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(Note de lecture) Eric Sautou, Aux Aresquiers, par Isabelle Baladine Howald

Par Florence Trocmé


A voix nue


Eric Sautou  Aux Aresquiers
Poésie nue, défaite. Les mains ouvertes, sans rien dedans, ou un peu sable, un peu d’embrun, un peu de pluie. Un regard toujours brouillé. Toujours le deuil et tout ce qui s’efface, sauf cette silhouette qui s’obstine et qui observe et qui cherche les lignes si flottantes :
« le même ressac chaque chose du monde qui vient c’est toujours /chose même/ressac »
Après Une infinie précaution (Flammarion) La véranda (Unes), après Beaupré (Flammarion), après tout récemment Son enfance et C’est à peine s’il pleut (Faï fioc) dont nous avons parlé ici tout récemment, voici encore toujours un lieu : Aux aresquiers chez Unes (couverture superbe, sobrissime, parfaite).
Eric Sautou s’efforce de rejoindre ses disparus en s’effaçant à son tour, forme tremblée qui tente de toucher l’air « poésie/est chose de l’air je suis chose de l’air. »
Nous avons déjà dit ici même combien cette poésie nous bouleverse.
Toujours plus loin, essayer de toucher le mouvant de la mer, le mouvant du ciel, le mouvant du sable, le mouillé de la pluie, et l’ombre des disparus.
Il finit par comprendre : « je sais que tu ne reviendras pas », pourtant ce temps est très long, des années, faut-il le dire, jusqu’à ce qu’on comprenne cela. Peut-être le deuil arrive à son terme, mais personne ne peut le promettre, en avoir la certitude.
Ce n’est plus le fantôme qui hante, c’est lui qui hante le fantôme, en essayant de tenir debout, pour retenir encore quelque chose qui s’enfuit.
Pas de mots, ne sait plus quoi dire, ne dit plus rien. Essaie encore.
Un livre de funambule, très tendre.
Isabelle Baladine Howald

Eric Sautou Aux aresquiers, Editions Unes, 2022, 42 p, 15 €
Extrait :
la maison sous les feuilles telle que je l’ai connue c’est le même ressac
Le même ressac chaque chose au monde  qui vient c’est toujours
   chose même
ressac
*
j’ai entendu le nom de ta mort
je ne sais pas en parler
je vois le vide
indifférent
cogner aux carreaux de la pluie
*
bientôt il n’y a plus eu
la seule chose de l’amour


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