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La « track » sur Internet, en voie de disparition ?

Publié le 23 décembre 2013 par Gerardhaas

track - haasavocatsPas tout à fait ! Si l’Assemblée a rejeté le 17 décembre dernier un amendement visant à interdire définitivement la pratique de l’« IP tracking » (méthode d’identification des utilisateurs d’Internet au moyen du stockage de leur adresse IP) dans le but de faire varier les prix d’un produit ou service en ligne, il semblerait que cette pratique de l’ « IP tracking » aura rapidement vocation à disparaître et devrait déjà l’être.

A l’ère du numérique, des systèmes de géolocalisation, du Big data, de l’affaire PRISM, plus personne n’est dupe du fait qu’il fait l’objet d’une « traque » sur Internet. La question est de savoir à quelle fin ? Etude comportementale, sécurité nationale, augmentation des profits ?

L’appât du gain est l’un des motifs de cette traque qui consiste à enregistrer les adresses IP des utilisateurs Internet qui se connectent à un site marchand et d’augmenter (l’inverse est plus souvent rare) les prix en cas de connexions ultérieures.

Par ce moyen, l’e-marchand fait croire au consommateur que le produit ou le service se raréfie et l’incite à acheter de peur qu’il soit définitivement indisponible.

Il ne faut qu’un pas pour considérer que le consentement du consommateur est fortement altéré.

Or, il convient de rappeler que cette pratique est susceptible de tomber sous le joug notamment des articles L. 120-1 et L. 121-1 du Code de la consommation :

Art. L. 120-1 Les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère, ou est susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service.

Art. L. 121-1 I. — Une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l’une des circonstances suivantes: […]
2° Lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l’un ou plusieurs des éléments suivants:

a) L’existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service;

La CNIL devrait se prononcer prochainement à la suite d’une enquête menée aux côtés des services de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la répression des fraudes.

Toutefois, il est prévisible qu’elle sanctionne ce type de pratiques dès lors qu’elle ne semble pas en conformité avec les dispositions législatives et réglementaires relatives au traitement des données à caractère personnel. Car si la légitimité de la collecte pourrait porter à discussion, le traitement qui est fait desdites données n’est clairement pas autorisé. Autrement dit, la finalité pour laquelle les données IP sont collectées ne sont clairement pas indiquées aux Internautes et rentre par voie de conséquence, en violation avec la loi dite « Libertés informatique », et quoi de plus normal ! On n’affiche pas la poule aux œufs d’or.

Par ailleurs, il convient de signaler que la CNIL a récemment pris une nouvelle Délibération n° 2013-378 du 5 décembre 2013 portant adoption d’une recommandation relative aux Cookies et aux autres traceurs visés par l’article 32-II de la loi du 6 janvier 1978.

Dans cette délibération, elle tranche enfin la question de l’exploitation des cookies traceurs et cible précisément dans son article I ceux dont il est nécessaire de fournir et d’obtenir respectivement une information et un consentement préalable, à savoir :

 les Cookies liés aux opérations relatives à la publicité ciblée ;
 les Cookies de mesure d’audience (à l’exclusion de ceux définis à l’article 6 de la présente recommandation) ;
 les Cookies traceurs de réseaux sociaux générés par les « boutons de partage de réseaux sociaux »;
 A l’inverse, certains Cookies peuvent être déposés ou lus sans recueillir le consentement des personnes. Ce sont :
 les Cookies ayant pour finalité exclusive de permettre, ou faciliter la communication par voie électronique ;
 les Cookies strictement nécessaires à la fourniture d’un service expressément demandé par l’utilisateur ;
 les Cookies de mesure d’audience définis à l’article 6 de la présente recommandation.

Elle pose de nouvelles normes à ce « traquage » que désormais tous sites Internet (e-commerce, réseaux sociaux, forum, vitrine, etc.) devront respecter à la lettre.

Nous ne nous sentirons peut-être plus « traqués » mais saurons désormais en toute connaissance de cause que nous sommes tracés.

Sources:

http://www.cnil.fr/documentation/deliberations/deliberation/delib/300/

http://www.lepoint.fr/chroniqueurs-du-point/guerric-poncet/e-commerce-comment-le-ps-a-tue-la-trop-bonne-idee-de-l-ump-17-12-2013-1770468_506.php

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