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Dégustation des vins de Marc Kreydenweiss

Par Eric Bernardin

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marc
Mercredi dernier, autour d'une table bien garnie, mon club de dégustation organisait une dégustation de vins de Marc Kreydenweiss (Andlau, Bas Rhin). Je ne pouvais rater cette soirée : j'ai travaillé sur ce domaine en 1996-1997, et même si le boulot y fut vraiment éprouvant, j'en garde de merveilleux souvenirs. Avant que Marc ait eu la révélation de ce qu'était un Grand Vin, le domaine portait le nom de son grand-père, Fernand Gresser. Il changea alors radicalement de style, d'abord en réduisant les rendements puis en passant en bio-dynamie à la fin des années 80. Histoire d'assumer personnellement ces changements, il donna son nom au domaine. D'un côté, il perdit une bonne partie de sa clientèle qui ne reconnaissait plus les vins qu'elle connaissait, de l'autre il gagna la reconnaissance de la critique - entre autres Parker qui lui octroya de superbes notes - qui le fit connaître dans le monde entier. Depuis, il a racheté un domaine en Costière de Nîmes, où il passe beaucoup de temps avec sa femme. Aussi, le domaine alsacien a été repris par ses deux fils, Maenfred et Antoine. Jusqu'au 11 décembre dernier, jour où Maenfred est mort accidentellement en coupant un arbre. Aussi dédié-je ce compte-rendu  à ce jeune homme sensible avec lequel j'avais partagé de beaux moments.

maenfred


Pour une fois, les vins ne sont pas servis à l'aveugle. Afin de comprendre l'impact du terroir et du cépage sur les qualités gustatives du vin, il était préférable de les connaître en les buvant.

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Pinot blanc "la fontaine aux enfants" 2007 : nez bien mûr de fruits jaunes et de miel. Bouche ample, mûre et fraîche à la fois, soutenue par une fine acidité. Finale goûteuse et persistante. Issu d'une parcelle perchée derrière le Kastelberg, ce vin se démarque totalement de ce que l'on attend d'un pinot blanc, souvent réduit à un vin de soif. Tout en cueillant un raisin presque surmûri,  les Kreydenweiss ont réussi à garder une bonne fraîcheur. Merci la bio-dynamie (et le terroir).
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Andlau Riesling 2007 :
nez assez discret sur le fruit de la passion, le citron et l'anis. Bouche ronde soulignée par une acidité élancée et un (très) léger perlant. L'ensemble a un très bel équilibre, d'une grande finesse. La finale, mâchue, a une belle persistance sur des notes citronnées.
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Kastelberg Riesling 2005 :
nez sur le citron confit et la cire. Bouche démarrant sur une douceur saline, puis prenant du relief et de l'acidité progressivement pour finir intensément sur des notes d'agrume., avec un côté tannique. C'est peu de dire que le vin déroute (comme déroutera le vin suivant). Pour l'instant, j'ai la sensation que le vin est dans une phase intermédiaire où "il se cherche" encore...
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Wiebelsberg Riesling 2002 :
robe plus dorée que les précédentes. Nez sur la pomme chaude et l'aiguille de pin. Bouche de grande ampleur, bien fraîche, avec là aussi une acidité montant crescendo. Finale de belle intensité sur des notes terpéniques.  Une discussion s'engage pour savoir si le vin est oxydé ou évolué. Pour moi, cela relève de l'évolution normale.

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Clos Rebberg Riesling 2006 :
nez très "pointu" sur le zeste de citron, la roche fumée. Bouche avec une attaque vive et intense, se poursuivant sans relâche avec un grand élan, mais aussi un gras et une intensité aromatique de premier ordre; et une excellent finale, peut-être encore plus belle que ce qui précède. Ca décoiffe. Déjà très bon maintenant, et sûrement encore meilleur  dans quelques années, comme nous le montre le vin suivant (à noter que les étiquettes de ce millésime sont signées du vigneron Charles Joguet).
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Clos Rebberg Riesling 2000 :
nez sur le citron confit, la cire  et des notes "pétrolées". Bouche ample, très aérienne, quasi irréelle, délicatement soulignée par une acidité vibrante qui vous transperce l'âme. Un vin et une matière superbe dans un millésime pourtant pas facile. L'idée folle de faire renaître ce vignoble envahi par la forêt trouve ici sa parfaite justification. Pour moi, le vin de la soirée!
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Clos du Val d'Eleon 2005
(Riesling & Pinot Gris) : nez mûr sur le miel et la poire. Bouche ronde, fraîche, charnue, légèrement grasse, avec une acidité presque tranchante. Finale nette, fraîche, un peu courte. Perso, j'ai bien aimé, mais je me sens bien seul. La plupart des dégustateurs semblent désorientés et ne comprennent pas le sens de ce vin. Peut-être parce qu'il n'y a rien à comprendre. Seulement le boire pour ce qu'il est, et pas ce qu'il devrait être...

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Kritt Gewürztraminer 2007 : nez épicé  qui m'évoque plus le savagnin que le loukoum (me comprendra qui peut). Bouche ample, élancée,  d'une fraîcheur cristalline, évoquant le caillou humide et la fumée. Finale moyenne laissant percevoir un léger sucre, parfaitement intégré.

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Clos Rebberg Pinot Gris 2005 : nez sur la poire, le miel, puis le caramel au beurre. Bouche ronde, gourmande, saline, avec un beau gras. Finale charnue, fraîche  et florale.

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Clos Rebberg Pinot Gris 2005 "vendange de Noël" : robe plus dorée. Nez sur le coing, l'orange confite et les épices (de Noël!). Bouche d'une densité et d'une minéralité presque dérangeantes. Du gras et de l'acidité dans un bel équilibre. Et une finale sur l'orange amère TRES persistante, à la limite de l'obsédant. Ne peut laisser indifférent...

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Moenchberg Pinot Gris 2003 : nez très floral. Bouche ample, toute en finesse, avec un joli gras et traversée par une acidité vibrante.  Finale légèrement sucrée, plutôt courte. Un brin frustrant.

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Moenchberg Pinot Gris 2005 : nez sur la poire et le lard fumé. Bouche ronde, limpide, d'une grande fraîcheur, avec une superbe acidité. Finale d'une grande minéralité.

Une dégustation qui m'a beaucoup plu, même si j'aurais aimé tombé sur un Kastelberg plus minéral, plus dominateur. Avec le 2005, je suis un peu resté sur ma faim... Je suis par contre ravi de ce qu'est en train de devenir le Clos Rebberg. Lorsque l'on voit que ce que peuvent donner ces très jeunes vignes sur ce sol schisteux, on se dit que dans quelques années, ce sera l'un des plus grands terroirs d'Alsace!

J'ai également conscience que tout le monde n'a pas accroché au style du domaine, assez différent des terroirs plus "sudistes". Et que l'on peut être désorienté par cela. Mais on s'y habitue, je vous assure ;o)



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