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Au fil de l'eau suivi de Haïkaïs (par Jean-Pascal Dubost)

Par Florence Trocmé

Au fil de l'eau suivi de Haïkaïs (par Jean-Pascal Dubost) Une nouvelle édition considérablement augmentée pas son éditeur et fin limier, Eric Dussert, en qui on peut avoir confiance dès lors qu'il s'agit d'entreprendre des fouilles historiques dans la littérature française, et à qui il importe de porter à la connaissance du grand public les noms de ceux qui ont introduit cette forme (devenue genre) fort prisée dans l'hexagone depuis que les ateliers d'écriture s'en sont emparé ; par ainsi, dans le détail et dans une introduction documentée, de narrer le parcours du haïku à travers un siècle français (non sans faire un détour par le pays où il fut ingénieusement pratiqué, les États-Unis, en la personne du plus éveillé des haïkistes ou haïdjin, Jack Kerouac) ; le haïku, qui, probablement, et ça n'est pas une de ses moindres vertus, signa la fin de l'empire du poème long dans la poésie française. Au fil de l'eau fut le titre d'une brochure publiée en 1905 à trente exemplaires et hors commerce par trois auteurs aux noms de Paul-Louis Couchoud, André Faure et Albert Poncin, qui lancèrent donc la vogue du haïku en France, que relaiera un numéro de la Nouvelle Revue Française consacré au haïku, en 1920, sous la direction de Jean Paulhan. Tout a été dit sur la technique du haïku, comme extraction du tanka, il ne sera pas inutile cependant, devant ce que maints auront pensé ou pensent devant l'apparente simplicité et facilité du haïku (" un jeu d'enfant ! " fut-il entendu un jour par l'auteur de cette critique, dans la bouche d'un instituteur), de rappeler ces propos de René Maublanc rapportés par Eric Dussert : " Il est beaucoup plus difficile de faire un bon haïkaï qu'on ne croit à première vue [...] Le haïjin [français] n'a pas l'appui commode de la tradition ; les artifices de la forme ne sauveraient pas pour lui l'indigence du fond ; il faut qu'il ait quelque chose à dire, et qu'il sache le dire avec le moins de mots possible. Or il est toujours plus facile de délayer que de condenser ", la difficulté qui consiste à concentrer le grand Tout dans un presque rien de trois vers. Considérablement augmentée disions-nous, cette réédition, puisque l'éditeur a rajouté une petite perle de 1922 signée par un poète mexicain Rafael Lozano, simplement titrée Haïkaïs et présentant la particularité d'avoir été publiée à la japonaise, autrement dit à lire dans le sens inverse de nos habitudes, en commençant par la fin de l'ensemble, et écrite selon, à une différence près, le tategaki japonais, c'est-à-dire de droite à gauche, et de haut en bas (mais, au contraire dudit format, avec un espace entre les mots) :

Quelque-chose rappelle le spatialisme ; et on reconnaîtra l'hommage appuyé à un célèbre haïku de Basho (1644-1694) :
Dans la vieille mare,
une grenouille saute,
le bruit de l'eau

Citant Henri-Simon Faure et Alain Malherbe parmi les poètes français auteurs de haïkus de facture originale, c'est-à-dire se démarquant de la veine et tradition japonisante (mais omettant Jude Stéfan et ses " 52 contre haï-ku "), Eric Dussert ouvre la porte à une suite, qui serait une exploration comparative du haïku pratiqué par les poètes français d'aujourd'hui (voire occidentaux).

Au fil de l'eau
suivi de haïkaïs
Les premiers haïku français (1905-1922)
Nouvelle édition établie par Eric Dussert
Mille-et-une-nuits
160 p., 4 €


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