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Au sujet de la devise « sub hoc signo non œquivoca latet virtus » sur le Rôle des Compagnons Passants tailleurs de pierre d'Avignon en 1782

Par Jean-Michel Mathonière

Dans notre livre Travail et Honneur, Laurent Bastard et moi, nous avons longuement commenté un double élément particulier figurant sur le frontispice du Rôle « atypique » des Compagnons Passants tailleurs de pierre d'Avignon de 1782 : l'étoile flamboyante ornée de la lettre G et encadrée par une devise latine — sub hoc signo non œquivoca latet virtus (sous ce signe se tient une vertu non équivoque).

Au sujet de la devise « sub hoc signo non œquivoca latet virtus » sur le Rôle des Compagnons Passants tailleurs de pierre d'Avignon en 1782

Le Rôle des Compagnons Passants tailleurs de pierre d'Avignon, 1782.
© Cliché Archives départementales de Vaucluse, D.R.

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Nous avions noté (page 101) qu'il s'agissait là du plus ancien exemple de l'emploi par des Compagnons du symbole maçonnique de l'étoile flamboyante avec la lettre G, et même de l'unique exemple de son emploi chez les Compagnons Passants tailleurs de pierre.

En revanche, nous avions alors considéré que la sentence latine ne semblait pas provenir du corpus maçonnique et qu'elle renvoyait ici à « deux aspects complémentaires, l'un et l'autre placés exactement sur l'axe vertical du frontispice et coloriés de rouge : le signe, c'est-à-dire l'étoile flamboyante qui, avec la lettre G, se réfère à la géométrie, art des justes proportions (divisions) et de l'équilibre, et la Vertu “non équivoque”, c'est-à-dire la Justice, dont la figure se trouve en bas de cet axe et qui est également définie par la division (épée) et l'équilibre (balance). »

Peu de temps après la parution de Travail et Honneur (1996), Thierry Zarcone nous avait signalé que cette devise apparaissait en 1764 sur l'emblème de la loge maçonnique « La Concorde » de Beaucaire, ainsi qu'en atteste un registre connu sous le nom de « Manuscrit de la Concorde » (Archives départementales de l'Hérault, cote 1 J 62). Il est grand temps de profiter du blog pour signaler à notre tour cet élément venant légèrement modifier et compléter nos propos !

L'image dont je dispose est hélas de trop mauvaise qualité pour être utilement reproduite ici : on y voit la devise inscrite sur un phylactère qui surmonte, par dessus l'étoile flamboyante ornée du G, l'emblème proprement dit, composé d'un écu portant le compas, l'équerre, le maillet et le niveau, lui-même posé sur un dais couronné.

Il ressort donc de cette antériorité que l'empreinte maçonnique sur le rédacteur/dessinateur du Rôle d'Avignon de 1782, l'architecte Ponge, dit « La Douceur d'Avignon », est non seulement confirmée — comme nous l'avions longuement détaillé — mais aussi qu'elle prend racine dans les loges de la région d'Avignon. C'est là un sujet qui mériterait d'être approfondi, notamment au travers de l'étude des tableaux de membres de ces loges — sachant que certains Compagnons tailleurs de pierre, comme Ponge, peuvent y apparaître plutôt en tant qu'entrepreneurs en bâtiment, architectes, géomètres ou ingénieurs.

Sources :

Thierry Zarcone, Contribution à une Histoire de la Franc-Maçonnerie dans le Midi de la France au dix-huitième siècle. Le témoignage de la Loge de la Concorde de Beaucaire, imprimerie Malé (avec le soutien de la Respectable Loge Aurore Sociale à l'Orient de Beaucaire), Avignon, 1983.

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Deux livres pour approfondir ce sujet (cliquer sur la couverture pour accéder à leur notice de présentation) :

Au sujet de la devise « sub hoc signo non œquivoca latet virtus » sur le Rôle des Compagnons Passants tailleurs de pierre d'Avignon en 1782

Travail et Honneur ;
les Compagnons Passants tailleurs de pierre en Avignon aux XVIIIe et XIXe siècles
par Laurent Bastard et Jean-Michel Mathonière

Serpent compatissant

Le Serpent compatissant ;
iconographie et symbolique du blason des Compagnons tailleurs de pierre

par
Jean-Michel Mathonière

Au sujet de la devise « sub hoc signo non œquivoca latet virtus » sur le Rôle des Compagnons Passants tailleurs de pierre d'Avignon en 1782

L'homme pense parce qu'il a une main. Anaxagore (500-428 av. J.-C.)


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