plus de problèmes que de solutions : quand ce ne sont pas les guerres mondiales, ce sont les crises économiques, sanitaires ou sociales mondiales, quand ce n’est pas tout en même temps.