Magazine Poésie

Les arbres

Par Vertuchou

Nous regardions nos arbres, c'était du haut
De la terrasse qui nous fut chère, le soleil
Se tenait près de nous cette fois encore
Mais en retrait, hôte silencieux
Au seuil de la maison en ruines, que nous laissions
A son pouvoir, immense, illuminée.
Vois, te disais-je, il fait glisser contre la pierre
Inégale, incompréhensible, de notre appui
L'ombre de nos épaules confondues,
Celle des amandiers qui sont près de nous
Et celle même du haut des murs qui se mêle aux autres,
Trouée, barque brûlée, proue qui dérive,
Comme un surcroît de rêve ou de fumée.
Mais ces chênes là-bas sont immobiles,
Même leur ombre ne bouge pas, dans la lumière,
Ce sont les rives du temps qui coule ici où nous sommes,
Et leur sol est inabordable, tant est rapide
Le courant de l'espoir gros de la mort.
Nous regardâmes les arbres toute une heure.
Le soleil attendait, parmi les pierres,
Puis il eut compassion, il étendit
Vers eux, en contrebas dans le ravin,
Nos ombres qui parurent les atteindre
Comme, avançant le bras, on peut toucher
Parfois, dans la distance entre deux êtres,
Un instant du rêve de l'autre, qui va sans fin.

Yves Bonnefoy

Partager cet article

Repost 0
Les arbres
&version; Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :

Vous aimerez aussi :

Besame mucho
Besame mucho
Femme d'autrefois
Femme d'autrefois
Jeanine Foucamprez vint se placer
Jeanine Foucamprez vint se placer
Conte-moi / Kontame
Conte-moi / Kontame « Article précédent

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Vertuchou 94 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine