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Un article de Pascal Boulanger sur Gilbert Bourson

Par Florence Trocmé

Pascal Boulanger m'a adressé cet article par lequel il désire attirer l’attention sur Gilbert Bourson, homme de théâtre mais aussi poète trop discret.Il m'envoie également le manuscrit inédit du recueil Sonates de Gilbert Bourson dont j'ai extrait deux sonnets/sonates

 

 

Le lierre, aujourd’hui, la foudre

 

Où en sommes-nous, sur quelle scène, dans quelle reprise et dans quelle outrance ? Quel univers de profusion se déploie sous nos yeux ? Quelles sonates résonnent sur la page ? L’écriture baroque de Gilbert Bourson s’élance dans les profondeurs musicales des choses vues, dans leurs incessantes métamorphoses et ce qui se donne à entendre, à travers élégies et lieds, ce sont d’abord de grandes singularités qui font corps : Homère, Properce, Catulle… Une foule de poètes pour qui le texte, tendu et intemporel, fait bruire le lierre et la foudre.
La poésie de Bourson passe aussi par l’expérience – la suspend et l’éclaire – car elle refuse toute concession au langage de la tribu. Le signe – ce poète a été responsable de la compagnie théâtrale Le groupe Signes pendant des années – s’ordonne en syntaxe, se déplie en musique, en sonnets et en sonates. Il est un antidote à l’éclipse de la pensée et de la beauté dont les volutes chatoyantes, qui sont de l’esprit et du sang, habitent la page. Ces pages, hors-jeu et dans le secret du jeu, cet écrivain secret les conçoit, les travaille depuis les années 1970. On mesure aujourd’hui l’éclat d’une posture rare qui, en marge du pacte social, médite le jaillissement du poème et le passage d’un monde muet et idolâtre à un monde enfin parlant quand le sensible prend l’oreille ou le regard (Merleau-Ponty).

Une contribution de Pascal Boulanger

Gilbert Bourson après avoir fait paraître quelques textes au cours des années 70/80 (dans les cahiers du double notamment) s’est surtout consacré au théâtre, adaptant pour la scène de nombreux textes de Sénèque, Dante, Flaubert, Rimbaud, Lautréamont, Jarry… Il n’en a pas moins continué d’écrire des poèmes et il vit aujourd’hui retiré dans la région parisienne.

Publications dans 49 poètes, un collectif (Flammarion, 2004) et dans Suspendu au récit, la question du nihilisme (Comp’Act, 2006).

Deux sonnets extraits du recueil inédit de Gilbert Bourson, Sonates :

Dans le jour bancal la mémoire s’endort,
Un air froid colle trop à la vitre qui baille
Et flatte le ciel gris. Ménages de balcons
Défleuris, murs et toits sans bonté, les oiseaux
Crayonnés à la hâte ne tentent plus guère
Les chats lents des mots. Trainards sont les bruits
Des pavés estropiés. Mais une bulle d’ombre
Vient comme un sanglot crever à la surface
D’une eau glauque et lisse. D’où vient ce sanglot
Que je ne saurai pas consoler? Je regarde
Au loin, me détournant lâchement du problème.
Mais en grelottant elle me met au cou
Son amulette, m’enlaçant comme un enfant
Qui sort d’un mauvais rêve et me dit: Garde moi.

Vladimir Holan, Montale, Michaux,
Celan, Elytis, Max Jacob et Ponge,
Reverdy, Paulhan, Marteau et le dur
Désir de durer d’Eluard, le cri d’Artaud
Le Tibet de Victor Segalen et les stèles
Et le maçon de Dieu, Audiberti le grand
Concasseur du défaut de langue, Norge aussi
Que la mouche le pique de chanter l’oignon,
Les quatre vérités, l’Icarie de plonger
Dans la verte purée, Benn qui s’est fourvoyé
Dans l’idéologie nazie et qui pourtant
Fut grand, le somptueux Supervielle le tendre
Et ses gravitations, Desnos l’halluciné
De Dadelsen, Queneau, Perros, Jouve et Deguy…


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