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Henri michaux - deux textes

Par Ruedelapoesie @ruedelapoesie
HENRI MICHAUX - DEUX TEXTES
MA VIE S'ARRÊTA
J'étais en plein océan. Nous voguions. Tout à coup le vent tomba. Alors l'océan démasqua sa grandeur, son interminable solitude.
Le vent tomba d'un coup, ma vis fit « toc ». Elle était arrêtée à tout jamais.
Ce fut une après-midi de délire, ce fut après-midi singulière, l'après-midi de « la fiancée se retire ».

Ce fut un moment, un éternel moment, comme la voix de l'homme et sa santé étouffe sans effort les gémissements des microbes affamés, ce fut un moment, et tous les autres moments s'y enfournèrent, s'y envaginèrent, l'un après l'autre, au fur au mesure qu'ils arrivaient, sans fin, sans fin, et je fus roulé dedans, de plus en plus enfoui, sans fin, sans fin.
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RÊVE DE MOORE
…Et voyageant ainsi qu'on fait en rêve, elle arrive au milieu d'une peuplade de nègres.
Et là, suivant la coutume qui s'attache aux fils de roi, l'enfant royal est nourri par la mère et par la nourrice. Mais à la nourriture on ne laisse qu'un sein. L'autre est sectionné et la poitrine est plate comme celle d'un homme (sauf le nœud de la cicatrice).
La voyageuse, voyant cela, s'étonne.
Alors le vice-roi : « Vous avez bien remarqué comme tout le monde, n'est-ce pas, que quand l'enfant tette, l'autre mamelle, il la touche constamment et la caresse. C'est ainsi que ça va le mieux.
« Or la nourrice nous en coupons une pour que l'enfant apprenne plus vite à parler. En effet, ce sein absent l'intrigue tellement qu'il n'a de cesse qu'il n'ait pu composer un mot et interroger là-dessus son entourage.
« Et le premier mot qui vient, c'est toujours : abricot. »

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