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Ulysse

Par Vertuchou

  
   à Claude    

   Au sud du bastingage
   il n'y plus rien jusqu'à la Terre Antarctique
   Léviathans et sirènes labourent ces prés marins
   ce portulan gaufré de vagues
   où d'immenses pans de ciel
   s'abattent en averses fourbues
   sans que Dieu lui-même
   en soit informé

   Chaque soir tu regardes la timbale du soleil
   plonger en hurlant dans la mer pommelée
   clins d'oeil des forts matous lovés dans les cordages
   Les espadons bleus filent devant l'étrave
   bande de bijoutiers en fuite

   Au delà des mois que tu n'as pas reçu de lettres
   tu es le dernier des parias à bord de ce navire
   le coeur rendu, un torchon d'étoupe à la main
   tout noir de souvenirs déjà
   tu t'abolis dans le tremblement des hélices
   tu écoutes le chant ancien du sang dans tes oreilles

   Caillots ensoleillés de la mémoire
   et dénombrement des merveilles
   quand tu savais vivre de peu
   ta vie t'accompagnait comme un essaim d'abeilles
   et tu payais sans marchander
   le prix exorbitant de la beauté.

   Nicolas Bouvier

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