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Le compagnonnage inscrit par l'UNESCO au Patrimoine culturel immatériel

Par Jean-Michel Mathonière

Je suis particulièrement heureux de vous annoncer que le compagnonnage vient d'être inscrit au patrimoine culturel immatériel de l'humanité par l'UNESCO. Les Compagnons du Tour de France accèdent ainsi à la reconnaissance mondiale quant à l’originalité de leur méthode de transmission des savoirs.

Le compagnonnage inscrit par l'UNESCO au Patrimoine culturel immatériel

L'objectif de cette inscription n'est toutefois pas de « labelliser » le compagnonnage (ou les organismes de formation qui s'en réclament), ni de le figer sous sa forme actuelle ou d'une manière uniforme. Ainsi, si le dossier a été instruit avec la seule représentation des trois principales sociétés compagnonniques françaises (l'Union Compagnonnique des Devoirs Unis, l'Association ouvrière des Compagnons du Devoir, la Fédération Compagnonnique des Métiers du Bâtiment), ce ne sont pas ces organisations en elles-mêmes qui ont été ainsi reconnues, mais le « réseau de transmission des savoirs et des identités par le métier » que les Compagnons, de tous les Devoirs, mettent en œuvre selon des usages tissés au fil des siècles.

Le compagnonnage inscrit par l'UNESCO au Patrimoine culturel immatériel
Ascension 2008 des Compagnons tailleurs de pierre des Devoirs,
à Sommières-Congénies.
© Cliché Jean-Michel Mathonière.

On peut dès lors espérer que cette protection par l'UNESCO permettra aussi aux petites sociétés compagnonniques — j'entends par là les groupes authentiquement compagnonniques qui ont plus ou moins pris leur indépendance vis-à-vis des grandes structures précitées, par exemple l'association de Compagnons Passants tailleurs de pierre et la société des Compagnons tailleurs de pierre des Devoirs — d'affirmer haut et fort la légitimité de leur aspiration à vivre la tradition compagnonnique selon les règles dont elles sont co-héritières et qui ne sont pas nécessairement les mêmes pour tous les Compagnons, ou, du moins, perçues de la même façon par chacun. La préservation de la diversité est précisément l'esprit qui anime le concept de patrimoine culturel immatériel.

Le compagnonnage inscrit par l'UNESCO au Patrimoine culturel immatériel
Ascension 2010 de l'Association de Compagnons Passants Tailleurs de Pierre,
à Saint-Bertrand-de-Comminges.
© Photographie DR.

Suite:

Je me réjouis d'autant plus de vous annoncer aujourd'hui cette nouvelle que j'ai été sensibilisé très tôt à ce concept de patrimoine culturel immatériel, par l'intermédiaire de celui qui fut, bien trop brièvement, mon directeur de thèse d'université à Paris VII (Jussieu), Najm Oud Dine Bammate (1922-1985) — qui justement fit carrière durant une trentaine d'années à l'UNESCO. C'est là l'une des racines de la manière et de l'état d'esprit avec lesquelles sont menées mes recherches, ainsi que leur restitution au public, notamment par les conférences et les expositions et, bien sûr, le site internet. J'ai donc une pensée émue et recueillie pour celui dont la pensée, magnifiquement ciselée, m'a un jour apporté quelque lumière.

« Sauvegarder le patrimoine culturel immatériel signifie s’assurer qu’il joue toujours un rôle actif dans la vie des générations actuelles et qu’il est transmis aux générations de demain. Les mesures de sauvegarde visent à assurer sa viabilité, sa recréation permanente et sa transmission. Parmi les initiatives possibles de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel on citera l’identification et la documentation de ce patrimoine, la recherche, la préservation, la promotion, la mise en valeur ou la transmission, essentiellement par l'éducation formelle et non formelle, ainsi que la revitalisation de ses différents aspects. » (extrait document UNESCO : Qu'est-ce que le patrimoine culturel immatériel ?)

C'est là très exactement ce à quoi j'œuvre depuis des années et c'est ce à quoi répond la création en 2006 du Centre d'étude des compagnonnages, indépendant de toutes les organisations, et dans le cade duquel j'ai organisé depuis pas moins de onze expositions.

Le compagnonnage inscrit par l'UNESCO au Patrimoine culturel immatériel
Les Compagnons tailleurs de pierre de l'Union Compagnonnique
lors d'une réunion à la carrière d'Aubigny, en 2007.
© Photo Union Compagnonnique, DR.

Souhaitons donc que cette reconnaissance par l'UNESCO permette aux compagnonnages — pluriel qui m'est cher, au lieu du singulier trop facilement réducteur — de mieux connaître leur patrimoine culturel, afin, par ce regard instruit et de fait tolérant, de continuer à le transmettre efficacement aux générations futures d'artisans.

Pour en savoir plus sur le patrimoine culturel immatériel :

Télécharger la documentation générale de l'UNESCO : Qu'est-ce que le patrimoine culturel immatériel ?

Pour la presse :

Télécharger le communiqué de presse du Centre d'étude des compagnonnages

Télécharger la notice sur Jean-Michel Mathonière

Télécharger la notice sur le Centre d'étude des compagonnages

Le compagnonnage inscrit par l'UNESCO au Patrimoine culturel immatériel

L'homme pense parce qu'il a une main. Anaxagore (500-428 av. J.-C.)


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