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Un problème grandissant : la traçabilité

Par Mauss

La question des fausse bouteilles va devenir cruciale dans les années à venir.

Une définition : est fausse une bouteille dont le contenu n'est pas celui qui a été mis à la propriété ou par les sociétés de négoce ayant un droit de mise.

Est donc faussaire toute personne ou entité mettant un liquide dans une bouteille couverte par une étiquette ne correspondant pas au contenu versé.

Bien sûr, tout faussaire digne de ce nom va s'attaquer aux vins de prestige, ceux dont la valeur sur le marché lui permet de substantiels profits. On parle là de quelques très grands vins (en valeur financière) qui sont particulièrement recherchés par des amateurs fortunés.

Le faux peut être extrêmement grossier, comme tant de Lafite en Chine. Mais il peut aussi être particulièrement difficile à identifier quand le faussaire choisit les justes bouteilles, imprime les étiquettes avec un soin de faux-monnayeur, n'oublie pas de bien copier les bouchons, et fait faire des capsules à l'identique… sans oublier de mettre un vin authentique à l'intérieur.

Pendant longtemps, les faussaires étaient des artisans travaillant des vieux millésimes un peu vendus à la sauvette alors qu'il semble actuellement qu'on va vers de véritables industriels travaillant des années récentes, et avec des volumes conséquents.

En 2012, on a eu aux USA l'affaire Kurniawan qui est toujours en cours. Un artisan de haute volée, pour sûr ! Mais cela semble un peu la pointe de l'iceberg, tant les gains qui peuvent être générés par cette activité illégale sont potentiellement importants, sinon énormes !

Si un billet de banque est quand même difficile à reproduire - le néophyte se doit de vite revoir Gabin et Blier traitant du sujet - , jusqu'à nouvel ordre, reproduire une étiquette, un bouchon, une capsule, ce n'est pas - encore - un travail hyper-coûteux. Un bon ordinateur, quelques logiciels pointus, et l'affaire est faite.

Autre "sécurité" pour le faussaire : quand il s'agit de vieux millésimes, vendus très chers, c'est rarissime que l'acheteur les ouvre vite et s'il le fait, comme Koch, il a intérêt à être très bon pour ressentir un faux. Tant que l'analyse moderne ne permettra pas de donner toutes les informations sur le contenu d'une bouteille à travers le verre, donc sans l'ouvrir, ce sera très difficile de défendre cette idée. Tout le monde sait qu'un vin évolue dans le temps et donc, la réponse sera toujours de dire : problème de cave, de température, de transport, etc.

Sur l'étiquette, ma foi, rien n'était fait dans le temps pour décourager les faussaires éventuels. 

Maintenant, des solutions informatiques se mettent en place, et on peut imaginer aussi bien des indications cachées difficiles à reproduire ou même, à l'intérieur des bouchons, une puce informatique tout aussi difficile à recopier. Tout cela a un coût, mais pour un premier classé, c'est abordable.

On se posera longtemps la question de savoir à quel point la volatilité des prix de Lafite est liée à cette réputation plus ou moins juste de la quantité considérable de faux circulant en Asie.

Les Domaines ne peuvent contrôler la traçabilité qu'au niveau du premier acheteur. Si j'achète un vin, à priori, je peux en faire ce que je veux. Le produit m'appartient, et donc je peux le revendre à quiconque, le boire, le jeter, le donner, le cuire. Sauf à identifier clairement une erreur de copie, un producteur ne pourra jamais certifier l'authenticité du contenu. Car on a su que certains zozos siphonnaient ainsi avec du matériel chirurgical des grands crus, remettaient un autre vin plus ordinaire, et revendaient ces bouteilles aux enchères. Bien malin qui pouvait déceler ce type de faux.

Il ne reste donc comme solution pour les plus grands noms des vignobles européens d'étudier les propositions de haute technologie qu'on est en train de leur proposer.

Ceux qui vont être plus concernés par cette naissante industrie du faux, ce seront en premier les sociétés de vente aux enchères. Elles vont devoir donner le maximum d'informations sur les origines des bouteilles, éventuellement factures à l'appui (c'est délicat), car on imagine les émois de la profession si cela prenait une dimension majeure !

Il en sera de même au niveau des fonds de placement. Plus que jamais, ceux-ci devront développer une extrême vigilance dans leurs acquisitions. Ils ne sont pas pléthore, loin de là, ceux qui ont une politique particulièrement rigoureuse sous cet angle. Quelques sueurs froides à venir, sans nul doute.

On connaît tous les histoires de faux Modigliani et autres tableaux. Chacun a rencontré ces vendeurs à la sauvette de fausses Cartier ou faux Vuitton. Mais là où ces marques de luxe ont des moyens légaux et autres de se faire respecter,dans le monde du vin, où tout cela est un peu neuf, il va falloir étudier les propositions de haute technologie qui sont en train de se mettre en place.

Bref : si on vous propose un "coup" de belles bouteilles à prix hors marché, méfiez vous ! Ou ce sont des bouteilles volées, "tombées du camion", ou ce sont des faux.

Freinez l'appât du gain qui sommeille en vous :-)

Achetez, autant que faire se peut, à la propriété ou chez un revendeur que vous indiquera la propriété. Et n'oubliez jamais : les faussaires ne recherchent que les buveurs d'étiquette. Restez buveurs de vins, et vous serez sauvés !


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