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L’Âge de l’accès. La nouvelle culture du capitalisme. Jeremy Rifkin

Par Levidepoches
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« Ce sont les idées, les                 images, et non plus les choses, qui ont une vraie valeur dans                 la nouvelle économie. Ce sont l’imagination et la                 créativité humaines, et non plus le patrimoine matériel,                 qui incarnent désormais la richesse. »
Résumé Pour Jeremy Rifkin, nous entrons dans une ère nouvelle, l’âge de l’accès. Les marchés laissent la place aux réseaux, les biens aux services, les vendeurs aux prestataires de services et les acheteurs aux utilisateurs. La notion d’accès se substitue à celle de propriété. Cette évolution s’accompagne d’une marchandisation des rapports humains et de la privatisation de la sphère culturelle.
Commentaire critique Les notions d’accès et de réseau prennent de plus en plus d’importance et sont en train de transformer la dynamique de nos sociétés, comme l’avaient fait les notions de propriété et de marché à l’aube de la modernité. Les produits se périment de plus en plus rapidement. Alors, à quoi bon s’endetter pour les acquérir alors qu’ils seront périmés lorsqu’on aura fini de les payer. Être abonné, adhérent, client devient aussi important qu’être propriétaire. « C’est de l’accès plus que de la propriété que dépendra désormais notre statut social. »
Alors que l’économie industrielle se caractérisait par l’accumulation de capital matériel, la nouvelle économie se fonde davantage sur des formes de pouvoir immatériel, des faisceaux d’informations et de connaissances. En témoignent la réduction des espaces de bureau, la disparition des stocks, le déclin de l’épargne et l’essor de l’endettement personnel. Ce qu’on vend, ce sont surtout des idées et des images et leur incarnation matérielle est de plus en plus secondaire. Nike est un parfait exemple de cette évolution. Les services occupent une part croissante de la consommation et les entreprises s’efforcent de transformer les objets de consommation en « supports » de toutes sortes d’améliorations potentielles et de services à valeur ajoutée, afin que les vendeurs puissent amorcer une relation de long terme avec le client bien plus lucrative que la vente de l’objet lui-même. On va même vers des produits gratuits pour des services payants (Microsoft offre ainsi son système de navigation sur la toile). Enfin, l’âge de l’accès se caractérise par une marchandisation croissante de l’intégralité de l’expérience humaine. Ce n’est plus la production mais le marketing qui occupe le devant de la scène et le contrôle du consommateur devient l’objectif premier de l’activité économique.
Le consommateur se trouve happé par un réseau dense de relations commerciales continues qui couvrent pratiquement les moindres aspects de son existence, et risque de tomber sous la coupe de forces économiques qu’il ne comprend plus guère et qu’il ne contrôle plus du tout. « La transformation en marchandises des relations humaines est une entreprise pour le moins troublante. L’assignation d’une valeur marchande à la totalité de l’existence des individus dans le but de transformer l’intégralité de leurs expériences vécues en transactions commerciales représente en quelque sorte le stade suprême du capitalisme. »
Dans la seconde partie de l’ouvrage, Jeremy Rifkin se concentre sur la privatisation de la sphère culturelle. « La postmodernité correspond à une nouvelle époque du capitalisme qui repose sur la transformation en marchandises du temps, de la culture et de l’expérience. » Les secteurs de pointe du futur reposeront sur la marchandisation de toute une gamme d’expériences culturelles. Les voyages, les parcs à thèmes, les villes-musées, les complexes de loisirs, la culture du corps, le cinéma, la télévision, les mondes virtuels du cyberespace et toutes sortes d’activités reposant sur les médias électroniques sont en train de devenir centraux dans cette ère nouvelle qui exploite l’accès aux expériences culturelles. « L’ère industrielle a vu la transformation du travail en marchandise ; aujourd’hui ce sont les activités de type ludique qui sont transformées en marchandises consommées sous forme d’activités récréatives payantes. » Le consommateur se demande de moins en moins quel objet il souhaite posséder et de plus en plus quelle expérience il souhaite vivre. Les centres commerciaux américains (les malls) ne sont plus seulement des endroits où l’on va acheter des biens, mais des lieux où l’on va acheter l’accès à toutes sortes d’expériences vécues. Le cyberespace « est le nouveau théâtre universel où votre ticket d’entrée vous donnera le droit de participer à la représentation comme s’il s’agissait de votre expérience réelle ».
Cet empiètement de plus en plus important de la sphère marchande sur la sphère culturelle menace de détruire les fondements même de notre société. Elle menace la diversité culturelle car les intermédiaires culturels, les « passeurs », travaillent pour la plupart pour des multinationales américaines et japonaises dont les réseaux de communication et de distribution couvrent la planète entière. L’âge de l’accès favorise les jeunes qui sont à l’aise dans le monde du cyberespace et du commerce électronique et qui s’adaptent facilement aux univers simulés qui caractérisent la nouvelle économie culturelle. Au fossé des générations qui risque de se creuser, s’en ajoute un autre, économique et social, et encore plus grand : celui qui sépare les connectés des non-connectés. Mais il ne suffit pas de permettre à tout le monde de savoir se servir d’un ordinateur et d’être capable de se frayer une voie dans le cyberespace. La question la plus urgente est de retrouver « un équilibre écologique entre culture et marché », conclut Jeremy Rifkin.
La lecture de cet ouvrage est très stimulante. Il est illustré de nombreux exemples assez convaincants, même si on peut discuter certains points de détail. Par exemple, on peut s’accorder avec l’auteur sur l’idée que la place de la propriété est amenée à diminuer pour les ménages. Mais elle augmente pour les entreprises qui s’approprient des biens qui autrefois relevaient de la sphère publique. Jeremy Rifkin cite le cas de la sphère électromagnétique, mais pour montrer l’extension du réseau, et non pour nourrir sa réflexion sur le changement de la place de la propriété dans le postmodernisme. On peut regretter aussi un certain nombre de répétitions liées au plan choisi. Mais tout ceci ne remet pas en cause le fait qu’il s’agit d’un ouvrage important et d’une réflexion fine sur un nouvel âge du capitalisme.

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