Magazine Cuisine

Le temps des cerises

Par Irislisson

Les paroles de la célèbre chanson prennent un sens encore plus amer cette année. Les amoureux avaient peut-être du soleil au cœur, mais le temps était bien à la folie, avec des pluies et orages fin Mai, qui, encore une fois noyait la fête de la cerise le week-end dernier à Mons la Trivalle, comme ils avaient déjà noyé la fête de la rose à Vieussan le dimanche d'avant - et les cerises, qui pendant tant d'année avaient assuré le revenu des paysans bien plus que la vigne, n'ont pas su résister à tant d'eau - encore une fois une récolte perdu et un sacre coup à l'économie locale.


Le temps des cerises

Les Burlats, variété juteuse et bien noire, qui est idéale en clafoutis ou confiture, étaient à peine mûres et se vendaient sur les étales de fortune au bord de la route entre Saint Pons et Bédarieux, quand le mauvais temps s'y mettait et même si la vigne à Lisson a bien su résister à la pluie, les fruits bien fragiles eux, n'en étaient pas capables et des grappes entières ont pourries sur les arbres.

Restait toujours l'espoir, de voir une belle récolte des cerises blanches, qui se sont plantées beaucoup dans les années 80, parce qu’il y avait un débouché à l'export pour des grandes quantités. Des équipes de ramasseurs arrivaient de partout, pour aider et remplissaient les villages d'une vie colorée au mois de juin.


Le temps des cerises


Les caisses remplies de cerises (les mêmes caisses, que nous utilisons encore pour les vendanges) étaient livrées par les petits producteurs chaque soir à un point de ramassage, où les camions de la Sica du Caroux, coopérative de vente pour les fruits et légumes de la vallée, les enlevaient pour les expédier en Allemagne. Là, on les décolorait dans des bains d'acide, pour les recolorer ensuite et transformer en cerises confites pour la pâtisserie (et les réexporter vers la France, probablement...).

Leur seul ennemie était le vers de la mouche de la cerise - donc obligation, de les traiter avec des produits assez virulents jusqu'à deux semaine avant la récolte. Mais vu la transformation, que subissaient les cerises ensuite à l'usine, personne ne se souciait de cela. On laissait un arbre "pour la consommation personnelle" sans traitement, rigolait sur nos morceaux de plastique jaune dans les quelques arbres, qu'on avait en fermage à cette époque (des pièges à mouche, importés de Suisse, avant qu'on pouvait les trouver aussi en France) et était content du revenu régulier, que ce fruit apportait après le déclin des châtaignerais et de la vigne, déjà en crise depuis longtemps.

Quelques années avec des gelés au moment de la floraison dans les années 90 mettait une fin à cette euphorie - les récoltes étaient insuffisantes pour l'export et les gros clients s'orientaient vers d'autres régions pour leur fournisseurs. Quand il fallait trier sur l'arbre, pour avoir le bon calibre, le coup de la main d'œuvre commençait à peser de plus en plus lourd - du payement à l'heure on passait à celui au kilo, intéressant pour les ramasseurs que les bonnes années et sur des arbres bien entretenus... Donc petit à petit fini les joyeuses bandes venues de loin pour faire la saison - on se rabattait sur la famille, si elle était encore sur place...

Les grands arbres, qui bordaient la chaussée et donnaient un flair particulier à la vallée au moment de la floraison, périclitaient par manque d'entretient - la sécheresse de 2003 en achevait plus qu'un et les arbres s'abattaient - bien encore avant que la crise viticole nous apportait une nouvelle vague d'arrachage.

Cette année, ce n'est pas le gel, qui aura détruits la récolte, mais la pluie, qui à fait gonfler et éclater les fruits même avant maturité.

C'est bien triste, de voir tout ces fruits détruits, les vieux arbres mourants et les vignes à l'abandon, qui bordent la route cette année - et le dernier couplet de la vieille chanson prend tout son sens:

J’aimerai toujours le temps des cerises C’est de ce temps-là que je garde au cœur Une plaie ouverte … Et Dame Fortune, en m’étant offerte Ne pourra jamais fermer ma douleur J’aimerai toujours le temps des cerises Et le souvenir que je garde au cœur.



Epilogue:
Le temps des cerises


Mais venez quand même cet été sur les marchés, vous allez toujours trouver les cerises sauvées avant le déluge ou rescapées, transformées en succulentes confitures par nos petits producteurs locaux.

ps 1 : Nos vignes ont bien supportées le mauvais temps, au contraire, elles font plaisir à voir - mais je vous en parlerais dans un prochain article.
ps 2: et allez lire l'article de Ségolèle Lefebvre sur les cerises, qui vous aprends encore plus sur l'histoire et les variétés ici

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Irislisson 701 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog

Magazines