Oreille rouge

Par A_girl_from_earth


OREILLE ROUGE

Présentation de l'éditeur
"Cet écrivain aime sa chambre, sa table, sa chaise, dans la pénombre : on l'envoie en Afrique où sont les lions, dans le soleil. Que va-t-il chercher là-bas ? Un grand poème, dit-il. Ou ne serait-ce pas plutôt l'inévitable récit de voyage que tant d'autres avant lui ont rapporté ? On l'a lu déjà, et relu. L'auteur va prétendre que des indigènes l'ont sacré roi de leur village. Il aura percé à jour les secrets des marabouts et appris de la bouche d'un griot vieux comme les pierres quelque interminable légende avec métamorphoses. Le pire est à craindre. Par bonheur, l'aventure tourne court. L'hippopotame se cache. L'Afrique curieusement ne semble guère fascinée par le courageux voyageur. En revanche, celui-ci prend des couleurs : est-ce le soleil ou la honte ? Nous l'appellerons Oreille rouge."

Lire du Eric Chevillard c'est un peu entrer dans un labyrinthe les yeux fermés et se risquer aux pièges facétieux de l'auteur au bout de chaque couloir. Effet déstabilisant garanti!
Ce treizième roman de cet écrivain n'est cependant pas mon préféré dans l'ensemble de ses oeuvres, je m'y suis juste attelée car il y parle de l'Afrique, qui est actuellement un de mes thèmes de prédilection côté livres.
Pas mon préféré car je l'ai trouvé moins déjanté, plus sobre que dans les autres romans que je l'ai lus, plus sage même pourrais-je dire, moins étourdissant. Oooh, il maîtrise toujours l'art de la dérision, il traite toujours son sujet avec cette originalité qui n'appartient qu'à lui, mais... mais... cette fois-ci je l'ai trouvé moins délirant, plus conventionnel même peut-être... et du coup, j'ai été moyennement emballée par cette lecture.
Ca, c'était surtout sur la forme - mais sur le fond, j'ai trouvé que son sujet avait plus de consistance du coup que dans ses autres romans - ou du moins, on n'y a un peu plus de repères lol.
Le sujet donc, venons-en au fait : l'Afrique (et plus particulièrement le Mali) ? Ou un Blanc lambda, écrivain de surcroît, qui ne sait voyager qu'à travers ses fantasmes d'aventurier et ses rêves de reconnaissance, au risque de passer à côté de la réalité?
J'ai bien aimé toute cette partie qui faisait la part belle aux idées préconçues et romanesques sur un pays, à l'image quelque peu idyllique qu'on peut s'en faire, la recherche acharnée de l'écrivain de l'Afrique authentique telle qu'il l'a toujours visualisée, une Afrique sauvage et romantique, où l'on côtoie au quotidien lions, hippopotames, girafes, etc..., et son retour au pays après bien des désillusions, en tant qu'Africain aguerri et confirmé qui se la raconte (excellent le dernier chapitre à ce sujet!).
Quelques extraits pour vous donner le ton et une idée de la "Chevillard touch":
"Puis il a un sursaut: là-bas, au fond du paysage, deux lionnes ont pris en chasse une antilope boitillante. Et soudain, c'est l'Afrique pour de bon.
Puis le tableau se précise et ce sont deux chiens errants qui harcèlent une bique."

"Enfin un baobab! Voici un moment maintenant qu'Oreille Rouge nous promène en Afrique et toujours pas de baobab! Ca commençait à devenir suspect, son petit voyage. Encore un qui prétend risquer sa vie dans un pays sauvage devant les fleurs en pot de son salon ou de son balcon, un atlas ouvert sur les genoux, et qui se trahit grossièrement en omettant de citer les deux ou trois choses que le plus casanier de ses lecteurs n'ignore point. Nous feignons volontairement d'être dupes de l'illusion romanesque mais s'il s'agit d'un reportage, nous sommes en droit d'attendre des preuves, au moins un minimum de vraisemblance."