Hellfest 2023 – Première partie – jeudi 15 et vendredi 16 juin

Publié le 09 août 2023 par Lordsofrock @LORDS_OF_ROCK

(photos et report : Emmanuel)

Croyez-le ou non mais le Hellfest en est à présent à sa XVIe édition et le moins que l’on puisse dire, c’est que le festival est devenu quelque chose de gigantesque. Au-delà des polémiques sur la venue de certains groupes et j’en passe, il faudrait prendre quelques instants pour saluer le travail titanesque effectué par Ben Barbaud, l’équipe de bénévole, et toutes les personnes présentes pour promouvoir le festival, ne serait-ce que par leur simple présence et l’enthousiasme qui l’accompagne. Pour maintenir, au plus au niveau cet événement, il convient de rester conscient du travail effectué par tout le monde. Ceci, étant posé, commençons. Voici la première partie (journées du jeudi et vendredi) de ce Hellfest 2023.

Depuis près de dix années que je couvre cet événement, je n’ai pas souvenir d’avoir vu autant de festivaliers sur le site. Cette édition était tout simplement gargantuesque. Avec près de 240 000 personnes sur ces 4 jours, autant vous dire que le site était déjà plein à craquer, dès le jeudi. La chaleur est au rendez-vous malgré des prévisions en dents de scie selon différents sites météorologiques. Le soleil pique fort, la gendarmerie patrouille plus que d’ordinaire aux abords de la ville, notamment au rond-point de la fameuse Gibson, et ce sont des marées humaines qui affluent des différentes artères qui conduisent vers l’entrée du festival. Ça va envoyer du lourd messieurs dames. Malgré l’édition XXL de l’année précédente, l’équipe de Barbaud a relevé le défi de mettre la barre un peu plus haute pour 2023.

Six semaines après la fin du festival, je peux enfin faire le point avec objectivité. Prendre du recul était nécessaire. En effet, un tel événement draine avec lui beaucoup d’émotions qu’il convient d’analyser à froid.

Ce live report rend compte de la manière la plus objective (est-ce seulement possible ?!) de ces quatre jours. Et bien que votre serviteur soit un impénitent bavard, mille pages n’auraient pas été suffisantes pour vous compter toutes ces jolies rencontres au fil du festival, ces bons moments passés avec des inconnus, sur le festival, au bar, au VIP, mais aussi de partages avec des potes et des amis, et bien entendu, ces superbes découvertes musicales et surprises en tout genre. Et dépit du fait qu’il est difficile de produire un compte-rendu qui satisfasse tout le monde, je m’efforce de le rédiger avec le plaisir au bout de la plume afin de vous retransmettre de la meilleure des manières cette passion qui est la mienne pour le metal.

Comme chaque année, j’établis un programme militaire que je m’oblige à suivre à la lettre, du début à la fin d’une prestation. S’il est vrai que l’organisation est fondamentale pour passer un agréable moment en festival (on ne le répétera jamais assez, mais il est indispensable d’avoir un petit sac avec, au minimum, 2 litres d’eau, des lunettes de soleil, une casquette, des choses à grignoter, une batterie portative pour le téléphone.), toutefois, il faut aussi accepter de se laisser surprendre. Je reviendrai là-dessus plus loin.

Chaque édition nécessite une organisation martiale. Sincèrement, après en avoir parlé au stand Rock Hard France (Salutation à Phil pour ce bel échange d’ailleurs), je ne me souviens pas d’avoir vu autant de monde les années précédentes dès l’après-midi : 240 000 visiteurs sur ces quatre jours. Au fond, y avait-il vraiment plus de monde? Une chose est certaine, le public était déchaîné, que ce soit sur le site ou devant les concerts avec parfois des marées humaines, pas toujours courtoises, y compris dans les airs, nous y reviendrons également.

Et qu’on se le dise, à celles et ceux qui ragent (et que j’ai entendu pendant le festival et au détour de conversations échangées) en questionnant l’avenir et la fameuse « authenticité » du festival, croyez-moi, ce dernier a de très beau jour devant lui. La programmation est adéquate : résolument diverse, du punk au metalcore le plus moderne, bref éclectique ! Tout ceci en faisant la part belle au très ancien et au récent (The Hu, Def Leppard, Electric Callboy, Carpenter Brut, Testament, Kiss, iron Maiden, Porcupine Tree, Lorna Shore ).

Enfin, le site redouble, une fois de plus, d’inventivité, et parvient une fois encore à cette édition, à surprendre les novices comme les aficionados. De tout ceci, nous parlerons en détail dans ces pages.

On s’ouvre une mousse, un allume, un colossal cigare, on s’installe confortablement dans le canapé avec de confortables Charentaises (tel Phil Anselmo !) et c’est parti.

Jeudi 15 juin

Imperial Triumphant

En ce jeudi fin d’après-midi, les hostilités démarrent avec les Américains d’Imperial Triumphant. S’il y est bien un groupe qui ne possède aucune étiquette, c’est bien celui-ci : progressif, black metal, jazz, noise, drone, doom ? Impossible à dire. La seule chose que je constate, sous cette Temple c’est une ambiance pesante se dégageant de cette tortueuse musique et de ces bien étranges masques dorés dignes d’un snuff movie ! Le combo arbore des santiags vissées aux pieds ainsi que de longues toges noires. Les riffs sont chaotiques et dissonants, les structures des morceaux complètement instables, le tout emporté par une toile sonore inquiétante et dissonante, à la limite de la noise. Ça et là, des larsens en pagaille écrasés par de furieux blasts beats contrôlés avec brio, viennent nous percer convenablement les tympans. Les nappes de clavier théâtrales ajoutent une dimension oppressantes à ce bien sinistre spectacle. Bref, personnellement, j’adore!

Finalement, ces montagnes russes émotionnelles et la versatilité stylistique sont adoubées par un public conquis à la sortie d’un show qui donne le ton de cette XVIè édition : ça va secouer !

Après avoir déambulé sur le site à la recherche d’un repas tel un zombie de l’apocalypse, je m’aperçois qu’il est (déjà) 20h35. Je me décide à consommer un étrange chili con carne sans viande (sin carne donc?!) avec des frites molles et froides. J’échange avec quelques compatriotes suisses (du Val de travers!) bien infusés (sic!) puis me dirige vers les Hollywood Vampires sous une légère pluie qui refroidit ma couenne déjà asséchée par un jeudi après-midi brûlant.

Hollywood Vampires

Vous savez ce petit groupe américain composé de Joe Perry (Aerosmith), Alice Cooper, Glenn Sobel, et un certain… Johnny Depp affublé d’un bien vilain plâtre à sa jambe. J’ai tout entendu sur ce « super groupe » les meilleures choses et les plus affreuses, mais les choses sont posées d’entrée de jeu lorsque Perry lance les premières note et ça joue très très bien. Si ça n’est pas la première fois que le groupe se présente au Hellfest, il jouit désormais d’un très beau capital de sympathie. Ici pas de rock star. Personne n’est sur le devant de la scène ce qui est absolument incroyable.

Depp fume son cigarillo tranquillou pendant qu’Alice se « contente » de faire ce qu’il fait de mieux, même si son hard rock est beaucoup moins grandiloquent qu’à l’accoutumée. Exit les tenues farfelues, à part le jabot et la cane, faut pas pousser quand même (!) Alice fait son boulot, échange beaucoup avec son public et visiblement s’amuse, tout comme son comparse de guitariste Joe Perry, visage buriné, coiffé à la matraque.

Sur un ciel rouge-orangé, monsieur Johnny Depp affiche une superbe chemise à carreaux coiffé d’un bonnet jamaïquain. Je constate qu’une bonne bouteille posée à même la scène, lui tient compagnie. Le gaillard n’est pas que bon acteur, mais aussi un sacré zicos qui n’a pas besoin de trop forcer pour exister sur scène.

Bien entendu, les titres d’Alice Cooper font mouche à l’instar de cet « I’m Eighteen » qui harangue la foule comme il se doit. Il est vrai que les reprises passent, à mon avis, mieux que les compos. Qu’il s’agisse des Who « Baba O’Riley » du magistral « Heroes » d’un certain David Bowie, chanté magistralement par Johnny Depp qui singe magnifiquement l’immense David Bowie ou de la splendide cover des MC5 « Kick Out the Jams », le groupe se fait plaisir et nous fait plaisir ! Le « Walk this Way » est un régal joué par une bande de pote et pas n’importe laquelle !

Finalement assister au concert des Hollywood Vampires, on est un peu comme à la maison en somme ! Il me semble bien que le groupe recueille ce soir tous les suffrages et lorsqu’Alice annonce le blase des membres du groupe, celui de Johnny Depp semble très attendu, comme pour confirmer que l’idole en personne est bien là devant nous. C’est con, mais c’est comme ça. Et il faut le dire, l’homme a du talent même avec une guibole dans le plâtre et des démêlés judiciaires dont tout le monde se serait bien passé. Quel plaisir d’avoir entendu et vu ces messieurs jammer devant nous.

Kiss

Les vétérans de Kiss n’en finissent pas de nous surprendre. Ce soir, le groupe est en mode amical. Si les décors et la qualité est toujours au rendez-vous, on sent qu’il n’y a pas d’enjeux. Le groupe joue un jeudi soir et, « à domicile ». À en juger par le nombre de tee-shirts à l’effigie du groupe, ce dernier draine derrière lui une sacré fan base. Nul besoin d’en faire davantage, Kiss place, d’ordinaire déjà, la barre très haute en termes de production scénique.

Les hostilités démarrent avec un « Detroit Rock City »  très rock, écran géant, couleurs au top, voix très claire et un Paul Stanley visiblement très heureux d’être là. L’impressionnant dispositif pyrotechnique est toujours un régal pour nos yeux. Et dire que l’équipe qui évolue devant nous ce soir en gigotant dans tous les sens comme de jeunes cadors et hurlant à gorge déployée est presque composée intégralement de septuagénaire! Incroyable aussi d’entendre la qualité, tant vocale qu’électrique du combo, là où certains (Mötley Crue hum…) semblent évoluer à des moments en playback…

Le spectacle est tout simplement impressionnant : explosions, écrans géants, couleurs étincelantes, maquillages impeccables, énergie débordante, titres iconiques : « Lick it Up » ; « God of Thunder » ; « Love gun » ; « I was made for lovin’ you ». Bien entendu, rien de nouveau sous les tropiques pour qui a déjà vu évolué les américains, mais bon sang : quel show ! Et contrairement à ce qu’on pourrait présupposer, où ce que j’ai pu entendre : non on ne se lasse pas des froufrous et payettes, rien n’est répétitif du moment que la passion est là! Et côté passion, Stanley et Simmons en connaissent un rayon.

Derrière l’énorme battage, marketing de la machine Kiss, la musique reste le vecteur prioritaire, même 50 ans après (le groupe a fêté ses 50 ans cette année). Il parait que le combo raccrocherait les gants. Il parait. J’avais déjà entendu ça il y a quelques années… On verra.

 Une chic soirée donc et ça n’est pas fini.

Parkway Drive

Il y a quelques années de cela, onze ans pour être exact, sortait un disque du nom d’Atlas. Ce petit groupe d’australiens m’avait méchamment tapé dans les esgourdes et dans l’oeil. Ces tarés sautaient de falaise la tête la première dans des vidéos devenues cultes.

À l’époque, le metalcore, ce sale gosse énervé, héritiers des ConvergeBiohazard, à cheval entre la spontanéité punk et la technicité death, n’avait pas encore vraiment pignon sur rue, à part peut être Chimaira et DWP.

S’il est bien un groupe qui a repoussé les limites à ce Hellfest 2023, c’est bien celui-ci. Le show est tout simplement dantesque. Exit le combo énervé qui se contente de sauter comme des cabris en hurlant à s’en faire péter le gosier.

Ce soir, le combo est attendu de pied ferme et la température est montée d’un cran, c’est une évidence. Le bal s’ouvre sur un décor postapocalyptique, musique très orchestrée, personnage avec des cagoules sur la tête, torche à la main avant que la scène ne se fasse d’un blanc immaculé et que le débarque le musculeux Winston McCall et sa troupe tout droit débarquée d’un vaisseau spatiale. Les tempis sont désormais plus lents et le propos plus structuré. Le groupe a bel et bien muri. Alors que les notes de « The prey » retentissent, je constate d’où je suis (devant la scène) que le public a les yeux qui lui sortent littéralement du crâne ! Qu’il s’agisse de ballades ou de riffs emportés, Mc Call est toujours au niveau.

La ballade « Darker Still » vient adoucir un concert tout en puissance avec une tension très palpable alors que se déroulent les notes.

Le propos monte d’un level lorsque surgissent les premières notes de « Vice Grip » et McCall se fait littéralement habité et se met à danser tel un démon schizophrène ! Les deux dernièrs titres « Crushed » et « Wild Eyes » achèvent littéralement l’assistance qui n’a d’yeux que pour son chanteur qui affiche désormais un pantalon craqué au mauvais endroit…

Effectivement, «la flamme est vivante » et si les cheveux sont devenus grisonnants, le groupe a gagné une impressionnante maturité et plié là devant nous un concert historique pour le Hellfest, habité, envoutant, énergique. Quelle classe. Il est passé 2h00 du mat’. La soirée ne fait que commencer. Direction le dodo;

Vendredi 16 juin

Que la nuit fut douce, mais qu’elle fut courte. Je suis loin d’imaginer ce qui m’attend au moment où je foule le site en cette fin de matinée. Les choses démarrent tout en finesse avec Belenos.

Belenos

Le black metal des Bretons est comme un bon whisky qu’on sort en fin de soirée avec quelques potes triés sur le volet. Après en avoir discuté avec quelques aficionados de black/pagan, il est vrai que ce ne sont pas les groupes qui manquent en France : Aorlac, Belenos, Seth notamment, pour ne citer qu’eux.

Aucun décors, pas d’affiches, pas de lumières, zéro communication, tapis sur la musique. Le groupe qui affiche désormais une carrière de près de 25 années fait un très bon boulot en cette fin de matinée et il faut dire que sur l’autel du black metal/pagan, Belenos possède les meilleurs codes : riffs déchirés, ambiance inquiétante « le déchirement » ses accélérations puis son ralentissement doom jusqu’à l’assaut final qui voit les spectateurs plongés dans des hurlements désespérés. 

Le combo peut se targuer d’avoir un public fidèle et de connaisseurs, car il faut le dire certains ont commis l’erreur du débutant de se démonter dès le jeudi soir… Je tairais le nom de quelques épaves que j’ai croisé sur le site par respect pour les proches susceptibles de lire ce report 🙂 Le concert se termine dans la tourmente propre au black metal avec “Argoat” et son riff dévastateur. Quel beau début de matinée.

Accod

On enchaîne avec les Marseillais d’Acod et son charismatique chanteur, Fred, possédé vêtu d’un magnifique blouson de cuir sous une Temple caniculaire, nom de Zeus ! Je découvre enfin le combo en concert et le moins que l’on puisse dire, c’est que je ne suis pas déçu.

Le black metal a toujours eu une place de choix au Hellfest malgré une évidente transformation des attentes du public au fil des années dans ce style de niche. L’ambiance inquiétante véhiculée par des tons rouges et sombres confère à cet ensemble une atmosphère hypnotique qui produisent tout de suite un effet. Le public bouillant ne fait plus qu’un dès le premier morceau « Genus ». Et les choses se tissent tranquillement avec des morceaux qui s’enchaînent de manière très fluide grâce à un Fred communicant, souriant visiblement très heureux de partager la scène avec son public.

Le concert se termine en apothéose avec un Fred qui affiche de faux airs du regretté et immense Selim Lemouchi tant au niveau de ses mimiques, tête en arrière qui regarde le ciel, les cheveux trempés ainsi qu’un regard de possédé qui lui donne définitivement un air maléfique sur « Empty Graves » lorsque ce dernier hurle comme si sa vie en dépendait : « Ils ne sont rien ». Un très bon moment passé, donc.

Nostromo

Mes compatriotes de Nostromo déboulent remontés, il faut bien le dire, comme des coucous suisses (elle était facile celle-ci, je sais !). Le combo avait fait très forte impression en 2017 et bien de l’eau a coulé sous les ponts puisque le groupe s’est officiellement reformé, a signé sur le label de Louis Jucker Hummus Record, et sorti un nouvel opus.

C’est donc un vrai groupe que nous voyons devant nous en ce début d’après midi, quelque peu chaotique : chaleur, monde et bien affreuse boue collante à l’entrée des scènes. Comme à l’accoutumée, le son du combo est ultra compressé et fort, très fort. Le grind des helvètes est attendu et l’entrée spectaculaire de son frontman Javier Varela, qui affiche une magnifique boule à Z ainsi qu’une puissante barbe grisonnante. Ses yeux bleus, exorbités donnent au gaillard un air de fou furieux échappé de l’asile. J’adore !

Côté musique, là aussi, l’eau à coulé sous les ponts depuis Ecce Lex. Si le groupe a conservé ce côté très saccadé et l’aspect fiévreux de ses titres, l’ensemble reste désormais mu par quelque chose de plus « pâteux » mais aussi de plus heavy. Le groupe nous gratifie de plusieurs morceaux tirés de Bucéphale. Majoritairement heavy, donc, les titres n’en restent pas moins accrocheurs et curieusement mélodiques (si on peut dire ça comme ça !). Mention spéciale à cette équipe qui ne s’économise pas une seconde et sans jamais donner dans l’alambiqué gratuit, parvient à distribuer des titres à la violence colossale tout ceci dans la bonne humeur et la simplicité. Espérons à présent que les Suisses poursuivront cette belle aventure encore bien des années !  

Akiavel

S’il est une belle surprise en cette après-midi, c’est bien la présence des Provençaux d’Akiavel. Le groupe n’était pas au programme et pourtant les voilà ! Quand résonnent les premières notes de « The Witness » au relent black metal, pas de doutes, l’épreuve de la scène au Hellfest sera une formalité. On apprécie le regard possédé de sa chanteuse Auré. Autant le dire d’emblée, ici pas de larmes gothiques. Plutôt des growls terrifiants, des guitares qui tranchent la gorge et une batterie très marquée death.

« My Lazy Doll » et ses relents Arch Enemy tant dans les riffs que son refrain font leur petit effet sur l’assistance qui se laisse embarquer et gesticule comme il se doit tandis que la chanteuse nous assène de machiavéliques grimaces qui lui donnent un air démoniaque. Finalement, c’est sur la reprise d’un certain Sepultura “Roots bloody Roots” que se termine de la plus belle des manières cette prestation ultra enthousiaste et qu’on se le dise, la formation a marqué des points cet après-midi.

Full of Hell

Au fil des années, j’observe sur le site un certain nombre de changement dans la fréquentation des différents espaces. L’étiolement des scènes Altar et Temple dans l’après midi lorsqu’il ne s’agit pas d’un énorme truc, est assez significatif de ce qu’il se passe depuis ces deux dernières éditions : d’une part, certains festivaliers font le piquet devant les Mainstage depuis trois heures de l’après midi jusqu’à une heure du mat’! D’autre part, les choses parfois un peu « décalées » n’attirent qu’une très fine couche du public.

Les riffs de Full of Hell ont la qualité de leur défaut : leur musique à cheval entre le grind et l’experimental noise attirent un public fidèle, mais peu nombreux. Et il faut dire que malgré l’énergie démentielle de son frontman le combo joue devant un parterre relativement vide. Quel dommage ! Les machines qui envoient des bruits déglingués, suraigus alors que son guitariste ultra concentré, laisse traîner çà et là des sons dérangeants qui plongent alors l’auditeur dans des climats ultra pesants mais aussi, paradoxalement, très vaporeux. C’est le de la haute voltige que de hurler à plein poumon comme le fait Walker, son chanteur, et franchement, chapeau les artistes d’arriver à développer une intensité pareille devant si peu de monde. Chapeau aussi à son batteur qui « démonte » littéralement son kit de batterie avec de schizophréniques blast beat en bon intelligence avec le duo basse et guitare. Un ovni à l’énergie spectaculaire.

Bongripper

Je profite de cette chronique pour en finir avec ce débat à la con : pour ou contre la nouvel Valley. Mon point de vue en une seule phrase : on s’en branle. Voilà. Fin de l’histoire.

Le nouveau site est fantastique. Grand, spacieux , on peut danser, entrer en transe comme il faut et surtout : prendre son temps dans un espace donné. Le doom en général et l’ultra doom de Bongripper, en particulier, nécessite un espace adéquate. Ici, commence un enfer en règle. D’abord un soleil impitoyable, puis un son d’une lourdeur qui dépasse celle de Conan (si c’est possible !) et une batterie minimaliste composée de deux cymbales, tout comme la set list : deux titres.

Le combo de Chicago ne fait pas dans la dentelle. Et c’est soleil acharné désormais qui nous brule la peau tandis que nos oreilles vibrent comme s’il y avait un tremblement de terre sous nos pieds. Rarement, la Valley n’aura encaissé une telle puissance de frappe, une batterie définitivement rocailleuse, un bassiste qui arbore un très beau teeshirt estampillé Envy, et ses deux guitaristes semblent totalement envoutés dont les notes semblent plus graves à mesure que se déplie ce deuxième et dernier morceau qui porte très bien son nom : « Slow ». Le ciel s’assombrit et je jure que cette ambiance caverneuse aura eu raison de la nature puisque le concert se termine…sous une pluie battante et glaciale. Mystique. Définitivement.

Papa roach

Dire que le combo est attendu est un doux euphémisme. Jacoby Shaddix déboule comme un furieux, le visage écarlate, affublé d’une grosse veste et d’un pantalon en cuir. L’enthousiasme et l’excitation du public est à son comble dès les premières notes de “Kill the Noise”. Rarement, la Mainstage n’aura eu de pareils indisciplinés dans les mosh pit. Nom de zeus. Pourquoi faut-il que des gaillards (et des gaillardes) de plus de 100 kilos décident de se faire porter par la foule, sac à dos visé sur la couenne transpirante affublés de rangers taille 46, pourquoi ?! Des festivaliers arrivent sur nos têtes par paquets de dix, si bien qu’on passe plus de temps derrière que devant alors que nous en sommes à dix minutes de concert calés à la barrière. Quelques personnes devant moi suent à très grosses goutes y compris votre serviteur.

Le « Firestarter » de Prodigy achèvera une partie de l’assistance qui quittera les barrières sur les genous à force de se manger des rangers taille 46 depuis près d’une demi-heure, mais ce qui est concédé est immédiatement repris puisqu’arrive quelques golgoths de près de deux mètres visiblement très infusés. L’instrumentale « Lullaby » des immenses The Cure est un petit moment d’accalmie qui ne durera pas longtemps. Et les choses s’intensifient dramatiquement lorsque résonnent les premières notes de « Scars ». j’ai presque eu l’impression que Jacoby en s’essuyant le visage juste avant de démarrer, allait tourner de l’œil. La tension et l’excitation sont à leur comble pendant ce concert réglé aux petits oignons. La voix de Jacoby est identique à ce qu’elle était il y a 20 ans. Ce type est un alien. Il ne vieillit pas et l’intensité reste la même. On comprend pourquoi le combo a eu tant de succès avec Infest.

Le groupe ne se ménage pas et les titres accrocheurs, qui ont fait le plaisir de mes esgourdes au début des années 2000 sont là et des titres comme « No Apologies » et « Last Resort » ont tout des hits entraînants. Clairement, les ricains savent écrire des tubes et qu’il est bon de voir que ce groupe, qui avait illuminé mes soirées arrosées lorsque j’étais encore un jeune éphèbe, me met encore la trique 20 ans après. La nouvelle génération qui découvre ce soir le combo se fait plaisir et la foule est totalement déchaînée depuis près d’une heure. Les visages sont défaits, la sueur coule à très grosse goûte sur des corps brillants qui semblent sortir d’un combat à mains nues. Jamais le Hellfest n’aura aussi bien porté son nom. 

Machine Gun Kelly

Encore un groupe qui aura fait couler de l’encre. Ben Barbaud a des burnes en vibranium, c’est une évidence. Personnellement, en son temps, j’avais beaucoup aimé le rap nerveux et sec de MGK et apprécié ses arrangements électriques. Alors, oui, c’est un people, mais on s’en balek non ?! Ce soir, les décors postapocalyptiques sont splendides et son flow complètement adéquat à cette musique à mi-chemin du metal et du rap.

Bien sur les choses évoluent dans les festivals, mais qu’on se le dise, le public change et personnellement, je trouve que ce mec a fait le boulot ce soir !

Oui, MGK est un énorme poseurs aux yeux bleus, oui la guitariste, ses cheveux blonds d’un mètre et son short ultra moulant nous feraient presque oublier que sa guitare ne semble pas systématiquement branchée, mais « Papercuts » « Drunk Face » et « God Save Me » sont des tubes édulcorés qui, ma foi, sont fort agréable à écouter, ici et maintenant. Et on passe un bon moment. De plus, le public semble très heureux d’être là et l’apparition d’un certain Tommy Lee (singé par MGK dans le biopic consacré au groupe) ou encore les multiples décors qui évoluent au gré du show (pyramide géante, écrans et musiciens tous plus hétérogènes dans leur look, les uns que les autres) donne à cet ensemble une dimension carnavalesque pas sans rappeler un certain… Mötley Crue.

Comme par hasard. Dont acte. Pour ma part, j’ai trouvé tout ça très convaincant malgré l’attitude parfois (souvent) hautaine d’un chanteur qui avait l’air particulièrement déchiré et halluciné ce soir. La rockstar est ce qu’elle est. Sûre d’elle-même et cynique. Les gens adorent pourtant et qui est étonné ? 

Motley crue

Je vais faire bref. J’ai attendu de longue date de voir le crue. John 5 est un sacré bonhomme. Qui d’autre pouvait prétendre remplacer l’immense Mick Mars. Qui ? Le problème, c’est que ce soir, j’ai une vilaine impression. La voix de Vince Neil sonne étonnamment bien ce soir et pour cause ! Il y a par moment beaucoup de playbacks vocaux. Et je ne parle pas du reste. La guitare semble aussi à côté de la plaque par moment. Et pourtant, les décors sont chouettes tout comme les choristes ! Que dire de plus ? Le son n’est pas au niveau d’un tête d’affiche qui assène pourtant de bien beaux classiques ce soir « Shout at the Devil » « Home Sweet Home » « Dr Feelgood » « Girls Girls Girls ». Bref. J’ai aimé voir ces légendes, là devant moi, un peu comme si j’avais vu passer le pape en quelque sorte. De ce concert, je retiens le très beau solo d’un John 5 qui prouve une fois encore ce soir encore qu’il est un sacré zicos malgré quelques vilaines simagrées de playback dont on ce serait vraiment passé.

Sum 41

Comment clore un vendredi mieux qu’en voyant une (autre) légende et, cette fois, une, qui ne joue pas en playback ? En terminant en beauté avec Sum 41 qui, là aussi, avait illuminé la fin des années 90 avec un certain Blink 182. Le concert se déroule sans encombre mais quelle fatigue. Encore sous le coup de l’assault de Papa Roach, les “motivation”, “We”re All to Blame” et le très mélodique “No Reason” passent comme une lettre à la poste et le très en voix Deryck Whibley n’a rien perdu de sa voix. Les canadiens enchainent les tubes et loin d’être une reformation le groupe est définitivement de retour faisant danser tout le monde avec de l’ancien de Half Hour of power jusqu’au plus récent Order in Decline. Finalement, à la question “comment ça va ?”, la réponse est simple : impeccable.

Il est tard, très tard. 2H00 du mat. Le site est BLIN-DÉE. Il va falloir s’exfiltrer mais d’abord je vais descendre un litre de coca frais. Je n’en peux plus. Le week-end sera chargé, c’est une évidence.

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