Proses marines de la part du poète qui tend à concurrencer le peintre. Antoine Émaz observe la mer. L’exercice n’est pas simple, puisque effectué maintes fois, de tout éternité. Il le fait avec ses armes : lucidité, rigueur, perspicacité. Les yeux d’abord. Le paysage est abordé, saisi, décrit dans ses masses et ses couleurs, ses à-plats et ses courbes. Avec l’importance accordée à la vague qui bouge au bord, en continu. …une sorte de bosse d’eau… Le regard du marcheur dans le sable et la bande-son assourdi du ressac et du vent. Marcher n’a rien de conquérant ou d’utile… La toile ainsi posée, reprise chaque matin, résonne dans la tête du poète. Contraste consenti, acté entre l’immensité du spectacle et l’humain de passage. Il y a l’évidence de la confrontation avec le gigantisme de la mer et du ciel et le poète qui tient sa place minime crânement, sans forfanterie, avec l’intelligence du vivant. Les instantanés devant l’océan renvoient à d’autres souvenirs identiques ou presque, kaléidoscope infini de la mémoire. Les notes s’arrêtent provisoirement au lever du stylo, du pinceau.
Antoine Emaz, Prises de mer, Le Phare du Cousseix, 2018, 16 p., 7€
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