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Le non-cumul des actions civile et pénale : un principe mis à l’épreuve

Publié le 15 février 2013 par Gerardhaas

juridictionPeut-on intenter à la fois une action civile et une action pénale pour les mêmes actes de contrefaçon ? Autrement dit, le cumul des actions est-il possible ?

Cette question fait l’objet de nombreux litiges et récemment, la chambre criminelle de la Cour de cassation vient d’en rappeler les règles dans une décision très pédagogique (arrêt du 18 décembre 2012, n°12-80.637).

Voyons les faits. Une société A a assigné une société B devant un Tribunal de grande instance (TGI) pour actes de contrefaçon et concurrence déloyale. Un peu plus tard, elle décide d’agir au pénal pour contrefaçon de marque et révélation de secret de fabrique. A la suite de cette plainte, le représentant légal de la société B est mis en examen du chef de contrefaçon.

Bien entendu, la société B tente de se sortir d’affaire et conteste la recevabilité de la constitution de partie civile de la société A sur le fondement de l’article 5 du Code de procédure pénale (CPP) qui prévoit que « la partie qui a exercé son action devant la juridiction civile compétente ne peut la porter devant la juridiction répressive ».

Cet article pose le principe du non cumul des actions civile et pénale. La partie qui a choisi de porter son action devant la juridiction civile ne peut se constituer partie civile devant la juridiction pénale.

Rappelons que l’objectif est de permettre à la partie lésée, victime d’un délit, d’avoir la possibilité de porter son action devant soit une juridiction civile soit une juridiction répressive. Ce choix de la victime a été consacré par l’article 5 du Code de procédure pénale. C’est le sens de la règle electa una via, non datur recursus ad alteram.

Le principe du non-cumul s’applique principalement pour interdire à celui qui a choisi la voie civile de saisir la juridiction pénale, or c’était le cas en l’espèce.

Toutefois, la jurisprudence a précisé que cette règle ne peut être opposée à la partie civile que si les deux demandes portées devant les juges civil et pénal sont formées entre les mêmes parties, ont le même objet et la même cause.

En outre, cette règle n’est pas d’ordre public et ne protège que les intérêts privés.

Dans notre cas, la chambre d’instruction du TGI puis celle de la Cour d’appel ont décidé que le dépôt de la plainte ne contrevenait pas aux dispositions de l’article 5 du CPP. Et c’est dans ce sens également que statuera la Cour de cassation.

La Cour va elle aussi considérer que le dépôt d’une plainte contre X pour des actes de contrefaçon, ultérieurement à l’assignation d’une société devant le TGI pour contrefaçon, ne contrevient pas à la règle énoncée à l’article 5 du CPP, même dans le cas où la procédure pénale débouche sur la mise en examen de la société assignée.

Or, en l’espèce, la Cour pointe le fait que la plainte contre X « avait pour but de faire établir la culpabilité de la société B » alors que l’action au civil visait la réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon. En conséquence, les deux actions n’avaient forcément pas le même objet. De ce fait, la société A pouvait légitimement intenter une action au civil et au pénal.

En définitive, la demande d’irrecevabilité de la plainte est rejetée par les Hauts-magistrats.

Il convient cependant de rester prudent puisque la règle electa una via trouve toujours à s’appliquer en cas d’identité des parties, de la cause et de l’objet dans les deux demandes.

Sources :

Cass. crim., 18 dec. 2012, n° 12-80.637


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