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Harcèlement racial discriminatoire d’un policier municipal stagiaire (CE, 13 janvier 2010, A. c/ Commune de Lattes)

Publié le 25 mars 2010 par Combatsdh

Annulation d’un refus de titularisation pour insuffisance professionnelle dans un contexte d’harcèlement racial et injonction à réexamen de la titularisation

Le Conseil d’Etat confirme la décision d’une Cour administrative d’appel d’annulation d’un refus de titularisation pour insuffisance professionnelle d’un fonctionnaire stagiaire, gardien de police municipale, qui avait fait l’objet d’un harcèlement discriminatoire à caractère racial ce qui a entaché la partialité des auteurs du rapport d’évaluation. En revanche, il censure l’injonction de procéder à la titularisation fondée sur la circonstance que le comportement du requérant se serait amélioré durant son stage.

En l’espèce, le requérant a été recruté en 2002 par la commune en qualité de gardien de police stagiaire. En 2003, le maire a refusé de prononcer sa titularisation au terme d’une prolongation de son stage.

En cassation, le Conseil d’Etat estime que, « dans un contexte de harcèlement à connotation raciste », la CAA a justement retenu la partialité des auteurs des rapports et appréciations portées sur ce fonctionnaire territorial stagiaire par trois de ses collègues de la police municipale. Elle n’a pas dénaturé les faits et pièces du dossier en retenant que le service était, durant la période de stage, marqué « par des dysfonctionnements manifestes, en particulier une division des personnels en camps antagonistes et des comportements à connotation raciste visant directement [le requérant] ».

Au vu de l’ensemble des circonstances ayant entouré le stage, « accompagné d’insultes, dénigrements et mises en accusation entre collègues, qui ont pu avoir une influence sur l’attitude de l’intéressé », la CAA a pu, sans dénaturation ni erreur de droit, estimer que, dans de telles conditions, il n’était pas établi que les seuls griefs qu’elle n’avait pas écartés à raison de la partialité des témoignages auraient conduit l’autorité administrative à prendre la même décision.

Cependant, le Conseil d’Etat censure pour erreur de droit la décision de la CAA qui n’a pas fondé l’annulation du refus de titularisation sur l’erreur manifeste d’appréciation du maire mais sur le fait que les circonstances du déroulement du stage n’avaient pas permis que soient appréciées les capacités professionnelles du requérant. Ainsi, par suite, est annulée l’injonction au maire de procéder à la titularisation qui était fondée sur la circonstance que le comportement du requérant se serait amélioré durant son stage. Après évocation, le Conseil d’Etat donne seulement injonction au maire de procéder au réexamen de la titularisation dans un délai d’un mois.

Rappelons, qu’en application de l’article 2 de la directive 2000/43/CE du Conseil, 29 juin 2000, l’article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 modifié par la loi n°2005-843 du 26 juillet 2005 prévoit qu’ « aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».
Le Conseil d’Etat ne fonde néanmoins pas expressément sur cette disposition - la loi de 1983 ainsi que la loi n°2004-1486 du 30 décembre 2004 (dont l’article 19 a été abrogé par la loi de 2008) sont simplement visées.

On remarquera que cette décision prolonge une décision du Conseil d’Etat annulant la délibération d’un jury d’un concours interne qui avait posé au candidat plusieurs questions portant sur son origine et sur ses pratiques confessionnelles ainsi que sur celles de son épouse ce qui était constitutif d’une des distinctions directes ou indirectes prohibées par l’article 6 de la loi du 13 juillet 1983 et une atteinte au principe d’égal accès aux emplois publics (CE, 10 avril 2009, n° 311888 , El Haddioui: AJDA 2009 p. 1386, comm. G. CALVES).

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CE, 13 janvier 2010, A. c/ Commune de Lattes (n° 314923)

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 Actualités droits-libertés du 23 mars 2010 par Serge SLAMA

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