Magazine Le vin

Sarkozy a-t-il menti aux viticulteurs ?

Publié le 13 septembre 2010 par Edonys
Sarkozy a-t-il menti aux viticulteurs ?

Oups ! Ça a du mal à passer !

Par Jean-Michel Peyronnet

 On le sait, les périodes électorales sont propices aux promesses plus ou moins hasardeuses. Bien des candidats vous le diront, racoler des voix est un métier. Il n’empêche, lorsqu’un futur président de la République dit vouloir rompre avec ses prédécesseurs en martelant dix fois par jour « je dis ce que je ferai et je ferai ce que je dis », on a envie de le croire. A tout le moins, on finit par espérer.

Certes, en politique, tout dire et son contraire ne porte pas forcément préjudice, les promesses n’engageant que ceux qui les reçoivent, comme disait l’autre. Mais Sarkozy nous avait promis la rupture ! Avec un mépris à peine voilé pour son prédécesseur, devenu le symbole de l’immobilisme et ringardisé d’office.

Eh bien chiche : il reste grosso modo 18 mois au Président de la République pour tenir les promesses faites aux vignerons durant sa campagne.

Ces promesses, les voici :

« J’ai parfaitement conscience qu’il y a une crise de la viticulture, bien sûr dans cette région [bordelaise]… Ce n’est pas une consolation, mais enfin, il y en a certaines où c’est encore pire ! Mais peu importe, la question n’est pas de savoir si la viticulture d’ici doit mourir avant les autres, la question, c’est que la France est une terre de viticulture, que la viticulture fait partie de notre histoire, de notre identité, de nos atouts, de la ruralité où elle est un élément de l’activité économique… Ce qui se passe avec la viticulture, c’est que vous êtes soumis à la concurrence internationale, que l’on n’imaginait pas il y a 30 ou 40 ans. Nous étions les seuls à savoir faire du vin, notre renommée était internationale. (…) On ne peut pas vous demander de faire la compétition en vous mettant deux boulets aux pieds. Il y a des règles, elles doivent être les mêmes pour tout le monde. (…) On ne peut pas assimiler le vin au tabac ou à une drogue. Le tabac, ce n’est jamais bon pour la santé, le vin ça peut-être bon pour la santé. Le problème du vin, c’est l’excès de consommation, le vin n’est pas une drogue. J’en ai tiré une conclusion assez simple, c’est que la prohibition sur la publicité pour le vin, c’est une question dont nous devons reparler. On ne peut pas avoir la totalité de nos concurrents qui ont le droit de faire une publicité, et les seuls qui n’auraient pas le droit seraient ceux qui sont porteurs de la tradition française, de l’expérience française, et de la production française de qualité. Je le dis d’autant mieux – et je prends mes responsabilités – que je ne lèverai pas le pied sur les contrôles. Autant je crois qu’il est logique d’ouvrir la publicité à un produit qui n’est pas en soi dangereux, autant la question de la mortalité sur les routes, c’est une question pour laquelle on ne peut pas négocier. »

Précisons que Nicolas Sarkozy a tenu ces props dans les chais de Jean-Claude et Jean-Pierre Quet, aux Artigues-de-Lussac, le 1er mars 2007. Depuis, on le sait, il y a eu « la crise ». Mais en la matière, le locataire de l’Elysée ne saurait s’abriter derrière la conjoncture actuelle pour ne pas tenir ses promesses, la crise ayant justement rendu encore plus urgente une libéralisation de la parole sur le vin dans les grands médias, et notamment à la télévision.

Sarkozy, un Chirac aux petits pieds ?

C’est pourquoi nous engageons tous les professionnels du vin, vignerons, négociants, distributeurs, prescripteurs, journalistes à réclamer l’arrêt de la diabolisation du vin par un lobby médico-talibanesque grassement subventionné et pratiquant volontiers la désinformation en la matière.

En tant que journalistes, nous réclamons la libération de la communication – rédactionnelle et publicitaire – sur le vin dans tous les médias, mais aussi de tous les produits culturels – et même du cigare qui s’accorde fort bien avec d’autres produits de haute culture tels l’armagnac ou le cognac.

Nous attendons du Président de la République qu’il soutienne les amendements à la loi Evin allant dans ce sens, voire l’abrogation de cette loi inadaptée aux réalités éconmiques et culturelles du XXIe siècle.

Nous attendons également de Nicolas Sarkozy, qui, rappelons-le, a tenté d’exclure le vin des réceptions organisées lors de ses déplacements en province, la même attitude vis-àvis du vin et des vignerons français que le roi Juan Carlos d’Espagne ou que la chancelière allemande Angela Merkel qui, eux, défendent leurs viticultures nationales avec enthousiasme. Ils le font par goût, en raison de leur culture, mais aussi par pragmatisme économique.

Bref, nous souhaitons que la France redevienne en la matière un pays « normal », où le vin et les vignerons ne soient plus stigmatisés au plus haut niveau de l’Etat. Même le ministre de l’Agriculture évite d’employer le terme « viticulture », comme s’il s’agissait d’un gros mot !

Si rien ne bouge, alors il nous faudra bien constater que Nicolas Sarkozy a menti. Et nous n’aurons plus qu’à regretter que l’homme qui n’a cessé durant toute sa campagne de prôner le libéralisme, la responsabilité individuelle, de pourfendre le politiquement correct et l’immobilisme ne soit finalement qu’un Chirac aux petits pieds.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Edonys 239 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine