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X 2167, 2168 et 2172 de Jean Bollack

Par Florence Trocmé

sur les X de Jean Bollack

X 2167. 22 septembre 2007
L’Orphée des sonnets, c’est celui de Rilke, la voix qu’il entend en son for intérieur ; c’est sa poésie, et ce qui la commande ; en fin de compte, l’analyse de ce qui constitue la poésie, et en même temps ce qui représente le poète, celui qu’il est lui-même, comme une incarnation de tous les poètes, qui aient jamais écrit, à travers les âges. Il s’y rattache. On continue à se référer toujours à eux, en reprenant et en modifiant les mêmes thèmes. La contradiction de Celan n’y est pas envisagée ; il n’a pas d’Orphée. Ce serait chez lui l’unique révélation, au-dessus ou au-delà des croyances établies. Cette instance personnelle forme l’unique idole, installée en soi et dans la langue qui se forme à son écoute. On passe, de Rilke à Celan, d’un moi à un autre.

X 2168
Il n’y a pas proprement chez Rilke de "personnalisation" comme chez Goethe, à sa manière, ou comme chez Celan, autrement ; il n’a pas moins mis en relief l’importance d’une relation axiale entre un sujet producteur, productif dans la langue, et le monde des objets appelés, qui surgissent au dehors dans l’extension du monde (voir le premier sonnet du deuxième cycle). Les choses se présentent devant un regard, mais elles ont été comme créées auparavant par le "moi" du poète, préconçues avant d’être dites. Proust disait que la seule réalité est celle à laquelle on a pensé.

X 2172. 23 septembre 2007
Le premier cycle des Sonnets de Rilke se termine par le thème suprême d’une mise à mort sacrificielle (l’ « Opfertod »), wagnérienne. L’idée se situe dans une tradition chrétienne ou rechristianisée. L’origine peut ainsi être fortement transférée ailleurs, portée jusqu’aux ressources mythiques d’une littérature remythifiée par l’étude minutieuse de ses éléments constitutifs. Le mythe est comme démystifié à la fin, et modernisé ; il est présenté comme un haut fait de la poésie et aussi comme une conquête rationnelle de l’intelligence. Le transfert n’a pas de quoi surprendre. Il faut considérer tout ce que l’étude poétique, renouvelant une matière conventionnelle, écarte de fait, ou aurait permis d’écarter, à cette époque, du côté des religions et des festivités germaniques païennes et  collectives.

©Jean Bollack

Contribution Tristan Hordé


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